mardi 26 février 2019

Tout feu tout flamme #2.2 - Rois du monde, rois des moutons ?

"Tout feu tout flamme", ou "Nos éditeurs ont du talent", c'est une petite rubrique de billets d'humeur sur la sphère SFFF. À prendre pour ce que ça vaut, c'est à dire pas grand chose, mais surtout avec plus d'amusement que d'énervement. Sauf si on parle de Pygmalion bien sûr. Ou peut-être de crowdfunding.
Avec l'aimable, et involontaire, participation des membres du Dernier Discord Avant la Fin du Monde, précieuse source d'informations et de débats.
Avis aux associations : aucun éditeur ou auteur n'a été maltraité pour les besoins de ces articles. En tout cas pas volontairement.
« Car au fond, de quoi se plaint-on ?
D'être pris pour des cons ! »
(Sinsemilia)
C'est peut-être le sentiment que vous aurez eu en lisant l'historique éditorial de la trilogie/diptyque/pentalogie/série/saga/chanson/cycle/épopée "Rois du monde" - faites votre choix, un intrus peut s'être glissé dans la liste - de Jean-Philippe Jaworski présenté ici. C'est en tout cas mon sentiment. Mais peut-être suis-je le seul ? Pour vérifier cela, je vous propose un petit test digne des plus grands magazines intellectuels trouvables chez vos marchands de journaux. Sortez un papier et un crayon et notez bien vos réponses.

Grand test : quel éditeur êtes-vous ?


Pour l'ensemble des questions, vous êtes dans la peau d'un éditeur de SFFF, présent depuis de nombreuses années dans le milieu, éditant l'un des plus grands auteurs francophones du genre.

       1. Votre auteur vous a rendu le manuscrit du premier tome de sa nouvelle trilogie. Les tomes suivants ne sont pas encore écrits et cet auteur est connu pour ne pas être le plus rapide du monde. Vous... :

A. ...publiez le premier tome et n'annoncez rien de précis concernant la suite.
B. ...publiez le premier tome en annonçant la sortie du tome 2 l'année prochaine et du tome 3 l'année suivante.

       2. Votre auteur a du retard sur l'écriture de son tome 2. Ce dernier n'est pas terminé et sa taille semble être de plus en plus importante. Vous... :

A. ...décidez de communiquer sur ce retard auprès du public et d'attendre que le tome soit terminé avant de prendre une décision concernant sa publication.
B. ...décidez de publier dès à présent ce qui est disponible et annoncez que la fin du tome sera publiée dès l'année prochaine.

     3. Les deux dernières dates de publication que vous aviez annoncées n'ont pas pu être respectées. Vous n'avez rien de concret sous la main concernant la publication suivante. Vous... :

A. ...décidez de ne plus vous mouiller et communiquerez une date quand vous aurez plus d'informations.
B. ...décidez d'annoncer dès à présent une date de publication précise pour un futur proche.

      4. Diverses raisons ont modifié l'organisation de la trilogie de votre auteur phare. Le troisième tome ne paraitra finalement pas dans un futur proche et la série pourra être considérée comme terminée à l'issue des deux premiers tomes. Vous... :

A. ...communiquez clairement sur ce fait en présentant les tenants et les aboutissants de ce changement.
B. ...présentez en toute normalité le deuxième tome comme la fin de la série et n'évoquez absolument pas la question du troisième tome.

Résultats :
- Vous avez répondu "A" à toutes les questions : ne seriez-vous pas un peu trop naïf ? N'oubliez pas d'aiguiser vos crocs si vous voulez survivre dans ce métier.
- Vous avez répondu "B" à 1, 2 ou 3 questions : vous avez quelques bons réflexes par moment mais vous devez encore apprendre votre métier.
- Vous avez répondu "B" à toutes les questions : félicitations, vous êtes un éditeur modèle, notre maison d'édition, "Les Poissons Phosphorescents", serait ravie de vous compter parmi nous !

...

