mardi 19 septembre 2023

Martin Page - Je suis un dragon

Je suis un dragon, Martin Page, 2015, 278 pages

Margot est une jeune fille normale en apparence. Solitaire certes, mais rien qui ne la fasse réellement sortir du lot. Sauf que Margot a un secret qu'elle est bien déterminée à cacher : elle est indestructible, son corps ne peut pas être blessée. Mais aucun secret, surtout de cette importance, ne peut rester indéfiniment dissimulé
« - Oui, tu es un monstre. Comme pas mal de gens. Mais toi, tu es un gentil monstre.
Et Janet Xanadu pensa à elle-même, à son absence de vie sociale et sentimentale, à son attirance pour la folie et le désordre, à sa conviction que les être les plus bizarres et hors normes représentaient davantage l'universel que ceux qui entraient dans la norme.
»
Je suis un dragon reprend le thème classique de l'apparition et du développement d'un super-héros et en propose une version aussi crédible que possible, entre honnêteté et manipulation, entre popularité et haine. S'il ne s'agit pas d'un roman de super-héros à la DC/Marvel, plein de menaces universelles et de combats épiques, ce n'est pas pour autant juste un décor pour un roman de littérature blanche. Il est évidemment question, sous la figure super-héroïque, d'humanité et de normalité - comme la majorité des ouvrages de science-fiction - mais la question du super-héros, sa gestion et son impact, est aussi une part importante du roman.

On ne peut même pas dire qu'il y a un aspect métaphorique tant il est clair que l'anormalité de Margot permet de parler de l'anormalité de tout un chacun, et de la difficulté de trouver sa place dans le monde. Un caractère explicite, une clarté, que j'ai trouvé très agréable et qui n'empiète pas sur un récit prenant basé pourtant essentiellement sur l'évolution du personnage de Margot. Un personnage fondamentalement bon et gentil pour un roman globalement à son image. Il pourrait presque paraitre un peu gentillet par moment, notamment au début, mais il cache en fait de véritables accès de violence et un effet d'ensemble loin d'être mièvre, tout en conservant une certaine aura de douceur et en dégageant quelque chose de réconfortant. Un très bon roman.
« Margot raconta une vie d'abandon, de trahison et de coups. Factuellement elle mentait, mais émotionnellement elle disait la vérité. L'imagination est parfois ce qui rend le mieux compte de la réalité. »
Couverture : Sandrine Bonini et Merwan
D'autres avis : ...

mercredi 13 septembre 2023

P. Djèli Clark - Le Mystère du tramway hanté

Le Mystère du tramway hanté, P. Djèli Clark, 2019, 101 pages

Égypte uchronique, où les djinns sont une présence quasi-normale, début du XXème siècle. Hamed et Onsi sont deux agents du ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles. Ils sont appelés pour traiter le cas d'une rame de tramway hantée par une mystérieuse présence - oui, le titre est vraiment très explicite.

Le Mystère du tramway hanté est une novella se déroulant dans le même univers que L'Étrange affaire du djinn du Caire et Maître des djinns. Elle se déroule chronologiquement entre ces deux textes, même si elle peut autant se lire en découverte de l'univers qu'après la lecture des deux autres récits - la preuve. P. Djèli Clark y développe une nouvelle fois son monde légèrement uchronique où des entités surnaturelles ont ouvertement pris place sur Terre, changeant quelque peu les rapports de force et les évolutions de la société.

Le Mystère du tramway hanté est une bonne novella. C'est une enquête simple, sans rien d'époustouflant, mais qui permet de revenir avec joie dans un univers appréciable et de côtoyer de sympathiques personnages. Et un bon moment, ça ne se refuse pas.

Couverture : Stephan Martinière / Traduction : Mathilde Montier
D'autres avis : Sabine, L'ours inculte, Jean-Yves, Célinedanaë, Le nocher des livres, Apophis, Elessar, lutin82, Marc, Boudicca, ...

jeudi 7 septembre 2023

Bulles de feu #53 - Août 2023

Un petit récapitulatif de mes lectures BDs/mangas/comics du mois, pour en garder une trace.
Le classement est absolument imparfait, insatisfaisant et un peu aléatoire mais peut donner un ordre d'idée. Les avis sont (ultra)brefs, n'hésitez pas à demander un complément d'informations en commentaire si nécessaire.

Bien / Ok / Correct


Terukan Boys - Yû Nakahara

Une bonne petite histoire qui tient la route, sur notamment le passage à la vie d'adulte, mais qui aurait mérité de compter 2-3 tomes pour être pleinement développée.


