mercredi 30 juillet 2025

Eduardo Mendoza - Bataille de chats

Bataille de chats, Eduardo Mendoza, 2010, 391 pages

Madrid, 1936. Anthony Whitelands est un spécialiste anglais de la peinture espagnole du Siècle d'or. Il est appelé en Espagne, où les tensions montent de plus en plus entre républicains et nationalistes, pour estimer un tableau qui doit servir à financer la fuite du pays d'un duc et de sa famille.

Contrairement à ce que son titre indique, il n'est nullement question de félins dans Bataille de chats. La possible confusion vient du jeu de mots intraduisible qu'est le titre original, Riñas de gatos, où les gatos sont bien le terme espagnol désignant les chats mais aussi, et surtout dans le cas présent, le surnom des madrilènes.

Loin des rixes félines donc, ce sont les prémices de la guerre civile espagnole qui sont au coeur du récit. Le principe est assez malin : prendre un personnage neutre, un anglais en l'occurrence, et le mettre dans une situation qui va l'amener à côtoyer les deux camps, pour pouvoir évoquer leurs idéaux et leurs fonctionnements. Sauf que cet aspect reste trop en surface et ne donne pas envie de s'intéresser à la situation.

Le problème majeur, qui parasite le potentiel historico-social, c'est que la majeure partie du récit est un vaudeville. Et pas vraiment un bon en plus, bien que je ne sois pas le mieux placé pour juger le genre. Mais il y a une chose dont je suis sûr : les personnages féminins sont bien trop jeunes pour que cela soit sain. Ce n'est pas le seul problème de ce roman qui jongle très bizarrement entre ses différents projets mais c'est un problème rédhibitoire. D'Eduardo Mendoza j'avais grandement apprécié les excellents Sans nouvelles de Gurb et Le Dernier Voyage d'Horatio II. J'aurais peut-être mieux fait de m'en tenir à sa science-fiction humoristique.

Couverture : Virginie Perrollaz / Traduction : François Maspero
D'autres avis : ...

jeudi 24 juillet 2025

Raphaël Bardas - Les Fourneaux de Crachemort

Raphaël Bardas, Les Fourneaux de Crachemort, 2024, 356 pages

Quatre jeunes adultes se sont liés d'amitié lors de leurs cours de théâtre. Ils forment une vraie petite bande, au point de parfois commettre quelques cambriolages pour passer le temps. Jusqu'au jour où l'un de ces larcins, chez un dramaturge fraichement décédé, tourne mal et qu'ils doivent fuir leur ville de Brillanza à bord d'un food-truck. Mais les quatre objets qu'ils ont innocemment récupéré pourraient bien avoir lancé à leurs trousses des problèmes bien plus graves qu'une simple poursuite pour vol.

Les Fourneaux de Crachemort peut être résumé très facilement en trois thématiques : nourriture, théâtre et sexualité. L'ambiance méditerranéenne des débuts laissera plus tard place à des contrées moins chaleureuses mais l'esprit lui restera toujours le même : la fête et le plaisir comme mots d'ordre, malgré tous les problèmes. Encore plus face à certains d'entre eux, d'ailleurs.

Il y a un vrai ton, une vraie ambiance différente dans Les Fourneaux de Crachemort. Ce n'est pas une révolution mais ça donne un vrai charme à l'ensemble, surtout que ce n'est pas qu'une façade et que cela fait partie intégrante de l'histoire. L'univers parait parfois un peu foutraque et le récit en lui-même n'est pas le plus palpitant, mais c'est compensé par le vent de fraicheur et de liberté qui souffle entre ces pages - et ce malgré le monde bien sombre qu'elles décrivent -, à l'image de la dynamique rafraichissante et pas si commune entre les quatre héro.ïne.s. L'ensemble a un côté facétieux qui n'accrochera pas tout le monde mais qui en fait une bonne aventure.

Couverture : Emiliano Renzi
D'autres avis : L'ours inculte, Le nocher des livres, Célinedanaë, ...

vendredi 18 juillet 2025

Alastair Reynolds - La Maison des Soleils

La Maison des Soleils, Alastair Reynolds, 2008, 504 pages

Campion et Purslane sont deux fragments de la Lignée Gentiane, clones d'Abigail Gentian parcourant l'univers depuis des millions d'années. Tous les deux cent mille ans, les mille clones se réunissent pour faire la fête et partager leurs découvertes. Une réunion est justement sur le point de commencer, à laquelle Campion et Purslane sont en retard. Ce qui s'avèrera être une chance, et le début d'une aventure aux enjeux encore plus gigantesques que leurs périples habituels.

