jeudi 27 février 2014

Paul J. McAuley - L'Homme

L'Homme, Paul J. McAuley, 2012, 26 pages.
« L’homme lui vint une nuit, en pleine tempête de flux. »
L'Homme est une nouvelle de Paul J. McAuley publiée dans le Bifrost 71. Elle a remporté le prix des lecteurs Bifrost 2013 de la meilleure nouvelle étrangère. À la suite de quoi Le Bélial' l'a très gentiment proposée gratuitement pour les hérétiques qui ne lisent pas leur Bifrost trimestriel (tel l'infâme qui écrit ces lignes).

Ziyi, une veille dame vivant seule avec ses deux huskies, voit un jour un homme, nu et muet, frapper à sa porte. Qui est-il ? D'où vient-il ? Ce sont les questions que Ziyi se posent. À cette liste, le lecteur rajoutera : Où sommes-nous ? Quand sommes-nous ? Quel est ce monde ?

Le début du récit fait un peu peur, avec pas mal de néologismes et une situation mystérieuse. On se sent un peu perdu. De la même façon que si un inconnu venait frapper à notre porte ? Bien vite néanmoins, le texte se simplifie, on prend nos marques et on apprécie l'histoire. De la même manière que Ziyi et l'homme s'apprivoise et que leur relation s'installe et se développe.

Il y a un petit goût de "vite fait, bien fait" à la lecture de cette nouvelle. L'histoire est simple et va à l'essentiel. Je me suis fait la réflexion qu'elle aurait peut-être mérité quelques pages supplémentaires pour prendre son temps et se détailler. Notamment sur son background, ce futur dont nous n'avons qu'un aperçu, qui donne envie d'en savoir plus et d'obtenir quelques réponses. Et en même temps, pourquoi ? L'Homme n'est pas vraiment une histoire de science-fiction. C'est l'histoire d'une rencontre entre deux êtres, d'une relation qui se crée. Et en peu de mots, tout comme il y a peu de mots entre les deux personnages, Paul J. McAuley parvient à raconter une touchante histoire.

lundi 24 février 2014

Terry Pratchett - La Huitième couleur

La Huitième couleur, Terry Pratchett, Tome 1/35 des Annales du Disque-Monde, 1983, 286 pages.
« Il est gênant de se savoir dieu d’un monde qui existe seulement parce que toute courbe d’improbabilité doit bien s’arrêter quelque part. »
Dans la catégorie "je n'ai honte de rien, même pas d'avouer n'avoir jamais lu ce livre hyper-connu", voici Les Annales du Disque-Monde. Cela fait bien longtemps que je pense à m'y mettre sans jamais oser franchir le pas, principalement par peur d'être déçu. Car sur le papier, cette série a tout pour me plaire. Les faits confirmeront-ils ce potentiel ?

Oui et non. Oui parce que c'est éminemment sympathique à lire. Comme prévu, c'est de la fantasy qui ne se prend pas au sérieux et se moque gentiment de ses clichés. Les aventures s'enchaînent et on voyage tranquillement à travers le Disque-Monde. C'est bien sans être totalement transcendant. L'humour est là en filigrane. Mais les meilleurs moments sont assurément les fulgurances de Pratchett, hilarantes mais qu'on ne peut que trouver trop rares.

Je dois avouer que le "non" est en grande partie du chipotage. La huitième couleur est un bon livre, voire très bon. Mais il aurait fallu au minimum quelque chose d'exceptionnel pour que je sorte complètement rassasié et satisfait. Là c'est "simplement" bien et sympathique. Je n'ai pas d'inquiétude pour autant, il me reste un paquet de tomes à lire et autant d'occasions d'être entièrement conquis.
« Certains pirates s'assuraient l'immortalité par de grands actes de cruauté ou de bravoure. D'autres en amassant de grandes richesses. Mais le capitaine avait depuis longtemps décidé qu'il préférait, en fin de compte, s'assurer l'immortalité en évitant de mourir. »

vendredi 21 février 2014

Eduardo Mendoza - Le Dernier voyage d'Horatio II

Le Dernier voyage d'Horatio II, Eduardo Mendoza, 2002, 225 pages.

Après avoir découvert Eduardo Mendoza avec Sans nouvelles de Gurb, un court et amusant livre, j'ai eu envie de prolonger l'expérience. Ce fut le cas avec Le Dernier voyage d'Horatio II, découvert une nouvelle fois grâce à AcrO.