 

Des incidents et des contretemps peuvent survenir. Mais :
- Comment peut-on sans cesse annoncer des dates erronées ? D'une manière plus générale, comment peut-on communiquer aussi mal ? Au point que l'on apprenne les modifications du troisième tome seulement grâce à l'acharnement de certaines personnes à poser des questions suite à des bribes d'informations trouvées dans une interview sur un blog ?
- L'une des raisons du découpage du tome 2 - outre le format choisi sur lequel je ne reviendrai pas (quoique : peut-être fallait-il y penser avant ?) - serait de ne pas faire trop attendre le lecteur. De une, il attendrait moins si on ne lui donnait pas des dates erronées. De deux, on parle de Jean-Philippe Jaworski. Il me semble que le public sera au rendez-vous même s'il faut attendre un peu plus longtemps, non ?
- Vu le nouveau découpage du tome 2, un découpage artificiel, il a été décidé... de ne rien faire. Pas de résumé au début de chaque volume (et qu'on ne me dise pas qu'ils sont faits pour être lus à la suite, sinon pourquoi les publier à des moments différents ?), aucune facilitation dans la dénomination des volumes (au contraire de l'édition proposée par FolioSF qui comporte, elle, des sous-titres), ...

Ça fait beaucoup, non ? On a beau vouloir être gentil et compréhensif, difficile de ne pas se demander si certains ne veulent pas surtout que le lecteur prenne le plus souvent possible sa casquette d'acheteur. Et qu'on ne me dise pas que c'est un mal pour un bien, qu'il faut bien des fonds pour développer les autres titres, quand on voit les crowdfundings organisés par les Moutons en parallèle.

Chacun en tirera ses conclusions, entre malhonnêteté et incompétence (appelons un mouton un mouton un chat un chat). Il faut évidemment relativiser l'ampleur du "problème", mais cela reste préoccupant, surtout dans un contexte plus général de multiplication des séries qui s'embourbent et dont on n'est jamais certain de voir la fin, si ce n'est 20 ans plus tard après 42 changements de plan, retards et autres contretemps. Que personne ne soit ensuite étonné de la frilosité toujours plus importante des lecteurs à se lancer dans des séries, surtout chez des éditeurs qui ne paraissent pas dignes de confiance. Les cercles vicieux, tout ça tout ça...

Quoiqu'il en soit, et heureusement pour certains, l'immense majorité des lecteurs n'aura jamais connaissance d'un dixième de tout ça. Mais quand même... N'est-ce pas un peu ironique d'avoir l'impression de se faire tondre comme des moutons ?

Pour finir sur une note plus légère, tout de même, parce que Jaworski est grand, qu'il faut continuer à le lire et que la vie est belle, un dernier petit jeu : saurez-vous trouver la différence entre ces deux éditions de Même pas mort ?
Indice : à gauche, la première édition.
Merci à Vert et Elhyandra pour les photos.

lundi 25 février 2019

Tout feu tout flamme #2 - La "trilogie" Rois du monde de J.-P. Jaworski

"Tout feu tout flamme", ou "Nos éditeurs ont du talent", c'est une petite rubrique de billets d'humeur sur la sphère SFFF. À prendre pour ce que ça vaut, c'est à dire pas grand chose, mais surtout avec plus d'amusement que d'énervement. Sauf si on parle de Pygmalion bien sûr. Ou peut-être de crowdfunding.
Avec l'aimable, et involontaire, participation des membres du Dernier Discord Avant la Fin du Monde, précieuse source d'informations et de débats.
Avis aux associations : aucun éditeur ou auteur n'a été maltraité pour les besoins de ces articles. En tout cas pas volontairement.

Jaworski est grand. Et sa trilogie "Rois du monde" l'est elle aussi de plus en plus. Malheureusement pas nécessairement dans le bon sens, les sorties s'enchaînant en laissant quelque peu dubitatifs les lecteurs attentifs. Pourquoi ? Notamment car le quatrième tome de la trilogie, qui n'est toujours pas le dernier, vient de paraître. Étonnant, non ? Eh bien, c'est en fait pire que ça. D'où cet article, pour revenir sur l'historique de la série et tenter de clarifier les choses.