March comes in like a lion T.3-4/16 - Umino Chica

Deux nouveaux tomes qui laissent un sentiment aussi mitigé et étrange que les deux premiers : c'est parfois ennuyant et exubérant pour pas grand chose (même si j'imagine que ça peut servir à contrebalancer l'amoncellement de drames que recèle ce manga), parfois prenant comme un bon manga de sport.


Soloist in a cage T.1/3 - Shiro Moriya

Un manga sombre et violent, quasiment un battle royale, porté surtout par son dessin qui arrive à être parfois lumineux dans toute cette noirceur.


Nettoyage à sec - Joris Mertens

Une BD qui commençait très bien, des personnages qui sonnaient vrais, une vraie patte dans le dessin (surtout dans les pleines pages), une attente qui montait comme un thriller... et puis ça se termine brutalement, de manière assez désespérante à tout point de vue.


Speed Ball - Florian Pigé et Étienne Gerin

Un récit loufoque et assez violent/trash qui n'est pas ce que je préfère mais ça reste correct, porté surtout par l'ambiance graphique Funky Cops/Tyler Cross sous acide.
Très bien


La Dernière Reine - Jean-Marc Rochette

Une très bonne BD "à la Rochette", peut-être un chouïa moins marquante que "Ailefroide Altitude 3954" et "Le Loup" mais néanmoins captivante de bout en bout. Un hymne à la nature et à la bêtise humaine qui ravira les misanthropes.


L'Attaque des titans T.20-22/34 - Hajime Isayama

La fin de la première grande partie du manga avec d'énormes révélations qui ne déçoivent pas.


Les Chimères de Vénus T.1-2/3 - Alain Ayroles et Étienne Jung

Une très bonne surprise que cette histoire dans l'univers du "Château des étoiles" d'Alex Alice. Proche et différent de "l'original" tout à la fois, mais parfaitement dans l'esprit. Une solide aventure très plaisante.

vendredi 1 septembre 2023

Guy Gavriel Kay - Les Chevaux célestes

Les Chevaux célestes, Guy Gavriel Kay, Tome indépendant 1/2 des Chevaux célestes, 2010, 650 pages

Fils d'un grand général Kitai décédé, Shen Tai a décidé de porter le deuil en enterrant les cadavres des soldats morts autour du lac de Kuala Nor, lieu d'une gigantesque bataille. Pour gratifier sa bravoure et l'honneur de son acte, l'impératrice des Tagur, la nation ennemie, décide de lui offrir 250 chevaux sardiens, la plus grande richesse possible pour un Kitai. Un cadeau généreux mais empoisonné car il met Shen Tai au centre de toutes les attentions.

Les Chevaux célestes est un roman de Guy Gavriel Kay. C'est un résumé presque suffisant pour quiconque a déjà lu un livre de l'auteur tant sa plume et son travail sont uniques et particuliers. C'est seulement ma deuxième incursion dans sa bibliographie (après l'excellent Les Lions d'Al-Rassan) et j'y ai pourtant déjà retrouvé toutes ses qualités.

Ainsi Les Chevaux célestes est un livre prenant, une brique qui se dévore sans peine, qui est minutieusement détaillé mais qui garde pourtant toujours un rythme entraînant. Un livre dont la trame est logique et implacable, où chaque pièce s'imbrique parfaitement, mais qui ne l'empêche jamais de conserver la saveur de la surprise. Et au-dessus de tout cela, au-dessus de ce récit dans les hautes sphères fait de manigances et de secrets où les discussions sont l'arme la plus dangereuse, se tient la qualité première de l'auteur : ses personnages, charismatiques, raisonnés et complets.

Les Chevaux célestes n'est pas exempt de quelques défauts, comme la surprésence de romance et de sexe ou le fait qu'un des fils narratifs - celui de Li-Mei - soit un peu plus faible, ou en tout cas un peu moins bien intégré. Mais ce sont des points de détails au regard de l'ensemble qui donne envie de se plonger dans les pages Wikipédia consacrées à la dynastie Tang et à la révolte d'An Lushan. Car c'est là tout le génie de Guy Gavriel Kay : en plus de proposer un roman tout à fait plaisant et dépaysant en soi, celui-ci est en plus inspiré de périodes et faits historiques - la Chine du VIIIème siècle en l'occurrence. Et c'est passionnant. Guy Gavriel Kay est incontestablement l'empereur de la fantasy historique.