Horatio II est commandant d'un vaisseau spatial. Ses passagers ? Des rebuts de la Terre, entre Délinquants, Femmes Dévoyées, Vieillards Imprévoyants et membres d'équipages un peu particuliers. Sa destination ? Aucune idée. Ce roman est son journal de bord, entre vie à bord du vaisseau et escales dans des stations spatiales qui ne sont pas forcément ce qu'elles semblent être.

Sur fond d'une sympathique et quelque peu mystérieuse aventure spatiale, Eduardo Mendoza livre un roman très drôle, que cela soit par ses situations rocambolesques ou par une géniale utilisation du comique de répétition (deux degrés au dessus de "drôle" et un degré en dessous de "hilarant"). Certains pourront même y voir un côté satirique de notre futur et de notre présent, de l'humain en somme, et en riront noir ou jaune, au choix.

Comparé à Sans nouvelles de Gurb, Le Dernier voyage d'Horatio II est un roman plus abouti et surtout plus consistant. Cela tient à des scènes plus longues et à une véritable histoire qui se développe. Et puis il a une forme qui ressemble plus à un roman (et non une suite de petites scénettes). En tout cas, c'est une histoire de science-fiction simple et drôle, très agréable à lire. Ne boudons pas notre plaisir.

mardi 18 février 2014

William Goldman - Princess Bride

Princess Bride, William Goldman, 1973, 329 pages.
« Bonjour, mon nom est Inigo Montoya, tu as tué mon père, prépare toi à mourir ! »
J'ai mis un certain temps avant de comprendre ce qu'était Princess Bride. Je voyais des gens l'encenser, en ressortir une citation étrange et je me disais bêtement "Mais... ça a l'air niais, non ?", bien aidé en cela par le sous-titre "Le Grand Classique du Conte de Grand Amour et de Grande Aventure de S. Morgenstern". Et un jour ce fut la révélation (même si les majuscules m'avaient un peu mis la puce à l'oreille...) : c'est un roman semi-parodique.

William Goldman nous explique tout dans son introduction. Princess Bride est un livre écrit par S. Morgenstern, un classique de la littérature florine, que Goldman a décidé d'abréger pour coller à la version que son père lui lisait. Il faut dire que la version originale est parfois quelque peu... digressive (et de la mauvaise digression).

Ou bien tout ceci est seulement le moyen de créer un cadre pour le livre et de permettre à Goldman quelques apartés. C'est peut-être plus cette version là. En tout cas, c'est extrêmement drôle et totalement fou. Au moins pour la première partie, qui reprend tous les clichés des contes de fées pour mieux s'en moquer (sans méchanceté).

Mais Princess Bride n'est finalement qu'à moitié parodique. Car en créant malicieusement une situation typique de conte de fées, il en devient finalement un à part entière. On se surprend à être totalement pris par l'histoire et à avoir envie que le héros réussisse sa quête. On regrettera seulement un manque de quelques petites touches d'humour pour relancer et balancer un peu plus le récit. 

À part ça, c'est un roman charmant, un bel hommage parodique au genre et un incroyable trouble de la personnalité chez William Goldman. Mais c'est aussi :
« - De l’escrime. Du combat. De la torture. Du poison. Le grand amour. La vengeance. Des géants. Des chasseurs. Des méchants. Des hommes bons. Des dames plus belles que tout. Des serpents. Des araignées. Des bêtes de toutes natures et de toutes formes. Des lâches. Des hommes forts. Des poursuites. Des évasions. Des mensonges. Des vérités. La passion. Des miracles. »

Troisième participation au Winter Mythic Fiction

samedi 15 février 2014

Patrick Rothfuss - La Peur du sage, Première partie

La Peur du sage, Première partie, Patrick Rothfuss, Tome 2a/3 de Chronique du tueur de roi, 2011, 574 pages.

Je n'ai pas pu résister très longtemps. J'ai essayé, je vous assure, sachant bien qu'à dévorer trop rapidement cette Chronique du tueur de roi, je devrais ensuite attendre longuement et lentement le dernier tome. L'argument aurait peut-être pu porter, si ce n'est que Bragelonne a décidé de publier le tome 2, The Wise Man's Fear, en deux livres dans sa version française. Ma conscience est tranquille, je peux lire cette Première partie et reporter mon débat interne pour la lecture de la Seconde partie !