2013

 

Tout commence en 2013. Sur le programme de l'année, les Moutons électriques annoncent (notamment ici ou ) la sortie de Même pas mort, premier tome de la nouvelle trilogie de Jean-Philippe Jaworski, "Rois du monde". Et le public de se réjouir - à raison, parce que c'était vraiment très bien.

Ce même public peut même doublement se réjouir car tout semble indiquer que cette trilogie est bien réfléchie et devrait s'enchaîner sans souci. Tenez, regardez, c'est écrit à l'intérieur même de Même pas mort :

Même pas mort, première édition.
Et puis tiens, lisez donc cet extrait d'une interview de l'auteur à Elbakin, toujours en 2013, sur l'importance du chiffre 3 :
« Initialement, Rois du Monde devait être un roman composé de trois parties. Cette structure tripartite m'était imposée par l'importance du chiffre trois dans la culture celtique : trois points cardinaux, trinités païennes ou dieux trifaces, siècles de trente ans, fêtes de trois nuits (comme Samonios / Samain), trimarkisia (trio guerrier), triades mnémotechniques… Quand le projet a pris de l'ampleur, chaque partie est devenue un volume, chaque chapitre est devenu une partie. Mon but est d'avoir un roman qui, non seulement dans son contenu, mais aussi dans sa forme, soit un hommage aux structures celtiques. »
Donc c'est plutôt clair, voilà ce qu'on aura le plaisir de lire :
La trilogie "Rois du monde" en 2013.















2015

 

Avançons en 2015 - et omettons la non-parution de la deuxième branche en 2014. En début d'année, dans l'interview rituelle d'Elbakin, la bonne nouvelle est là : « Faire encore et toujours mieux avec Jean-Philippe Jaworski, qui sort en mai le deuxième tome de sa trilogie "Rois du monde" .

La première surprise arrive en avril, sur le blog des Moutons : « Et comme l’auteur avait finalement beaucoup plus à dévoiler qu’il ne l’avait prévu à l’origine, ce deuxième tome (aussi long que le premier) sera suivi dans un an de sa suite directe : Chasse royale sera en deux parties, dont ce volume est la première. Ou pour être plus clair, cette « trilogie » sera finalement au moins en quatre volumes... »

Une séparation en deux volumes donc pour Chasse Royale, confirmée par l'auteur dans une interview sur Elbakin où l'on apprend que les raisons sont littéraires, mais pas que : « Un gros volume dans la couverture rigide adoptée pour la première branche est très cher à produire et majorait les risques financiers ; par ailleurs, André-François Ruaud ne voulait pas une trop longue attente du public entre les deux romans. »

Bon, pourquoi pas, ça peut arriver. En plus c'était toujours bien, alors on savourera quatre tomes et tout le monde sera content. Non ?
La trilogie "Rois du monde" en 2015, qui n'en est plus une que dans l'esprit.












2017

 

Comme prévu un an plus tard Deux ans plus tard, le tome 2.2 parait donc (et c'est toujours appréciable). La fin de Chasse Royale... ou pas. Car les Moutons ont une surprise pour nous : « Votre auteur préféré, dévoré par sa saga celtique, vous régalera d'un tome supplémentaire narrant l’avènement du chef de guerre. Et cela veut dire que "Chasse Royale" se découpera finalement en trois volumes. Le troisième étant d'ores et déjà prévu pour janvier 2018. »

Jean-Philippe Jaworski livre des précisions sur Elbakin : « Publier en un seul tome les parties II et III dans la belle reliure de l’édition des premiers volumes était trop difficile. Du reste, la coupure ne pose aucun problème. Au contraire : quitte à diviser le texte, je préfère une parution en trilogie plutôt qu’en diptyque, car l’organisation du roman est tripartite. Ainsi, le deuxième tome correspond à la deuxième partie et possède son unité et sa couleur propres. »

