mercredi 31 juillet 2019

Thomas Geha - Des Sorciers et des Hommes

Des Sorciers et des Hommes, Thomas Geha, 2018, 318 pages

Hent Guer est un guerrier, Pic Caram un sorcier. Extrêmement doués individuellement, chacun dans son domaine, ils forment ensemble un duo plus qu'efficace. Une alliance qu'ils mettent à disposition de quiconque proposera une récompense sonnante et trébuchante suffisante. En n'oubliant jamais qu'ils ne servent les intérêts que d'un seul maître : eux-mêmes.

Des Sorciers et des Hommes conte les aventures d'un duo de méchants. Pas de ces voleurs gouailleurs et sympathiques qu'on trouve parfois, non, de vrais méchants qui prennent plaisir à arnaquer, voler, tuer et autres joyeusetés. Si vous vous demandiez pourquoi on n'en voit pas plus souvent, une partie de la réponse est ici : on s'y attache quand même beaucoup moins. Heureusement pas au point de rendre déplaisants les cinq premiers épisodes de ce livre, cinq courtes histoires contant chacune une malfaisante aventure du duo.

Le sixième épisode est lui bien plus long et est la conclusion logique - trop logique - des cinq premiers. Passée la surprise initiale, tout y est trop linéaire, sans la fraicheur et la différence des aventures précédentes. Même le développement, attendu, de certains personnages et surtout de l'univers n'est pas si satisfaisant et ne rassasie pas.

Entendons-nous bien : Des Sorciers et des Hommes est loin d'être un mauvais livre, mais je n'ai pas trouvé ça assez plaisant à lire pour en être pleinement satisfait. Ma déception est d'autant plus grande que le roman et l'univers sont remplis de bonnes idées et de potentiel, mais malheureusement leur traitement ne m'a pas convaincu. Il n'en reste pas moins que Thomas Geha fait ici une vraie proposition, offre quelque chose de différent, et, cet aspect-là ne peut être que salué.

D'autres avis : Lune, Lorhkan, Célindanaé, ...

jeudi 25 juillet 2019

Jean-Laurent Del Socorro - Boudicca

Boudicca, Jean-Laurent Del Socorro, 2017, 251 pages

Boudicca est une biographie romancée, aux accents oniriques, de Boadicée, reine des Icènes, peuple du sud de l'actuelle Angleterre, au premier siècle. Jean-Laurent Del Socorro y brode une vie à son héroïne sur la base des maigres informations connues à son sujet, sans jamais tomber dans l'éloge ou la déification, Boudicca y apparaissant même parfois assez antipathique, notamment dans sa jeunesse.

Boudicca est un livre sans fioriture, qui va à l'essentiel en proposant un très bon équilibre des différentes parties. L'auteur dresse un portrait, tout autant humain qu'historique, d'une femme en lutte, contre l'envahisseur romain, contre un monde qui change mais aussi contre les mots, dits ou non-dits. Un double intérêt qui n'est pas sans rappeler Lavinia d'Ursula Le Guin, en plus actif. Une belle mise en lumière d'une période lointaine rendue intéressante et facile d'approche.

vendredi 19 juillet 2019

N.K. Jemisin - La Cinquième Saison

La Cinquième Saison, N.K. Jemisin, Tome 1/3 des Livres de la Terre Fracturée, 2015, 457 pages

Vous ouvrez le livre. Celui tant encensé, celui tant acclamé. Heureusement vous avez quelque peu oublié, au moins les détails. Vous y arrivez l'esprit libre. Prêt à plonger dans un nouvel univers, prêt à partir à la découverte, prêt à vous évader. Vous plongez... et, par le Père Terre, vous vous y immergez tant et si bien que vous n'avez plus envie d'en émerger, d'en érupter.

Vous enchaînez les pages, d'un bon rythme, appréciant le subtil dosage, les subtils dosages : les différents fils narratifs, la compréhension et l'incompréhension, la narration et l'action, tout. Ce n'est jamais trop complexe, ce n'est jamais trop simpliste. Vous tournez les pages, encore et encore. Jusqu'à la dernière - presque la dernière, puisque vous n'aurez pas usage des annexes, dispensables, preuve de la bonne construction du récit.

Vous avez donc terminé, déjà. Vous vous rendez compte que vous n'avez pas nécessairement eu de "wahou" et autres "oh !" à la lecture. Mais - rouille ! - qu'importe car le plaisir n'en a pas été moins fort. Vous avez vraiment apprécié le chemin parcouru. Vous le terminez grandement satisfait, avec nulle trace d'une possible frustration due à son statut de livre premier mais avec une grande envie de poursuivre l'aventure au plus vite. Vous espérez que d'autres auront à leur tour envie d'emprunter cette route et seront eux-aussi éblouis par la maitrise incroyable de l'autrice.

D'autres avis : Lhisbei, Apophis, L'ours inculte, Lianne, Le chien critique, Cédric, Yogo, Lorhkan, Lutin82, Samuel Ziterman, Célindanaé, Lune, Xapur, Les Chroniques du Chroniqueur, Gromovar, Shaya, Nomic, ...

