vendredi 25 novembre 2022

Christian Léourier - Diseur de mots

Diseur de mots, Christian Léourier, 2019, Tome 1/2 de La Lyre et le Glaive, 371 pages

En suivant son dé à 8 faces, Kelt parcourt le monde à la recherche de la mythique Urskogar, la mère des forêts. En chemin, il prédit l'effondrement d'un pont et se retrouve arrêter en tant que coupable. Car Kelt est un diseur de mots : de sa bouche ne peut sortir que la Vérité. Quitte à ce que le monde autour de lui s'y adapte ?
« Le temps fait moins injure à une cité qu'à ceux qui l'habitent. Néanmoins, qu'on la croie éternelle ne l'empêche pas de s'écrouler. »
Les premières pages de Diseur de mots enchainent les tropes de la fantasy. Un prologue abscons aux airs de prophétie, un monde typé féodal, des noms de personnages et de lieux exotiques, quelques termes inventés, ... Nul doute qu'il s'agit d'un livre de fantasy. C'est peut-être le seul défaut de ce roman : la peur d'être devant quelque chose de lambda et de peu engageant lors des premières minutes de lecture. Heureusement, il ne faut pas beaucoup plus de temps pour passer outre et se plonger pleinement dans l'univers et ses personnages. Car si les grandes lignes restent classiques, il y a un détail qui change tout : elles sont tracées par Christian Léourier.

Si la plume de l'auteur m'a d'abord semblé un peu moins marquée que dans ses nouvelles, elle monte en puissance au fil des pages, en même temps que le récit se fait toujours plus humain et touchant. Car l'attachement aux personnages - en tout cas pour Kelt, Varka et Hòggni - est un facteur essentiel du plaisir de lecture. Mais il n'y a pas que ça au sein de ce livre. C'est justement son autre force : il y a à la fois un cheminement d'individus, des péripéties à taille humaine, tout autant que des batailles d'ampleur et des jeux de pouvoir plus politiques. Sans que l'un ne prenne le pas sur l'autre, le dosage de Christian Léourier étant admirable.

Diseur de mots est un très bon roman, une vraie réussite qui est indéniablement un tome 1 tout en offrant un agréable sentiment de complétude et de satiété, tout ça en moins de 400 pages. Et si le test ultime de la qualité d'un premier tome est de savoir si l'on a envie de lire la suite, il le passe haut la main : j'en ai très envie.

Couverture : Jean-Baptiste Hostache
D'autres avis : Yuyine, Zina, Lorhkan, Célinedanaë, Dionysos, Marc, lutin82, ...

vendredi 18 novembre 2022

Michel Demuth - La Course de l'oiseau Boum-Boum

La Course de l'oiseau Boum-Boum, Michel Demuth, 1967, 47 pages (epub)

La colonisation de la planète Miage se déroulerait parfaitement bien si ce n'était pour ce mystérieux oiseau Boum-Boum, ressemblant à une autruche, qui habite à proximité et a parfois des accès de violences envers les humains. Kellus Berg, ornithologue, est envoyé en mission sur Miage pour résoudre ce problème de manière pacifique.

La Course de l'oiseau Boum-Boum est une histoire de premier contact et de compréhension de l'autre, en l'occurrence la faune locale. L'idée est bonne, il y a un certain mystère dont on a envie d'avoir la résolution, mais la finalité est déconcertante et un peu décevante - même si je n'exclus pas de n'en avoir pas saisi toute l'ampleur. Ce n'est pas un mauvais texte, mais il n'a rien de vraiment marquant ou particulier. Si ce n'est peut-être son écriture très vive, qui se lit comme un sprint... mais qui étonnamment tire malgré tout un peu en longueur. Un texte très simple, trop simple, qui ne surprend réellement que par son occasionnelle utilisation DES MAJUSCULES.

Nouvelle offerte en téléchargement gratuit par Le Bélial' pour fêter la réédition de Les Galaxiales de Michel Demuth.

Couverture : Philippe Druillet

samedi 12 novembre 2022

Terry Pratchett - Faust / Eric

Faust Eric, Terry Pratchett, Tome 9/35 des Annales du Disque-Monde, 1990, 163 pages

Comme son titre l'indique, Faust Eric est librement inspiré de la légende de Faust. Sauf qu'ici, c'est Éric, 13 ans, qui tente d'invoquer un démon pour qu'il exauce ses voeux... et se retrouve à la place avec Rincevent. C'est donc le quatrième volume mettant en scène le mage, après La Huitième Couleur, Le Huitième Sortilège et Sourcellerie. Et c'est dans la lignée des précédents : lisible sans être réellement marquant.

Faust Eric est un ouvrage assez foutraque. Sans réelle intrigue, c'est un enchainement de péripéties abracadabrantes - ou disquemondesque -, un peu aléatoires, où Terry Pratchett s'amuse des Enfers et de quelques "figures mythiques". Il y a évidemment quelques fulgurances, une apparition de La Mort et une amusante version d'Ulysse, mais je crois que ça ne restera pas longtemps dans ma mémoire.
« Il comprenait aujourd'hui ce qui rendait l'ennui aussi fascinant. C'était de savoir que des évènements plus graves, des évènements dangereusement excitants, se produisaient tout à côté et qu'on y échappait. Pour que l'ennui soit agréable, il lui faut une référence à quoi le comparer. »
Couverture : Josh Kirby / Traduction : Patrick Couton

mercredi 2 novembre 2022

Ahmed Saadawi - Frankenstein à Bagdad

Frankenstein à Bagdad, Ahmed Saadawi, 2013, 371 pages

Bagdad, 2005. Dans le quartier de Batawin, comme dans toute la ville, les attentats à la voiture piégée rythment les journées des habitants. Au milieu de ce ballet d'explosions et de forces de l'ordre, Hadi le chiffonnier récupère des fragments de corps laissés à l'abandon et les recoud ensemble. Jusqu'au jour où sa création, le Sans-Nom, prend vie et part en quête de vengeance.

Tout le contenu de Frankenstein à Bagdad est dans son titre. C'est une plongée dans une ville où le danger fait partie du quotidien et où les habitants font avec, presque comme si de rien n'était. Cet exotisme, aussi terrible soit-il et surtout décrit par un auteur local, fait la particularité et l'intérêt du roman. Heureusement d'ailleurs qu'il est là, car l'intrigue en elle-même est mince et peu palpitante. Ça se lit, mais ça ne brille jamais vraiment.

Là où les regrets pointent réellement, c'est qu'au-delà de la description d'une Irak ensanglantée, Frankenstein à Bagdad possède une autre force absolument sous-exploitée : le Sans-Nom, Trucmuche, le Frankenstein irakien. Lui qui devrait être une figure centrale est quasiment une arrière-pensée, apparaissant sporadiquement. C'est d'autant plus dommage qu'il est très clairement le personnage le plus intéressant et que le chapitre lui donnant intégralement la parole est sans conteste le meilleur du roman. Tout était là pour un livre marquant, et pourtant Frankenstein à Bagdad est seulement un roman 'ok'. Dommage.

Couverture : ? / Traduction : France Meyer
D'autres avis : Gromovar, ...