Un discours appuyé par une autre interview, cette fois sur Just A Word, dont je ne vous livre qu'un court extrait par souci de lisibilité : « Ce qui structure le récit de l’ensemble du cycle en fait, ce sont les petits chapitres qui servent de prologues qui s’appellent La Première Nuit au début de Même pas Mort, La Deuxième Nuit au début de Chasse Royale, et au début de La Grande Jument, le dernier volume du cycle ça s’appellera La Troisième Nuit, qui correspondent aux trois nuits où le narrateur-personnage Bellovèse raconte son histoire ».

Bon, soit. Ça devient un peu répétitif, mais pourquoi pas, la symbolique du chiffre 3 qui revient c'est sympa vu les propos tenus par l'auteur en 2013. Cette fois-ci c'est la bonne, plus que deux livres à sortir et on en a terminé. "Vous verrez, on en rira même dans quelques années !" pourrait-on se dire. Eh bien, rira bien qui rira le dernier...
La trilogie "Rois du monde" en 2017, 3-ception.





2019

 

Janvier 2018 Janvier 2019. Vous en reprendrez bien une tranche ? Tout commence pourtant bien avec l'annonce des Moutons : « Et commençons l’année par ce qui constitue toujours un événement : un nouveau tome de la saga "Rois du monde" de Jean-Philippe Jaworski. Avant-dernier volume de ce grand cycle celtique, Chasse royale III retrouve Bellovèse (...) ». Avant-dernier tome, il ne reste donc plus que La Grande Jument à paraitre, comme prévu depuis 2013 et dont nous avons même déjà la couverture.

C'est au détour d'une interview des Moutons chez Just A Word, pour présenter le programme de l'année - on n'évoquera pas ici le fait que l'éditeur ne répond plus à Elbakin sur cette même thématique, ne nous dispersons pas - que la surprise apparait : « Et fin mai... Chasse royale IV de Jean-Philippe Jaworski, mais oui : la fin de la saga Rois du monde ! ».

Vous n'avez rien compris ? C'est normal, c'est incompréhensible. Après quelques jours de questionnements et d'attente, une clarification arrive enfin, par Nicolas Winter, tenancier de Just A Word : « selon les éclaircissements de l’éditeur : Parution des deux derniers volets de la seconde branche cette année ; Pas de branche 3 dans l’immédiat mais la seconde branche proposera une fin en soi ; Possible branche 3 dans le futur qui fonctionnerait indépendamment des deux premières ; Retour au Vieux Royaume après la fin de la branche 2 avec le roman Le Chevalier aux épines ».

Et notre trilogie initiale, conçue en tant que telle, est donc devenue un diptyque avec un premier tome en un volume et un second tome en quatre volumes.
"Rois du monde" version 2019, un diptyque en 5 volumes.

















Quelque chose à rajouter Monsieur Jaworski ? Extrait d'une interview à ActuSF : « (...) le volume qui paraît en janvier 2019 ne forme en fait que la moitié de la troisième partie du roman. J'aurais préféré différer la publication pour livrer au public l'intégralité de cette troisième partie, mais les contingences éditoriales en ont décidé autrement. »

Il y aurait encore pas mal de choses à dire sur la trilogie "Rois du monde". Mais mon lectorat me contraint à des publications rythmées et mon format m'oblige à ne pas faire plus long. Par souci de lisibilité et de clarté, mais surtout pour rendre un vibrant hommage à l'historique éditorial de cette saga, la suite (et fin) de ce billet sera publiée dans un prochain article à paraître très prochainement. Ce sera l'occasion, en s'appuyant sur les faits présentés plus haut, de répondre notamment à la question que beaucoup auront peut-être à l'esprit : "est-ce qu'on ne nous prendrait pas un peu pour des pigeons ?".

jeudi 21 février 2019

Écran de fumée #11 - The Night of / Bodyguard

Deux séries qui se regardent comme un très long film, avec une histoire complète en une saison. L'une est correcte, l'autre est excellente. Qui est quoi ? Réponse ci-dessous.