Couverture : Larry Rostant / Traduction : Mikael Cabon
D'autres avis : L'ours inculte, Lorhkan, Xapur, Apophis, Boudicca, Acr0, lutin82, , ...

jeudi 17 août 2023

Emilie Querbalec - Les Chants de Nüying

Les Chants de Nüying, Émilie Querbalec, 2022, 463 pages

Vingt-sept années. C'est le temps qu'il faudra au Yùtù, le gigantesque vaisseau-monde dirigé par Jonathan Wei, pour rejoindre la planète Nüying où une sonde a, des années plus tôt, enregistré d'étranges chants qui pourraient signaler une forme de vie. C'est pour étudier ces chants que Brume, bioacousticienne, est du voyage. Mais Jonathan Wei n'a peut-être pas que ce seul objectif en tête.

Les Chants de Nüying est un ouvrage étonnant, voire perturbant, car il ne faut pas se fier à ce qu'il laisse entrevoir par son titre, sa couverture et son résumé. Les Chants de Nüying n'est pas un roman de premier contact tel qu'on l'envisage habituellement. En tant qu'élément concret, les fameux chants ne sont qu'une fraction de la troisième partie du roman. Car avant l'exploration de Nüying, il faut d'abord préparer le lancement puis voyager. Ce n'est pas nécessairement un problème, mais il vaut mieux savoir où l'on met les yeux pour éviter une possible déception.

Cette différence entre les attentes et la réalité, cette manière dont les éléments moteurs des débuts laissent finalement la place à d'autres problématiques, m'a un peu rappelé une autre lecture récente, La Débusqueuse de mondes. Dans les deux cas j'ai autant eu de la sympathie pour un déroulé imprévisible et un changement de voies finalement assez réaliste qu'une légère frustration devant la non-concrétisation de ces mêmes voies. Un mot résume bien mon sentiment : c'est déstabilisant. Plutôt négativement au premier abord, à chaud. Plutôt positivement à froid, en y réfléchissant après coup.

Car une fois comprise et acceptée cette différence, et malgré une fin potentiellement grandiose mais surtout assez obscure, Les Chants de Nüying est un livre prenant et agréable à lire. Il n'est pas pleinement satisfaisant, il laisse des questions en tête, mais il crée aussi une aventure assez unique, tant par la culture dans laquelle il puise que par ses nombreuses pistes de réflexion sur la vie - rien que ça.

Il est des romans qui sont carrés, qui suivent leur cours de manière limpide, où chaque chose va gentiment à sa place. Il en est d'autres qui sont là pour surprendre le lecteurice, pour lui faire prendre des chemins qu'il n'aurait pas pu imaginer lui-même. Les Chants de Nüying est clairement de cette deuxième catégorie.

Couverture : Manchu
D'autres avis : FeydRautha, Lorhkan, Célinedanaë, Lullaby, Brize, Le Maki, Le chien critique, FeyGirl, Anudar, Le nocher des livres, Marc, Elwyn, Boudicca, Zoé, Sometimes a book, ...

Deuxième escale pour le Summer Star Wars Andor

lundi 7 août 2023

Bulles de feu #52 - Juillet 2023

Un petit récapitulatif de mes lectures BDs/mangas/comics du mois, pour en garder une trace.
Le classement est absolument imparfait, insatisfaisant et un peu aléatoire mais peut donner un ordre d'idée. Les avis sont (ultra)brefs, n'hésitez pas à demander un complément d'informations en commentaire si nécessaire.

Bien / Ok / Correct



Le Maître des livres T.9-10/15 - Umiharu Shinohara

Toujours bien, dans la continuité de la série.



March comes in like a lion T.1-2/16 - Umino Chica

Une série sur fond de shogi qui ne doit pas être jugée sur son dessin et quelques scènes un peu loufoques, c'est bien plus dramatique que ça. C'est un peu difficile de rentrer dedans par manque d'exposition et je ne suis pas totalement emballé, mais il y a un petit quelque chose d'intrigant.



Lost Children T.10/10 - Tomomi Sumiyama

Un dernier tome qui a un peu pâti du délai de lecture avec les 9 premiers volumes mais qui est tout de même une bonne conclusion d'une chouette série qui restera comme une bonne surprise.



The Promised Neverland T.17-20/20 - Kaiu Shirai et Posuka Demizu

Un arc final assez classique, un peu facile et moins surprenant, plus dans l'action. On est loin de l'excitation des débuts mais la série a tout de même le mérite de conserver ses valeurs jusqu'au bout.