Première escale, ouverte au débat, pour le Summer Star Wars - Solo

dimanche 14 juillet 2019

Stefan Wul - Niourk

Niourk, Stefan Wul, 1957, 258 pages

Une Terre future, post-apocalyptique, où les océans se sont asséchés. Une tribu revenue à un stade primitif vit dans l'ancienne mer des Caraïbes, entre Cuba, Haïti et la Jamaïque, en chassant des chiens sauvages. En son sein demeure un enfant noir, maltraité par tous jusqu'à être condamné à mort par le Vieux, sorcier et chef du clan. Sa survie ne pourra venir que de la fuite et de l'exploration du "monde des Dieux".

Niourk est un roman régulièrement édité dans des collections jeunesse. Cela s'explique aisément par le style d'écriture, fait de phrases et de chapitres courts dans une narration très simple, sans fioriture. Mais cela ne doit pas pour autant vous tromper : Niourk n'est pas une gentille petite histoire de bisounours. Au contraire, c'est un récit dur et violent, heureusement quelque peu désamorcé par une narration qui présente tout cela "en toute normalité".

Niourk est un roman simple qui va à l'essentiel et ne s'embarrasse pas de trop d'explications - voire pas du tout dans la dernière partie où, sans transition, tout part un peu en cacahuètes. C'est tout autant une qualité qu'un défaut, selon ce qu'on en attend. Il manquera certainement de contexte et de développement pour le lecteur aguerri et pour être réellement marquant. Mais - et c'est là que l'aspect jeunesse est flagrant - si on y recherche juste une courte aventure étonnante, Niourk saura se montrer satisfaisant.

mardi 9 juillet 2019

John Scalzi - Les Enfermés

Les Enfermés, John Scalzi, 2014, 379 pages
« Rien ne tient debout dans cette affaire. Nous avons un meurtre qui n'en est sans doute pas un, sur un homme encore non identifié, qui a rencontré un intégrateur peut-être déjà intégré, qui prétend ne pas se rappeler des évènements dont il aurait dû garder le souvenir. Quel méli-mélo ! »
Un nouveau virus est apparu sur Terre. En plus de tuer une bonne partie de ses porteurs, il "enferme" certains survivants à l'intérieur de leurs corps, les laissant conscients mais sans plus aucun contrôle. Heureusement, des implants cérébraux furent créés pour permettre à ces "enfermés" - les "hadens" - d'intégrer des androïdes, voire même certains autres humains rescapés sains du virus - les "intégrateurs". Chris Shane est "haden" et se retrouve, pour son premier jour en tant qu'agent du FBI, avec un vrai méli-mélo sur les bras.

Les Enfermés est un polar SF où l'aspect science-fictif est surtout là pour apporter de nouvelles ficelles et possibilités à l'aspect polar. Il y a indéniablement une intéressante métaphore - quoique, est-ce encore une métaphore quand c'est aussi visible ? - avec les "hadens", étayée de quelques intelligentes réflexions, mais cela reste globalement en arrière-plan - et ce n'est pas nécessairement une mauvaise chose.

C'est donc l'aspect polar qui tient le devant de la scène. Un polar efficace, facile à lire et très simple dans son intrigue. Ce n'est pas le meilleur polar de l'Histoire, c'est certain, mais ça fait le boulot et le mélange polar/SF apporte une fraicheur agréable. N'est-ce pas déjà suffisant ?

À noter que le roman tient en fait en 300 pages, la suite étant consacré à une nouvelle (?) intitulée "Une histoire orale du syndrome Haden" dont l'intérêt est à mon sens proche du néant.

D'autre avis : Lorhkan, Apophis, Lune, Lianne, Lutin82, Anudar, Yogo, Le chien critique ...

jeudi 4 juillet 2019

Justine Niogret - Mordred

Mordred, Justine Niogret, 2013, 166 pages

Alité, agonisant, Mordred se remémore comment il en est arrivé là. Surprise : Mordred conte l'histoire de Mordred, passé, présent et futur, de son point de vue. C'est assez intéressant, mais ça l'est surement encore plus si l'on a des connaissances préalables sur le personnage. J'ai ainsi préféré le livre a posteriori, une fois renseigné sur ce fameux Mordred.

Avant cela, le parcours fut parfois laborieux, à cause du manque de repères, ne sachant guère où menait le chemin ni ce qu'il cherchait à raconter. L'introduction était pourtant forte et il y a une indéniable présence dans ces pages, comme bien souvent avec Justine Niogret. Heureusement la dernière partie fut la meilleure, certainement car plus active.

Mordred fait partie de ces rares et étranges livres où la lecture ne fut pas forcément très agréable sur le moment - même si d'une indéniable qualité - mais où le sentiment et le souvenir a posteriori restent globalement positifs.
« - Sans Ysengrin, pas de Renart. Il faut une victime à toute histoire. Il faut l'argent d'un miroir éteint pour que certains parviennent à voir leur visage. Une chandelle sans nom pour que les scarabées dansent. À tout héros, il faut son reflet. Un perdant, pour que d'autres gagnent. Voilà ce que je vois, Mordred, voilà ce que je vois, et mon coeur en saigne plus durement que le loup blessé sur sa glace. »
D'autres avis : Xapur, Lhisbei, Vert, Lune, Julien, Lorhkan, Gromovar, ...