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lundi 3 février 2014

David Calvo - Elliot du Néant

Elliot du Néant, David Calvo, 2012, 314 pages.

J'ai assez longuement hésité avant de replonger dans un livre de David Calvo. Une certaine appréhension. Nid de coucou ne fut pas toujours une lecture facile mais m'a laissé une grande impression. Mais comment cela rendra-t-il sous la forme d'un roman plus habituel ? La surprise et la folie seront-elles aussi bonnes en sachant à quoi s'attendre ?

Un argument de poids m'a fait me lancer dans Elliot du Néant : l'histoire se passe en Islande. Et ce qui se rapporte à l'Islande ne peut pas être mal, n'est-ce pas ? Avouons tout de même que ce livre ne vous offrira pas une grande visite du pays, même si le cadre reste un élément important (il inspire au moins pour moi une certaine "possibilité" ou "crédibilité").

Qu'est-ce qu'Elliot du Néant ? Je ne suis pas vraiment capable de vous le dire. Elliot, un vieux concierge d'école, est le point de départ. Ou plutôt sa disparition est le point de départ de la recherche que vont effectuer les professeurs, et plus particulièrement Bracken, le héros. Quant au Néant... Il est présent, il est là, pièce centrale de l'univers, insaisissable et indéfinissable, à la fois concret et irréel. Comment expliquer le Néant ? Les personnages s'y essayent pendant une vingtaine de pages et c'est surement le passage le plus compliqué à lire et peut-être le moins intéressant. Peu importe. Tout n'a pas besoin de s'expliquer formellement. On peut vivre les choses sans cela. Parfois même mieux.

Alors, qu'est-ce qu'Elliot du Néant ? C'est du David Calvo. C'est particulier et cela ne plaira pas à tout le monde. Un mélange des genres, une folie créatrice. La rencontre d'influences les plus diverses, avec notamment un poème de Mallarmé, un clip de Nik Kershaw et un peu de mythologie nordique.

Elliot du Néant n'est pas toujours une histoire facile à suivre. Mais plus que l'histoire, qui n'est pas exceptionnelle en elle-même, c'est une ambiance qui est créée, une plongée dans un univers à la fois irréaliste et concevable. Personnellement, et je me trompe peut-être entièrement, j'y vois une métaphore du pouvoir créateur de l'art (même si dans ce cas je n'ai pas compris la morale finale). Vous y verrez peut-être tout à fait autre chose, ou peut-être rien. Mais si vous avez envie de prendre un risque, lisez Elliot du Néant. Ne serait-ce que pour rencontrer deux tortues vraiment géniales.

Une lecture de plus pour le Challenge Francofou

vendredi 8 novembre 2013

David Calvo - Nid de coucou

Nid de coucou, David Calvo, 2007, 253 pages.

Attention, OVNI en approche ! Ou OLNI pour être plus exact : Objet Littéraire Non Identifié. Non, mais lisez moi cette quatrième de couverture. Si elle vous fait ouvrir de grands yeux, imaginez que ce n'est qu'un soupçon de l'incompréhension et de la folie qui se dégage de ce livre.

Avant d'essayer de parler du fond, attardons-nous un peu sur la forme. Tout commence par une carte (toujours un bon point, juste parce que j'aime bien les cartes), puis un sommaire aux allures de stratigraphie qui donne le ton : ce livre va être spécial. En parcourant l'oeuvre, on pourra se rendre compte qu'il est parsemé de diverses photos prises par l'auteur. Je ne suis pas sûr que cela amène véritablement un plus, si ce n'est que cela rend l'objet-livre encore plus particulier. Pendant que j'y suis, je peux souligner la très belle couverture de Marion Girerd, tout en couleur et en onirisme, parfaitement dans la veine des écrits de David Calvo.

Mais je m'égare, et j'évite le problème principal : qu'est-ce que Nid de coucou ? Et bien, je ne suis sûr de rien. À la base, il s'agit de plusieurs nouvelles de David Calvo, parues précédemment ailleurs et regroupées ici. Mais ce n'est pas qu'un simple recueil puisque ces nouvelles sont agrémentées d'autres textes qui les relient et créent un univers ainsi qu'une histoire plus globale sur le Gondwanaworld.

Concrètement, on n'y comprend absolument rien au début. Il y a des éléments qui reviennent régulièrement (le Gondwanaworld, Casimir, le Grand Coucou), ainsi que de très nombreuses références triturées en tout sens (de Robert Louis Stevenson à Babar, de Franck Sinatra au Capitaine Crochet,...). Cela donne des aspects très fouillis, surtout qu' on arrive pas à comprendre où l'on va. Parce qu'on ne va quasiment nulle part en fait. On se balade dans un univers, on le découvre, on le comprend petit à petit sans jamais être sûr de rien. Les narrateurs se mélangent, tout comme les types de narration, et tout comme le temps et l'espace. Cela vous semble totalement fou ? Ça l'est en quelque sorte, il faut lire Nid de coucou pour vraiment envisager Nid de coucou.

À côté de ce monde qui s'étend principalement au travers des petits chapitres, il y a aussi les grandes histoires, les nouvelles originelles, d'une trentaine de pages généralement (6 ou 7 je crois). Toutes sont surprenantes, et il y a de véritables bijoux. Iceblink blunk par exemple, enquête à la Columbo dans une communauté de bonhommes de neige. Ou John Frog, histoire d'un homme qui a un coucou dans les cheveux après un mauvais enchantement d'un sorcier, dont la chute est grandiose (dans tous les sens du terme).

Nid de coucou est inclassable à tous points de vue. C'est un concept, une aventure. Ce n'est pas une lecture toujours facile mais, même si je ne sais pas toujours comment ni pourquoi, c'est vraiment super. Parce que je ne l'ai pas encore dit, mais ce livre fait aussi passer de très beaux messages, avec de vraies émotions.

J'aime bien les lectures décalées, j'aime l'absurde et ce qui sort du rang. David Calvo arrive à faire tout cela, d'une manière que je n'avais jamais vu. On le rapprochera peut-être parfois un peu d'un Fabrice Colin, avec qui il a déjà écrit, mais cela reste quand même bien différent. C'est unique, et c'est bien pour ça qu'il y aurait tant à dire. Mais pour finir, trois choses. Premièrement, un résumé en une phrase : je pense qu'avant tout, Nid de coucou est un éloge de l'imaginaire. Deuxièmement, un lien vers une interview de David Calvo sur le Cafard cosmique, qui donne un petit aperçu du bonhomme. Enfin, une citation, qui n'a aucune prétention si ce n'est qu'elle m'a marqué :
« N’oubliez jamais ce que je viens de vous dire. Ce que vous contemplerez, de vos yeux, sera pour vous, uniquement pour vous. Ce que vous en tirerez n’existera pour personne d’autre. ce sera votre coeur, votre âme, votre secret. Vous n’hésiterez pas à l’oublier, pour ne pas risquer de le tâcher. Les derniers espaces blancs de l’invisible sont plus précieux que tout, car leur véritable valeur n’a jamais été envisagée autrement que par rapport à nos ressources matérielles. C’est ainsi : jamais le monde n’a pensé que quelque chose qui n’existe pas pouvait nous rendre meilleur. »
Une nouvelle lecture pour le Challenge Francofou