Spy X Family T.4-5/? - Tatsuya Endo

Je n'aime pas vraiment les histoires basées sur des quiproquos donc ce n'est fondamentalement pas pour moi. Mais ça reste bien fait et agréable si je lis la série à petite dose, les personnages étant sympas.
Très bien



Asadora ! T.7/? - Naoki Urasawa

Il ne se passe pas grand chose et ça n'avance pas beaucoup, mais ça reste un vrai plaisir.



L'Attaque des titans T.19/34 - Hajime Isayama

Toujours très bien.



Insomniaques T.8-9/? - Makoto Ojiro

Toujours adorable. C'est particulièrement très bon dans les dessins sans texte, qui en disent beaucoup.



Bride Stories T.14/? - Kaoru Mori

Pas le tome le plus marquant de la série - sauf pour les amoureux de chevaux - mais ça se lit (et s'admire vu le niveau de détails des dessins) toujours aussi bien.



Les 5 Terres T.10/? - Lewelyn et Jérôme Lereculey

Toujours solide.

mardi 1 août 2023

Laurine Roux - L'autre moitié du monde

L'Autre moitié du monde, Laurine Roux, 2022, 252 pages

Espagne, années 1930, dans le delta de l'Èbre. Sur les terres des Ibáñez, les paysans triment à longueur de journée sous la houlette d'une Marquise sans pitié et les 'dérapages' perpétrés par son fils Carlos. Alors que la colère gronde et monte dans tout le pays, elle pourrait bien atteindre cette petite région, surtout après l'arrivée dans l'école locale d'un nouveau jeune professeur.

L'Autre moitié du monde conte une période cruciale de l'Histoire espagnole, celle de la montée des idées socialistes et anarchistes d'un côté et des idées fascistes de l'autre, qui entraînera une guerre civile et la prise de pouvoir de Franco. Cette lutte nationale nous est racontée en filigrane, à la fois très présente mais surtout en arrière-plan. Ce vent de changement, Laurine Roux nous le présente à hauteur d'êtres humains - particulièrement par les yeux de Toya, une jeune fille au début de l'histoire - dans cette communauté du delta dont les aspirations à la liberté sont entravées par la puissance de l'aristocratie en place.

L'Autre moitié du monde est un drame. C'est énoncé clairement dès le prologue - étonnant mais qui fera pleinement sens plus tard, tout comme une certaine rupture temporelle déstabilisante mais finalement parfaite - un prologue qui évoque les bouquets de fleurs attachés au bord des routes. La lutte sera dure, la lutte sera violente et la lutte ne sera pas victorieuse. Mais la lutte a du coeur, la lutte a de la force, la lutte a de la vie. Et elle donne envie de lutter malgré tout, malgré les difficultés externes et les stupidités internes.

L'Autre moitié du monde ne doit pourtant pas être vu comme un pur roman de lutte politique. C'est aussi, surtout, un livre sur la vie et sur la mémoire, le souvenir. Et c'est un ouvrage de Laurine Roux. Si, en comparaison avec Une immense sensation de calme et Le Sanctuaire, il est sans aucun doute le texte de l'autrice qui a le plus fort ancrage dans le réel, dans notre réalité, il conserve toutefois cette importante présence de la nature.

Et c'est un ouvrage de Laurine Roux (bis). Ce qui veut dire qu'il possède l'impressionnante écriture de l'autrice. Je suis incapable d'en rendre toute la force et l'intelligence, mais c'est une nouvelle fois puissant, évocateur, mélodieux, ... Ce n'est jamais difficile à lire, ce n'est pas plein d'esbroufe et d'effets tape-à-l’œil, mais il y a pourtant indéniablement quelque chose d'unique et de majestueux dans ses lignes. Laurine Roux est une autrice exceptionnelle et L'Autre moitié du monde est une nouvelle fois un excellent roman.

Couverture : Hulton Deutsch / Getty Images

mardi 25 juillet 2023

Luce Basseterre - La Débusqueuse de mondes

La Débusqueuse de mondes, Luce Basseterre, 2017, 379 pages

D'Guéba est une débusqueuse de mondes. Avec Koba, son cybersquale, tout autant vaisseau qu'être conscient, elle parcourt l'espace à la recherche de planètes abandonnées auxquelles elle pourra donner une nouvelle vie pour ensuite les revendre. Sur une de ces planètes dévastées, elle recueille un jour un naufragé, Otton, un humain ancien esclave. Un passager temporaire qui va s'avérer plus difficile que prévu à débarquer.