The Night Of, Saison 1 (série terminée), 2016, 8 épisodes de 60-90 minutes.

Nasir Khan, étudiant américain d'origine pakistanaise, emprunte un soir le taxi de son père pour aller à une soirée. En chemin, il rencontre une jeune femme, Andrea, et passe finalement la soirée avec elle. Au matin, celle-ci est morte et tout semble désigner Nasir, qui ne se souvient de rien, comme le coupable...

Et voilà 1h30, le premier épisode, résumée - grossièrement certes - en trois phrases. Là est tout le problème de The Night of : c'est trop long. Une série qui prend son temps pour poser les choses n'est pas un problème en soi, mais il y a ici au moins 2 épisodes de trop au vu de toutes les séquences inutiles ou répétitives. La palme revient au dernier épisode où au moins 45 minutes consistent à répéter au tribunal des informations que l'on a déjà eu précédemment, sans aucune nouveauté ni surprise.

C'est dommage car il y a de bonnes idées et de bonnes choses malgré tout, notamment dans la vision des à-côtés d'un tel évènement, montrés très simplement, ou bien, surtout, la performance de Riz Ahmed, interprétant Nasir Khan, dont la transformation au fur et à mesure des épisodes est bluffante. Malheureusement, The Night of ne semble parfois pas trop savoir sur quel pied danser et ne pousse jamais l'excellence nulle part. Caricaturalement, si vous cherchez une série sur une prison vous trouverez mieux ailleurs (en film ou en série) et si vous cherchez une série sur une enquête/procès, Broadchurch est infiniment meilleure.

Attention tout de même, la série reste globalement assez bonne, elle se laisse tout à fait regarder et les fins d'épisodes donnent l'envie de lancer le suivant, ce qui ne peut pas être un mauvais signe. Elle aurait simplement pu être encore meilleure.

Bodyguard, Saison 1, 2018, 6 épisodes de 60 minutes.

David Budd est un sergent de police, vétéran de guerre traumatisé, qui se voit assigner à la garde rapprochée de (l'équivalent de) la ministre de l'intérieur britannique, en pleine campagne pour l'adoption de lois sécuritaires contre la menace terroriste. Évidemment, tout ne va pas se passer sans accroc...

Un bijou. Je ne vois aucune raison de ne pas regarder Bodyguard. C'est un pur thriller prenant du début à la fin et qui est complet - même si apparemment d'autres saisons seraient en réflexion, l'histoire présente est complète à la fin de la saison - en seulement 6 épisodes. Je ne me suis toujours pas remis de cette première scène de 20 minutes qui m'a personnellement scotché à l'écran et même fait manquer quelques battements de coeur.

Et comme il n'y a que 6 épisodes, on ne perd pas de temps. Les choses avancent rapidement - mais sans jamais être rushées - évoluent et ne prennent pas toujours le chemin escompté. L'un des points forts de Bodyguard, c'est de ne pas prendre les spectateurs pour des imbéciles : si l'on sait/devine que cela va se passer, alors on ne va pas poireauter 2 heures avant que cela arrive.

Le tout sur un fond extrêmement - terriblement - moderne et actuel de surveillance et de terrorisme. Bodyguard n'est pour autant pas une série politique dans le sens où la politique n'est pas ici le centre essentiel de la série, elle est utilisée par la série pour la série, tout en évoquant de nombreuses préoccupations en filigrane.

Alors oui, il y a un poil de mindfuck par moment, au point où je ne suis même pas certain que tout colle à la fin - j'ose espérer que si. Qu'importe de toute façon, cela n'enlève en rien à l'excitation du déroulé (ce que j'appelle aussi la loi Lost) et c'est bien là l'essentiel. Bodyguard est une excellente série, prenante et surprenante.

vendredi 15 février 2019

James E. Gunn & Jack Williamson - Le Pont sur les étoiles

Le Pont sur les étoiles, James E. Gunn & Jack Williamson, 1955, 241 pages.