J'ai hésité avant d'écrire sur ce livre, étant donné qu'il n'est au final qu'une première moitié. Mais, par peur d'oublier des éléments de celui-ci quand je lirai la suite et par envie de crier ma joie, je n'ai, ici non plus, pas pu résister. Tout comme je ne résiste pas à redire que, tout comme la première, la couverture de Marc Simonetti est sublime.

Je n'avais pas quitté Kvothe depuis très longtemps et pourtant ce fut un réel plaisir de le retrouver. Ce personnage est vraiment très sympathique et donner ce sentiment en étant encore un étudiant laisse espérer de grandes choses. Car oui, dans la continuité directe du Nom du vent, notre héros continue son apprentissage à l'Université. L'histoire suit son cours presque "normalement".
Toute cette première partie est bien, voire très bien. Les meilleurs passages restent pour moi ceux qui évoquent la musique. Particulièrement les scènes à l'Eolian, qui sont vraiment touchantes et me donnent l'impression d'entendre les accords du luth de Kvothe.

Et puis le moment tant attendu est arrivé. Après 300-400 pages. Le départ vers d'autres aventures, vers la grande histoire, celle qui fera l'Histoire. Une nouvelle fois, cela offre un succulent commentaire de Kvothe et cette idée que Rothfuss maîtrise parfaitement ce qu'il fait.
« De toute façon, je me suis attardé trop longtemps sur mon séjour à l’Université. Il vaut mieux consacrer le temps qu’il nous reste à d’autres sujets, à des choses dont personne n’a jamais entendu parler. »
La dernière partie du récit est excellente. L'attrait de la nouveauté, à n'en pas douter. Nouveau lieu, nouveaux personnages, nouvelle intrigue. L'occasion pour Kvothe d'utiliser ses capacités dans le "vrai" monde. Et l'idée que désormais toutes les possibilités s'offrent à lui. L'histoire ne fait que commencer.

mercredi 12 février 2014

Pierre Pevel - Les Lames du Cardinal, l'intégrale de la trilogie

Les Lames du Cardinal, l'intégrale de la trilogie, Pierre Pevel, 2007-2010, 765 pages.

Le cycle de Wielstadt m'a laissé un souvenir impérissable, notamment pour son personnage du chevalier Kantz (un de mes préférés tous livres compris). Il était grand temps que je m'attaque à l'autre grande trilogie de Pierre Pevel : Les Lames du Cardinal. Pas de demi-mesure : les trois tomes (Les Lames du Cardinal, L'Alchimiste des Ombres, Le Dragon des Arcanes) à la suite grâce à cette intégrale !

La découverte de ce Paris, 1633, s'ouvre par une surprise (déjà annoncée dans le titre, mais une surprise tout de même) : c'est une troupe au service du Cardinal de Richelieu que nous allons suivre. Contre-pied aux habituelles aventures des mousquetaires où Richelieu est le plus souvent un antagoniste, Pierre Pevel a changé ma vision légèrement manichéenne de la situation.

Mais avant de découvrir "Les Lames" en tant que groupe, c'est individuellement que l'on rencontre un beau petit nombre de personnages tous plus extraordinaires, sympathiques et arrogants les uns que les autres. L'écriture est vive et rythmée, un changement de point de vue toutes les 2-3 pages en moyenne, et le restera tout au long de la trilogie.

L'histoire est exactement celle que l'on attend, un roman de cape et d'épée avec son lot de combats de rapières toujours très visuels. Le petit plus de Pierre Pevel (outre la canicule), ce sont les dragons. Ils sont là, un peu partout, sous diverses formes (résidus d'âmes, sang-mêlés, humanisés,...), formant une société qui n'est pas sans rappeler la franc-maçonnerie. Évidemment, ils vont être les adversaires des Lames et cela va être explosif. Les dragons sont aussi au coeur de mon seul bémol : un petit problème de crédibilité de temps à autre, leur puissance n'étant jamais très claire, je me suis parfois demandé pourquoi ils ne dominaient pas le monde. Mais le problème n'est pas gênant pour vivre pleinement les aventures et apprécier la lutte.