La Débusqueuse de mondes est un space-opera. C'est la meilleure définition que je puisse en faire. On s'y déplace dans l'espace, on visite plusieurs planètes, on rencontre diverses espèces extraterrestres, on participe à quelques moments de tension et de combat, on essaye d'y démêler une machination à grande échelle, ... Tout ce qu'on peut imaginer comme base d'un space-opera est dans La Débusqueuse de mondes.

Et ça fonctionne bien. Ça ne révolutionne rien, il n'y a rien d'incroyable dans l'écriture ou dans l'intrigue, mais ça n'en est pas moins une lecture simple, efficace et agréable. Tel qu'on peut l'imaginer et l'attendre d'un 'petit' space-opera. Le seul bémol concerne la fin, qui ne clôt pas vraiment tous les fils ouverts, ou un peu à la va-vite, sans leur accorder l'importance qui était laissé supposer. Ça a en un sens un côté réaliste, les aléas de la vie peuvent toujours modifier les plans établis, mais ça reste un peu insatisfaisant. C'est toutefois minime et c'est bien compensé par le cadre sympathique à explorer, par la présence des cybersquales et par le triple point de vue qui est bien utilisé, ne radote pas et sert à entrevoir les petites cachotteries de chacun. La Débusqueuse de mondes est un sympathique roman. Et si on devait lui donner une note, ça serait assurément space-opera/20.

Couverture : Alain Brion
D'autres avis : Lhisbei, FeyGirl, ...
Première escale pour le Summer Star Wars Andor

samedi 15 juillet 2023

Terry Pratchett - Le Faucheur

Le Faucheur, Terry Pratchett, Tome 11/35 des Annales du Disque-Monde, 1991, 349 pages

Le Faucheur, comme son titre l'indique, est un tome mettant en scène La Mort. L'un des personnages les plus populaires - hum - et les plus connus du Disque-Monde. Un peu trop au regard des forces régissant l'univers, qui décident que La Mort doit mourir. Ce qui va avoir quelques fâcheuses conséquences, de type vitales.

Avec La Mort au centre du récit, Le Faucheur est forcément un très bon tome. Et ce même si ce dernier sort légèrement de son archétype et s'humanise un peu. Cela ne réduit pas l'aura du personnage, au contraire, chacune de ses apparitions étant un immense plaisir. Il permet aussi d'apporter, notamment sur la fin, un ton un peu plus sérieux - loin d'être désagréable - sur des sujets justement liées à la mort, sans jamais tomber dans la mélancolie, restant du côté de l'apaisement.

Le seul petit défaut de ce volume, c'est la résolution des deux fils narratifs - La Mort qui cherche à survivre et l'alliance mages/êtres surnaturels qui luttent contre un ennemi absolument improbable et imprévisible. Les deux se concluent de manière pas forcément très claire et un peu facilement. Ce qui n'est qu'un demi-bémol, puisque cela permet d’accélérer la dernière partie et d'y garder de la surprise jusqu'au bout, évitant le passage obligé de la longue scène d'action finale sans suspense. C'est peut-être là que Le Faucheur prouve qu'il est un vrai bon tome : même son défaut est finalement une qualité.

Couverture : Josh Kirby / Traduction : Patrick Couton

dimanche 9 juillet 2023

Tatsuhiko Shibusawa - Le Voyage sur les mers du prince Takaoka

Le Voyage sur les mers du prince Takaoka, Tatsuhiko Shibusawa, 1987, 205 pages

Japon, IXème siècle. Le prince Takaoka est le troisième enfant de l'empereur Heizel. Déchu de son statut de prince héritier, il devient moine bouddhiste. À plus de 60 ans, il décide de faire un dernier voyage spirituel vers l'Inde. C'est ce voyage qui est retracé dans ce roman au titre parfaitement évocateur.

Le Voyage sur les mers du prince Takaoka est une fiction historique aux accents de fantasy. Le prince Takaoka - attention, petit divulgâchage, sans grande importance, de la fin du roman sur la page Wiki - est un personnage ayant réellement existé, tout comme ce voyage. Si je ne sais pas dire dans quelle mesure les péripéties de ce trajet sont véridiques, elles semblent en tout cas toutes s'inspirer de légendes et récits littéraires de l'époque ou ultérieurs. C'est une sorte d'hommage que rend Tatsuhiko Shibusawa à tout ce folklore du passé en donnant une existence concrète et réelle à tous ces mythes, du dugong sachant parler aux tapirs mangeurs de rêves.

