dimanche 29 septembre 2019

Laurent Kloetzer - Issa Elohim

Issa Elohim, Laurent Kloetzer, 2018, 125 pages
« L'attente, les doutes, les incertitudes, tout ceci use les esprits et les volontés. Ceux des réfugiés, en premier lieu, ceux des personnes qui les aident. On est sans cesse inquiet, sans cesse à l'affut. C'est destructeur. »
En reportage dans un camp de réfugiés en Afrique du Nord, Valentine Ziegler va faire la connaissance d'Issa, supposément un Elohim, un être mystérieux, entre apparition extraterrestre et réincarnation divine pour les uns, supercherie manipulatrice pour les autres.

Issa Elohim est l'occasion pour Laurent Kloetzer de mettre une nouvelle fois en scène un Elohim, ces présences déjà aperçues dans Anamnèse de Lady Star et Vostok. La rencontre est cette fois-ci plus frontale et somme toute plus claire, ce qui ne veut pas dire que le mystère disparaît, bien au contraire.

Outre les Elohims, et par leur biais la foi, l'autre thème central d'Issa Elohim ce sont les réfugiés et les migrants. Les deux sujets se mélangent très bien, l'un servant l'autre - et vice-versa - et aucun ne prend le dessus. Surtout, Laurent Kloetzer conserve un ton neutre qui ne cherche pas à donner de leçons et le récit n'en retire que plus de saveur, plus de profondeur. Une intelligente novella, humaine, qui parvient à traiter deux sujets difficiles et à en tirer de la beauté, une réussite.

mardi 24 septembre 2019

Grégoire Courtois - Suréquipée

Suréquipée, Grégoire Courtois, 2015, 162 pages
« Il ne s'agit pas de Pygmalion, du Golem ou de la créature de Frankenstein. Ça n'est pas de la romance ou de la magie. C'est de la génétique. Cette voiture n'a aucun secret pour nous ; elle est un fait scientifique. »
En ce début de XXIIème siècle, la BlackJag est la première voiture organique à voir le jour. À travers les enregistrements du tout premier modèle, Suréquipée nous présente ce nouveau type de véhicule pendant qu'un mystère tente d'être résolu.

Et la plus grande partie du mystère - si vous n'avez pas lu la quatrième de couverture - c'est déjà de savoir quel est le but de tout ça, pourquoi deux personnages étudient les logs de cette BlackJag. Ce qui ne fait donc qu'ajouter du mystère au mystère. Et c'est très bien ainsi.

En toute logique, Suréquipée joue à fond la thématique de la relation homme/voiture et en explore plusieurs facettes. C'est intelligent, et ce même si on n'est pas trop branché voiture. D'autant plus que le roman est court, une longueur parfaitement adaptée et satisfaisante.

Suréquipée est un diesel. Si les ficelles sont un peu visibles au démarrage, le récit trouve très rapidement son rythme et devient prenant, et même surprenant, à plus d'un titre. Un roman tout simplement réussi.

Nota : cette version FolioSF propose l'une des plus belles couvertures jamais publiées, par Frédéric Le Martelot.

D'autre avis : Lorhkan, Lune, Lianne, itenarasa, ...

jeudi 19 septembre 2019

Paul J. McAuley - Le Choix

Le Choix, Paul J. McAuley, 2011, 83 pages

Le jour où un dragon marin s'échoue sur une plage, Damian et Lucas n'hésitent que peu avant de monter à bord de la frêle embarcation de ce dernier : l'occasion est trop rare de pouvoir approcher d'un engin extraterrestre.

Oui, il y a des choix, plutôt au pluriel d'ailleurs, dans Le Choix, des décisions qui vont impacter la vie de nos deux protagonistes. Oui aussi, je n'aurais jamais écrit cette phrase ni penser à cette histoire sous cet angle s'il n'y avait pas eu ce titre. Et pour cause : il y a suffisamment de bonnes choses dans cette novella pour ne pas la résumer à un simple choix.

Le Choix est un récit éminemment fluide et humain qui se lit d'une traite. En seulement 80 pages, Paul J. McAuley parvient à donner réellement corps à un monde, le nôtre dans un possible futur, et à raconter une histoire complète, le tout dans un rythme parfait permettant de s'imprégner de l'univers et de profiter d'une solide intrigue, sans que l'un n'empiète sur l'autre.

Le Choix n'est pas un récit qui tire de grands "wahou" du lecteur, ni qui laisse un sentiment de "chef d'oeuvre". Il est de la catégorie juste à côté - la catégorie des mal-aimés, ceux qui ne finissent jamais dans les tops de fin d'année - celle des récits qui font les choses bien, très bien, sans fausse note, qu'on lit avec plaisir et satisfaction. Et c'est déjà beaucoup. Une vraie novella de choix.