Éron est le centre d'un empire interstellaire. Et pour cause : elle détient le secret des tubes, de véritables ponts entre les étoiles, qui permettent de surpasser la vitesse de la lumière entre Éron et toute planète où un terminal a été déposé. Mais tout empire connaît des adversaires et des hommes de l'ombre cherchant à tirer les ficelles. Horn, lui, ne se pose pas tant de questions et compte simplement faire ce pour quoi il a été payé : tuer le directeur général d'Éron.

Le Pont sur les étoiles est un roman à la fois simple et complexe. Simple car son intrigue reste à taille humaine et se déroule rapidement, le vrai coeur de l'histoire pouvant même être résumé en peu de lignes. Et dans le même temps, le tout a une part de complexité, et ce moins dans les concepts scientifiques que dans les concepts sociaux que le roman cherche à présenter, notamment l'individualisme face à l'effet de groupe ou la marche de l'Histoire face au libre arbitre.

Le bémol de cette complexité, c'est que je ne sais pas si elle intelligente, si elle apporte un véritable plus à l'oeuvre, ou bien si elle n'est que de l’esbroufe, des bons mots qui n'apportent pas grand chose. C'est un point que je n'arrive pas à trancher et qui explique mon sentiment un peu mitigé, sans avis certain, à l'issue de cette lecture.

Fait rare, Le Pont sur les étoiles est aussi un roman où l'on sent clairement les quatre mains à l'oeuvre : le premier tiers, écrit par Jack Williamson, compte beaucoup de descriptions et est assez aride quand la suite du récit, de James E. Gunn, est plus active, plus aérée et plus prononcée en dialogues - pour ne pas dire plus agréable, même si cela n'empêche pas une visualisation un peu difficile par moment.

Une chose est sûre, même s'il n'est pas parfait, Le Pont sur les étoiles offre une aventure différente aux pistes de réflexion inhabituelles. Et surtout, il ne fait pas son âge !
« Si tous les hommes savaient construire des ponts, qui acquitteraient les péages ? »

samedi 9 février 2019

Audrey Pleynet - Citoyen+

Citoyen+, Audrey Pleynet, 2018, 12 pages.

Une nouvelle qui a fait - toute proportion gardée - un peu de bruit dans la blogosphère récemment. Elle est disponible gratuitement en téléchargement et, à la différence de tous les autres blogueurs, je ne ferai aucune remarque sur l'ironie d'en dire deux mots ici. Zut, raté.

Citoyen+, c'est notre monde en +. Plus quoi ? Plus connecté, toujours plus connecté. Et je n'en dis pas plus car tout le sel est de découvrir ce "monde" futur, ou actuel, au choix. Notez que pour moi, malgré cela, l'intérêt est moins dans la démonstration proposée par Audrey Pleynet que dans l'histoire, son suspense et ses conséquences. Malheureusement (pour moi), le récit reste assez mineur, bien que tout à fait respectable et plaisant. C'est pas mal, mais ça manque de "wahou" - et je n'ai pas été aidé par une "chute" que j'ai vu venir presque immédiatement.

Telle est l'ironie : vu les avis, j'en attendais +.

D'autre avis : FeydRautha, Apophis, Lutin82, Yogo, ...

mercredi 6 février 2019

Tout feu tout flamme #1 - Les Pépites de l'imaginaire

"Tout feu tout flamme", ou "Nos éditeurs ont du talent", c'est une petite rubrique de billets d'humeur sur la sphère SFFF. À prendre pour ce que ça vaut, c'est à dire pas grand chose, mais surtout avec plus d'amusement que d'énervement. Sauf si on parle de Pygmalion bien sûr. Ou peut-être de crowdfunding.
Avec l'aimable, et involontaire, participation des membres du Dernier Discord Avant la Fin du Monde, précieuse source d'informations et de débats.
Avis aux associations : aucun éditeur ou auteur n'a été maltraité pour les besoins de ces articles. En tout cas pas volontairement.