Le Voyage sur les mers du prince Takaoka est un ouvrage étonnant. Je ne peux pas dire que ça soit un très bon livre puisqu'il s'agit surtout d'un enchaînement de péripéties - chaque chapitre correspond à une aventure - sans trop de sens ni finalité réellement satisfaisante. Mais je ne peux pas non plus dire que c'est un mauvais livre. L'intention est louable et intéressante et surtout ça se lit plutôt bien. C'est un ouvrage à part, qui ne se compare à rien d'autre et qui crée sa propre petite bulle. Un roman hors du temps, ce qui correspond parfaitement au petit côté suranné qui saupoudre ses pages.

Couverture : Sujil Sukumaran / Traduction : Patrick Honnoré

lundi 3 juillet 2023

Bulles de feu #51 - Juin 2023

Un petit récapitulatif de mes lectures BDs/mangas/comics du mois, pour en garder une trace.
Le classement est absolument imparfait, insatisfaisant et un peu aléatoire mais peut donner un ordre d'idée. Les avis sont (ultra)brefs, n'hésitez pas à demander un complément d'informations en commentaire si nécessaire.

Bien / Ok / Correct



Frieren T.7/? - Kanehito Yamada et Tsukasa Abe

Un tome tranquille qui va parfaitement bien avec le ton unique de la série.



Kaiju n°8 T.8/? - Naoya Matsumoto

Toujours aussi dynamique et efficace.



Ne m'oublie pas - Alix Garin

Un road-trip familial sur les affres d'Alzheimer et la nécessité de vivre le présent. Je n'ai pas réussi à m'y investir pleinement mais c'est indéniablement un ouvrage de qualité et émouvant.



Deep me - Marc-Antoine Mathieu

Une vraie expérience pendant plus de la moitié de l'ouvrage, avec principalement de grands aplats noirs et quelques pensées, tendu et prenant comme un thriller. Sans être mauvaise, la conclusion ne m'a malheureusement pas emballé et a diminué mon appréciation d'ensemble, mais ça reste un ouvrage assez unique.



Les Reflets du monde - En lutte - Fabien Toulmé

Un intéressant triple reportage sur des luttes à hauteur de femmes, où tout est modéré et respectable.
Très bien



L'Attaque des titans T.14-18/34 - Hajime Isayama

La vue d'ensemble se dégage un peu grâce à quelques révélations et mouvements, et donne toujours plus d'importance à une potentielle révélation finale qui devra être à la hauteur pour ne pas tout gâcher.



Ajin T.1-3/17 - Tsuina Miura et Gamon Sakurai

Une bonne surprise, une intrigue solide qui donne envie d'en savoir plus sur les ajins, ces humains immortels. Un peu violent mais moins que prévu, sanglant dans des mesures acceptables. Un dessin simple et limpide, qui convient parfaitement avec le récit et l'envie de le dévorer.

mardi 27 juin 2023

T.J. Klune - Sous la porte qui chuchote

Sous la porte qui chuchote, T.J. Klune, 2021, 468 pages

Wallace Price est un avocat implacable. S'il n'inspire aucune sympathie à son entourage, tout va pourtant bien pour lui. Jusqu'à ce qu'il meure subitement d'une crise cardiaque. Au lieu de le conduire dans l'au-delà, une faucheuse du nom de Mei l'emmène... dans un salon de thé, La Traversée de Charon, où le tenancier, Hugo, est là pour permettre aux morts de passer sereinement au-delà de la porte.

Sous la porte qui chuchote est un livre sympathique qui se lit facilement, qui comporte quelques bons passages et propose une agréable représentation queer, traitant toutes les relations de manière égale et normale. Cette dernière qualité est malheureusement aussi un petit défaut à titre tout à fait personnel : s'il traite de la mort, du deuil et par extension de la manière dont vivre sa vie, Sous la porte qui chuchote est fondamentalement une romance. Et ça n'a jamais été mon fort.

L'autre bémol qui m'appartient, c'est qu'il tient difficilement la comparaison avec les livres de Becky Chambers. T.J. Klune partage pourtant avec elle l'écriture de romans feel-good, avec peu d'action, basés sur les personnages et avec une forte propension à boire du thé. Sauf qu'ici, tout m'a semblé plus lisse, plus lambda, moins profond, moins touchant.

S'il n'est pas forcément juste de ma part de tenir rigueur à T.J. Klune de ces deux bémols, c'est un peu moins le cas des deux suivants. D'abord la rédemption du personnage de Wallace est bien trop rapide, passant de personnage supposément antipathique et détestable (et intéressant) à sympathique (et banal) héros de l'histoire en à peine quelques pages. Mais le plus gros problème est surement le dénouement du récit, sans surprise mais qui vient à mon sens à l'encontre totale du coeur même de l'intrigue.