La trilogie est maîtrisée. Chaque tome a une histoire propre mais l'ensemble forme un véritable tout tant les éléments précédemment lus ont leur importance dans la suite. Certains regretteront peut-être le manque d'informations sur le passé des personnages : on sait juste exactement le minimum qu'il nous faut connaitre. Cela ne m'a pas gêné plus que ça, c'est une concession d'un élément non essentiel qui permet de se concentre sur le plus important : l'aventure et le présent.

Les Lames du Cardinal sont donc une bonne trilogie, très sympathique pour quiconque recherche une lecture d'actions/aventures agréable et facile à lire. On retrouve tout ce qu'on peut attendre d'un roman de cape et d'épée dans un cadre historique très bien utilisé. On se sent véritablement plongé dans Paris au XVIIème siècle, bien aidé en cela par quelques paragraphes "historiques" et de multiples références.

Je dédie le silence qui suit ce billet à Almadès, fière Lame du Cardinal, il le mérite.

Dernière lecture pour le Challenge Francofou

lundi 10 février 2014

Christian Chavassieux - Mausolées

Mausolées, Christian Chavassieux, 2013, 327 pages.

C'est en lisant un billet de Julien, le Naufragé Volontaire, que j'ai découvert Mausolées. Intrigué, il s'est avéré qu'il n'aura pas fallu longtemps pour qu'il se retrouve entre mes mains.

Pour être honnête, la couverture d'Akalikoushin a eu une grande influence sur mon envie de lire ce livre. Notamment car elle m'a tout de suite fait penser à du Enki Bilal. Et Enki Bilal, c'est bien. Je ne saurais totalement affirmé que j'ai été influencé par cette première impression - très surement - mais mon entrée dans ce roman m'a aussi fait penser à une entrée dans un univers à la Enki Bilal. Comprenne qui pourra.

Léo Kargo arrive à Sargonne et découvre la ville, le lecteur dans ses bagages. Il est là pour prendre son poste au service de Pavel Khan, à la fois bibliothécaire et biographe. Une bibliothèque ? Une rareté excentrique dans ce monde. Ce monde ? Le nôtre, dans un futur proche, après les "Conflits", où certaines connaissances se sont perdues et où les nouvelles technologies ne sont là qu'en sourdine (dans un genre qui m'a fait penser à La Maison des derviches).

Mausolées est un livre que l'on apprend à apprivoiser. La situation du "monde" ne nous est pas présentée avant bien longtemps et l'on est obligé de la découvrir "sur le tas", pas bribes et déductions. Tout comme Kargo qui va découvrir son lieu de travail, la demeure de Khan, et chercher à l'appréhender et découvrir les secrets et enjeux qui emplissent l'endroit. Tout comme ce jeu de stratégie inventé par Khan, le "Palais des Fous", dont les pions ressemblent étrangement aux habitants de la maison.

Mausolées est un livre sombre, mais pas désespérant, et intelligent. Bien que l'action monte en intensité au fil des pages, c'est son ambiance qui reste le plus marquant. Ainsi que ses multiples axes de réflexion, notamment sur le futur de notre société ou sur le rôle de la littérature. Intelligent aussi dans ses révélations, bien dosées et ne cherchant pas à garder de mystère là où il n'y en a plus (typiquement, au moment où vous vous dites "ah, ça y est, j'ai compris", vous avez la confirmation quelques pages plus tard et de nouvelles questions à résoudre).

À l'exception peut-être de son titre qui aiguille dans une fausse direction, Mausolées est un livre complet, qui allie ambiances, mystères, actions et réflexions. Le plus remarquable est peut-être le fait que Christian Chavassieux parvient à garder de la simplicité dans l'écriture, ne tire pas inutilement à la ligne et en fait un livre toujours agréable à lire. Une réussite complète.

Une lecture de plus pour le Challenge Francofou

jeudi 6 février 2014

Ian McDonald - La Maison des derviches

La Maison des derviches, Ian McDonald, 2012, 523 pages.

La Maison des derviches a remporté le Prix Planète SF 2013. Je ne fais habituellement pas vraiment attention aux prix littéraires, mais celui-ci a un caractère spécial puisqu'il est décerné par des blogueurs (un gage de qualité, n'est-ce pas ?). J'avais aussi envie de découvrir un livre qui a été préféré à 22/11/63 (ok, c'est facilement envisageable), Le Calice du Dragon (pas encore lu, mais Griaule est forcément bon) et Anamnèse de Lady Star (une lecture atypique et marquante).