D'autre avis : Lorhkan, Lune, Yogo, L'Ours inculte, Lhisbei, Vert, ...

samedi 14 septembre 2019

Bulles de feu #17 - Jean-Marc Rochette et la montagne

Ailefroide, Altitude 3954, Olivier Bocquet et Jean-Marc Rochette, 2018, 290 planches

L'Ailefroide, c'est un ensemble de sommets du massif des Écrins, dans les Alpes. Désormais, c'est aussi une excellente bande dessinée contant la passion de la montagne et de l'alpinisme. Une passion émerveillante certes, mais montrée ici dans toute sa complexité, faite autant de bonheurs que de malheurs. Car la montagne prend tout autant qu'elle donne.

Ailefroide c'est aussi - d'abord - le récit autobiographique de Jean-Marc Rochette, artiste multi-facettes notamment connu pour ses travaux d'illustrateur sur Le Transperceneige. C'est l'itinéraire d'un gamin qui cherche sa voie entre les voies. C'est prenant, c'est fascinant. Le genre d'oeuvre où l'on devient le personnage, où l'on ressent ses joies et ses peines.

Il n'y a plus à prouver que l'alpinisme et l'escalade font de parfaits sujets d'histoires passionnantes, que cela soit en BD ou dans d'autres médias - le documentaire Free Solo méritant plus que largement son Oscar. Ne reste plus qu'à savoir partager cette passion pour les sommets, pour cette subtile alliance de simplicité et de complexité. Ailefroide y parvient admirablement.

Le Loup, Jean-Marc Rochette, 2019, 102 planches
« Le berger et le loup, c'est pas fait pour être ensemble. »
Gaspard est berger. À la suite d'une attaque sur ses moutons, il abat une louve. Mais son petit, loup blanc en devenir, survit. S'engage alors une relation particulière entre les deux individus, une lutte passionnelle.

Le sujet était casse-gueule, mais Jean-Marc Rochette n'a même pas commencé à trébucher. Le Loup est une habile bande-dessinée où l'auteur désamorce très tôt une potentielle prise de parti entre pro et anti loups. S'en suit une histoire prenante, haletante, qui grandit au fil des pages et finit par en dire beaucoup plus que ce que le pitch de départ pouvait laisser penser. Un message explicité par la très intelligente et intéressante postface de Baptiste Morizot. Le tout une nouvelle fois sous le crayonné caractéristique de Jean-Marc Rochette et sous le patronage de la montagne, toujours belle et dure à la fois.

lundi 9 septembre 2019

Laurent Genefort - L'Affaire du rochile

L'Affaire du rochile, Laurent Genefort, Univers d'Omale, 2008, 97 pages

Omale, région de Pargam, à la frontière entre les aires humaines et chiles, lors d'une époque de paix relative. Ramin Palana, humain et ancien militaire, revient dans son village natal de Trois-Roches pour enquêter sur une série de meurtres sanglants qui seraient dus à une bête chile et qui pourraient bien enflammer de nouveau la région.

Là où les romans se déroulant sur Omale ont tendance à prendre leur temps concernant les intrigues, L'Affaire du Rochile propose pour sa part une enquête dynamique et spontanée qui va à l'essentiel, tout en continuant d'explorer les relations humano-chiles. Bien que l'enquête soit un peu linéaire - mais c'est quasi-obligatoire vu le format, et son titre, le seul vrai bémol de cette nouvelle, ne l'aide pas - le texte reste de qualité et le plaisir est tout de même largement au rendez-vous.

Troisième escale pour le Summer Star Wars - Solo

mercredi 4 septembre 2019

Stuart Turton - Les Sept Morts d'Evelyn Hardcastle

Les Sept Morts d'Evelyn Hardcastle, Stuart Turton, 2018, 537 pages


Evelyn Hardcastle sera assassinée ce soir à 23h. Par qui et comment ? C'est ce que doit découvrir notre protagoniste principal. Il a pour cela 8 jours... 8 fois cette même journée cruciale, en prenant à chaque fois place dans un hôte différent.

Difficile de ne pas jouer au jeu des comparaisons et du mash-up en parlant de ce roman tant ses éléments principaux sont caractéristiques : une boucle temporelle complètement timey-wymey, une intrigue en un seul lieu, des personnages ayant tous des secrets, un polar aux rebondissements en série, ... Pour autant, Les Sept Morts d'Evelyn Hardcastle n'est pas une pâle copie d'un Agatha Christie ou d'Un Jour sans fin. Au contraire, Stuart Turton a su prendre le meilleur de chaque élément, les mixer et aller encore plus loin en ajoutant sa propre touche. Le résultat est magistral.

Digne des plus grands whodunits, Les Sept Morts d'Evelyn Hardcastle tient en haleine de la première à la dernière page. La lassitude ne pointe jamais, bien au contraire : le plaisir et l'intérêt parviennent même à augmenter encore dans la seconde moitié du récit.

Un excellent roman, utilisant astucieusement la SF pour proposer une très belle variation - et même plus - d'un thème pourtant déjà traité plus que de raison. Le tout maîtrisé à la perfection par l'auteur. Magistral, c'est le mot.

D'autre avis : Gromovar, Yuyine, TmbM, Yogo, Lune, Tigger Lilly, FeydRautha, ...