Si je m'étends plus sur les défauts que sur les qualités, car ce sont ces premiers qui sont plus saillants, Sous la porte qui chuchote reste malgré tout un livre sympathique, à défaut d'être un très bon roman.

Couverture : Red Nose Studio / Traduction : Benoit Domis
D'autres avis : Sabine, ...

dimanche 18 juin 2023

Alexandra Koszelyk - La Dixième Muse

La Dixième Muse, Alexandra Koszelyk, 2021, 280 pages

Alors qu'il erre dans le cimetière du Père Lachaise, Florent se retrouve devant la tombe de Guillaume Apollinaire. Une rencontre anodine qui va pourtant l'obnubiler, le mettre sur les traces du poète et bouleverser sa vie.

Aussi court et vide soit-il, ce résumé contient pourtant l'ensemble de l'intrigue de La Dixième Muse. Il y a donc d'un côté Florent, qui change et sombre quasiment dans la folie (ou la magie, mais y a-t-il une différence entre les deux ?), ou tout du moins dans une obsession pour Apollinaire qui le fait s'éloigner de sa compagne. Et de l'autre il y a Guillaume Apollinaire, dont la vie nous est contée par bribes et par épisodes, par des parents et ami.e.s l'ayant côtoyé au cours de sa vie. Les deux s'alternant d'un chapitre à l'autre, les pas de Florent le menant, comme de par hasard, sur les passages biographiques d'Apollinaire.

La Dixième Muse est un ouvrage étonnant qui n'avait rien pour me plaire. Le personnage de Florent est un peu énervant, assez apathique et pas franchement emballant, pas de quoi me donner une incroyable envie de le suivre et de me passionner pour sa petite vie de littérature blanche. Quant à Apollinaire, je ne le connaissais pratiquement pas et je n'ai aucun atome particulièrement crochu avec la poésie. Autant dire que ma lecture fut parfois à la limite de l'ennui et d'un certain désintérêt pour son côté vain. Et pourtant.

Pourtant il y a quelque chose dans ce livre. Quelque chose qui rend certains passages tout à fait exaltants. La Dixième Muse est un hymne à la poésie et à la nature et il est porté par l'amour que leur porte l'autrice. Il y a, et c'est bienvenu vu le thème du roman, une poésie dans les mots d'Alexandra Koszelyk. Particulièrement dans les parties consacrées à Apollinaire, qui m'ont fait me passionner pour sa vie. Le style est un peu différent dans la moitié dédiée à Florent, avec des phrases là aussi courtes mais qui produisent cette fois un sentiment d'urgence et un halètement à la lecture.

Tout n'est pas parfait, loin de là. Rien que la construction du récit est aussi maline qu'artificielle. Jusqu'à une dernière partie qui donne le sentiment d'abandonner la structure avant son terme tout en faisant sens. Tout est ainsi, rien n'est véritablement constant sans pour autant amoindrir l'unité de l'ensemble. Tout est ambivalent dans ce roman, tous les éléments sont susceptibles de laisser enthousiaste et sceptique, parfois en même temps.

Mais au final, malgré tous les potentiels bémols, le sentiment qui domine reste la satisfaction. Parce que le roman se conclut sur une bonne note. Mais surtout parce qu'il se passe quelque chose entre ses pages, il y a ce petit truc qui le fait sortir du lot et le laisse trotter dans la tête. C'est un livre qui donne envie d'en parler, envie d'écrire, de pérorer, de conter, de jouer avec les mots, de poétiser. C'est un livre qui apporte de la vie.

Couverture : Elena Vieillard
D'autres avis : Zoé, Sabine, ...

lundi 12 juin 2023

Stephen Graham Jones - Un bon indien est un indien mort

Un bon indien est un indien mort, Stephen Graham Jones, 2020, 346 pages

Quatre amis d'enfance, indiens - comme ils se nomment eux-mêmes -, ont pris part à un braconnage, tuant tout un troupeau de caribous. Dix ans plus tard, alors que seulement deux d'entre eux vivent encore dans la Réserve, tous vont subir les conséquences de cette chasse illégale et la vengeance des cervidés.

Malgré sa structure en quatre parties, Un bon indien est un indien mort se divise en fait en deux moitiés. La première se concentre sur le personnage de Lewis et sa descente aux enfers. Une partie intéressante puisque, si on omet le pitch du roman et le destin de Ricky en préambule, le doute est constamment permis entre paranoïa et véritable présence d'une entité maléfique. À défaut d'être vraiment plaisant, c'est assez fascinant à suivre et c'est vraiment bien mené, montrant bien avec quelle facilité on peut sombrer dans la folie.