C'est en suivant un vol de cigognes que l'on se pose à Istanbul, cadre du récit. Nous sommes en 2027 et la technologie a poursuivi son avancée. Ici ou là, on aperçoit quelques modifications, quelques nouvelles habitudes. Mais l'aspect "science-fiction" reste léger, par petites touches, avec cette impression que ce monde pourrait réellement et facilement être celui de demain. D'un demain proche.

La Maison des derviches est un livre politique, géopolitique. Ce qui n'est qu'une autre façon de dire qu'il est humain et qu'il nous concerne profondément. Iam McDonald nous présente un futur probable, où technologie, politique et religion se mêlent. Comment ne pas y voir un reflet de notre présent et les critiques afférentes ?

La Maison des derviches est une lecture exigeante. Certains passages sont un peu longs, la trame générale prend son temps pour se mettre en place. Heureusement, l'alternance des points de vue permet de relancer assez régulièrement l'intérêt. Tous les personnages sont globalement intéressants et ont leur place, à l'exception peut-être de l'histoire d'Ayse dont je ne sais quelle morale il faut tirer.

Il y a une scène qui vaudrait quasiment à elle-seule la lecture de ce roman : l'embouteillage sur le pont. Marquante, choquante, cette scène résume presque entièrement ce livre et son message.

La Maison des derviches est un livre qui monte en puissance, photographie d'une ville au carrefour du monde et panorama général de notre société actuelle/future. Tout n'y est pas parfait, mais c'est un livre intelligent qui trouvera un écho en chacun.

L'avis de Gromovar, Efelle, Julien, Lhisbei, Tigger Lilly

lundi 3 février 2014

David Calvo - Elliot du Néant

Elliot du Néant, David Calvo, 2012, 314 pages.

J'ai assez longuement hésité avant de replonger dans un livre de David Calvo. Une certaine appréhension. Nid de coucou ne fut pas toujours une lecture facile mais m'a laissé une grande impression. Mais comment cela rendra-t-il sous la forme d'un roman plus habituel ? La surprise et la folie seront-elles aussi bonnes en sachant à quoi s'attendre ?

Un argument de poids m'a fait me lancer dans Elliot du Néant : l'histoire se passe en Islande. Et ce qui se rapporte à l'Islande ne peut pas être mal, n'est-ce pas ? Avouons tout de même que ce livre ne vous offrira pas une grande visite du pays, même si le cadre reste un élément important (il inspire au moins pour moi une certaine "possibilité" ou "crédibilité").

Qu'est-ce qu'Elliot du Néant ? Je ne suis pas vraiment capable de vous le dire. Elliot, un vieux concierge d'école, est le point de départ. Ou plutôt sa disparition est le point de départ de la recherche que vont effectuer les professeurs, et plus particulièrement Bracken, le héros. Quant au Néant... Il est présent, il est là, pièce centrale de l'univers, insaisissable et indéfinissable, à la fois concret et irréel. Comment expliquer le Néant ? Les personnages s'y essayent pendant une vingtaine de pages et c'est surement le passage le plus compliqué à lire et peut-être le moins intéressant. Peu importe. Tout n'a pas besoin de s'expliquer formellement. On peut vivre les choses sans cela. Parfois même mieux.

Alors, qu'est-ce qu'Elliot du Néant ? C'est du David Calvo. C'est particulier et cela ne plaira pas à tout le monde. Un mélange des genres, une folie créatrice. La rencontre d'influences les plus diverses, avec notamment un poème de Mallarmé, un clip de Nik Kershaw et un peu de mythologie nordique.

Elliot du Néant n'est pas toujours une histoire facile à suivre. Mais plus que l'histoire, qui n'est pas exceptionnelle en elle-même, c'est une ambiance qui est créée, une plongée dans un univers à la fois irréaliste et concevable. Personnellement, et je me trompe peut-être entièrement, j'y vois une métaphore du pouvoir créateur de l'art (même si dans ce cas je n'ai pas compris la morale finale). Vous y verrez peut-être tout à fait autre chose, ou peut-être rien. Mais si vous avez envie de prendre un risque, lisez Elliot du Néant. Ne serait-ce que pour rencontrer deux tortues vraiment géniales.

Une lecture de plus pour le Challenge Francofou