Connaissez-vous les Indés de l'Imaginaire ? Sûrement, le regroupement des éditions Mnémos, Les Moutons Électriques et ActuSF étant désormais bien installé parmi les figures du milieu. Et pour la troisième année consécutive, le mois de février est l'occasion pour eux de dévoiler leurs "Pépites de l'imaginaire" !

Quoi ? Vous ne savez pas ce que c'est ? Mais si voyons, c'est comme la rentrée de la fantasy française, sauf que ce n'est pas en septembre. Reprenons à la base avec un extrait de L'Indé n°10, feu (?) le magazine gratuit des Indés :
Soyez attentifs, un élément important se cache dans ce texte.
Une présentation que l'on peut compléter avec un extrait de la présentation de cette année (lue sur la page facebook des Indés, parce que le site officiel...) :
« Chaque année en février, les Indés de l'imaginaire propose des nouveaux auteurs, des premiers et deuxièmes romans extraordinaires, des pépites à dévorer ! »
(A) Alors mon cher Watson, vous avez évidemment vu la subtilité ? Non ? Nous y reviendrons plus tard.

Les "Pépites", ce sont donc trois romans de trois nouveaux auteurs que les Indés veulent mettre en avant par une sortie simultanée et une petite campagne de promotion. Vous comprenez bien la même chose ? Une idée sympa donc. En 2018 c'était ça :

Eh oui, ça fait déjà - ou seulement - un an !
Et en 2019, nous avons le droit à :
Quel dommage que le roman de gauche ne soit pas le sujet du jour...
Voilà. Fin. C'est quand même un poil amusant/étonnant, non ?
Quoi ? Vous n'avez toujours pas compris le piquant de la chose ? Allez, un dernier indice avec une présentation un peu plus évidente, mais c'est bien parce que c'est vous. Et ensuite, si vous avez envie d'un petit cours de marketing situationnel, vous pourrez retourner plus haut au point (A).
Cliquez sur l'image pour bien savourer cette information.

vendredi 1 février 2019

Chloé Chevalier - Les Terres de l'Est

Les Terres de l'Est, Chloé Chevalier, Tome 2/4 des Récits du Demi-Loup, 2016, 327 pages

Deuxième tome des Récits du Demi-Loup, après Véridienne, Les Terres de l'Est prend place deux ans plus tard, mais néanmoins dans la continuité des évènements de fin du premier tome, et se déroule en grande partie - quelle surprise ! - à l'Est.

Signe de qualité, même trois ans après la lecture du premier tome le retour dans le Demi-Loup se fait plutôt bien. Il n'en reste pas moins qu'un petit résumé divulgâcheur en entame de volume ne serait vraiment pas de trop. Une absence vraiment incompréhensible pour moi, que cela soit ici ou chez bien d'autres éditeurs.

Quoiqu'il en soit, c'est le seul point négatif que l'on trouvera ici. Car pour tout le reste, c'est du très bon. Au programme : des personnages qui s'affirment toujours plus, un univers qui s'agrandit, des révélations sur les mystères laissés dans le premier tome, toujours une intelligente alternance de récits et de lettres, ...

Si les princesses sont quelque peu en retrait, Aldemor est incontestablement le pilier de ce volume, un touchant pilier loin d'être épargné. L'intrigue n'avance pas nécessairement à vitesse grand V mais elle avance tout de même, avec plaisir et sans répit ni ennui, sur plusieurs fronts en parallèle. Si Véridienne était une bonne découverte, Les Terres de l'Est est une très belle confirmation de la qualité de ces Récits du Demi-Loup.

D'autres avis : Célindanaé, Boudicca, Xapur, L'ours inculte, AcrO, Julien, ...