La seconde moitié se concentre sur Gabe et Cassidy. Et avec elle l'aspect psychologique va fondre, pour que le roman devienne une sorte de slasher. J'étais déjà convaincu que ce n'est pas quelque chose qui m'intéresse, j'en ai eu la confirmation, j'ai trouvé ça assez vain. Et ce n'est pas le propos sur les indiens, assez maigre et pas franchement marquant, en arrière-plan, qui aura réussi à éveiller mon intérêt. La bonne nouvelle toutefois, pour moi qui n'en suis pas client, c'est que l'aspect horrifique de ce roman fantastico-horrifique est léger et plus que supportable, c'est toujours ça.

Couverture : Kaiwan Shaban / Traduction : Jean Esch
D'autres avis : Lorhkan, Gromovar, Célinedanaë, Le nocher des livres, Marc, ...

lundi 5 juin 2023

Bulles de feu #50 - Mai 2023

Un petit récapitulatif de mes lectures BDs/mangas/comics du mois, pour en garder une trace.
Le classement est absolument imparfait, insatisfaisant et un peu aléatoire mais peut donner un ordre d'idée. Les avis sont (ultra)brefs, n'hésitez pas à demander un complément d'informations en commentaire si nécessaire.

Mouais



Black-Box T.6/6 - Tsutomu Takahashi

Lu parce qu'il ne restait qu'un tome mais mon intérêt s'était déjà envolé, même pour l'espèce de rédemption qui conclut la série.
Bien / Ok / Correct



Le Roi-Cerf T.1-2/2 - Tarō Sekiguchi

Une adaptation des romans de Nahoko Uehashi. C'est correct, ça se lit, mais c'est trop précipité pour être attachant ou vraiment clair.



T'zée - Une tragédie africaine - Appollo et Brüno

Une bonne BD avec les dessins si particuliers (et appréciables, me concernant) de Brüno et une histoire qui gagne en qualité en se renseignant sur Mobutu mais qui reste un peu trop à la surface, plus présentation qu'approfondissement.



Spy X Family T.3/? - Tatsuya Endo

Une sympathique série et le teasing du potentiel futur meilleur personnage.



Le Maître des livres T.7-8/15 - Umiharu Shinohara

Toujours bien, entre joyeuses improbabilités et moments touchants.



Shi T.1-5/? - Zidrou et Homs

Le dessin n'est pas mon favori mais il va très bien avec l'aspect crasseux du récit. L'histoire est assez solide mais ça manque un peu de punch et ça traine en longueur, mon intérêt a faibli au fur et à mesure des tomes.


Les Pizzlys - Jérémie Moreau

Il faudrait que je relise La Saga de Grimr pour pouvoir vraiment le dire, mais ce n'est pas loin d'être la meilleure oeuvre de Jérémie Moreau. Un dessin - et des couleurs - encore plus atypique que d'habitude par moment, mais qui fait corps avec l'histoire, et un récit qui parle autant de citadins français que des autochtones d'Alaska, avec une certaine pudeur et en évitant la moralisation.


Jamais - Le jour J T.2/one-shot - Bruno Duhamel

La bonne surprise. C'est frais et sympa, avec un rapide fond historique et toujours une petite critique sociale. Je n'en attendais rien, au contraire, étant donné que le "premier tome" se suffisait pleinement à lui-même et que je ne voyais pas du tout ce qu'il y avait à dire de plus, mais Duhamel prouve une nouvelle fois qu'il est un très bon bédéaste.
Très bien



Le Spectateur - Théo Grosjean

Atypique sur la forme, en vue subjective d'un personnage muet. Sombre sans être déprimant sur le fond, avec une sensation de "vraie vie", de "vie lambda", rarement égalée. Puissant dans les deux aspects, d'une puissance qui se ressent plus qu'elle ne se met en mots.


Les 5 Terres T.7-9/? - Lewelyn et Jérôme Lereculey

Début du deuxième cycle, centré cette fois sur les primates, et c'est toujours aussi excellent. C'est somptueux graphiquement, personnages comme décors, et le récit est riche et dense tout en parvenant à être limpide et bien équilibré entre ses différents fils, ce qui est une vraie prouesse.
Excellent



Space Brothers T.39-41/? - Chûya Koyama

Il n'y a pas un tome, pas un chapitre, pas une page qui soit un ton en dessous dans ce manga, tout est excellent. Et le petit clin d'oeil, le bouclage de la boucle, du tome 41 est admirable.