Avoir découvert l'univers de la Lignée Gentiane dans La Millième Nuit permet d'entrer plus sereinement et facilement dans La Maison des Soleils mais les premières pages font tout de même leur effet. Un effet wahou tant les chiffres, de distances et de durées, sont vertigineux. Tout est démesuré dans La Maison des Soleils, inimaginable, et pourtant cela reste constamment à portée d'appréhension. Cela ne veut pas dire que tout est parfaitement compréhensible mais cela se fait sans frustration.

Le sense of wonder est sans aucun doute la qualité première de La Maison des Soleils. Ses personnages sont aussi très bons et l'histoire tient bien la route. J'ai un peu plus de bémols concernant la structure et le rythme du récit. J'y ai discerné trois grandes parties qui ne s'imbriquent pas idéalement les unes dans les autres : une première qui prend le temps de présenter, avec force détails, son univers et ses concepts ; une deuxième bien plus terre-à-terre où des êtres surhumains s'avèrent être aussi bêtes et détestables que des humains lambdas ; un brusque basculement vers une troisième partie finale qui propose une aventure et une conclusion. C'est cette dernière qui est d'ailleurs la meilleure parce qu'elle mélange mieux ses différents éléments pour en faire une lecture à la fois prenante et émerveillante, et avec bien moins de lassitude.

Si ce bémol est l'un des éléments les plus saillants de mon ressenti, il ne doit pas éclipser le fait que La Maison des Soleils est un vrai bon roman. Ça n'aura pas été un coup de coeur et j'ai préféré La Millième Nuit, mieux rythmé et plus constant, mais cela reste rare de pouvoir lire un texte avec un tel sens du gigantisme.

Couverture : Amir Zand / Traduction : Pierre-Paul Durastanti
D'autres avis : Tigger Lilly, Vert, Lhisbei, shaya, FeyGirl, Lorhkan, Gromovar, Le Maki, FeydRautha, Anne-Laure, Apophis, Célinedanaë, Anudar, Cédric, ...


Première escale pour le Summer Star Wars Andor S2

samedi 12 juillet 2025

Claire North - Sweet Harmony

Sweet Harmony, Claire North, 2020, 159 pages

Tout va bien pour Harmony Meads. Un corps parfait, une santé parfaite, un petit ami parfait, un emploi parfait. Jusqu'au jour où apparait, sur son visage, un bouton. Ce qui est strictement impossible puisque les nanos dans son corps font en sorte de lui assurer une apparence parfaite. Mais tous ces abonnements ont un coût... et les finances d'Harmony ne sont pas parfaites, elles.

Sweet Harmony est une novella qui parle, sans surprise, du culte de l'apparence. Et ce sans évoquer les réseaux sociaux. Il n'y en a pas besoin, les relations sociales de la vie de tous les jours suffisent largement à pousser l'envie du corps parfait, confortable, attractif, qui ouvre toutes les portes ou presque. Mais le texte de Claire North ne se limite pas à dénoncer les ravages et les risques de cette beauté à tout prix. Ce n'est qu'un des multiples thèmes évoqués, avec aussi la pression sociale, les relations toxiques ou encore le cercle vicieux de la dette.

Sweet Harmony est un récit qui ne donne pas de leçon mais pousse à réfléchir sur son propre rapport au corps, au sien comme à ceux des autres. Le constat proposé par Claire North n'est pas joyeux. Il est même triste, mais tristement vrai. C'est aussi effarant que lucide, et c'est symbolisé par une héroïne avec laquelle on ne peut ni être complètement dans l'empathie ni être complètement dans le dédain tant elle est aussi imparfaite que réaliste. Indéniablement un texte fort.

Couverture : Aurélien Police / Traduction : Michel Pagel
D'autres avis : Vert, Tigger Lilly, FeyGirl, Yuyine, Le Maki, FeydRautha, Gromovar, Jean-Yves, Xapur, Boudicca, Zoé, Célinedanaë, Herbefol, ...

dimanche 6 juillet 2025

Bulles de feu #75 - Juin 2025

Un petit récapitulatif de mes lectures BDs/mangas/comics du mois, pour en garder une trace.
Le classement est absolument imparfait, insatisfaisant et un peu aléatoire mais peut donner un ordre d'idée. Les avis sont (ultra)brefs, n'hésitez pas à demander un complément d'informations en commentaire si nécessaire.

Bien / Ok / Correct


Thermae Romae T.3/6 - Mari Yamazaki

La série continue de s'améliorer sur la durée : les histoires se permettent de durer plusieurs chapitres et il y a une plus grande continuité globale, sans pour autant délaisser les improbables voyages temporels et le thème des bains.


Thunder 3 T.2-3/? - Yuki Ikeda

Ça s'avère être une sorte de One Punch Man en plus sérieux. Ça manque peut-être d'un enjeu dramatique plus fort et d'un peu de tension, mais c'est agréable et surprenant à lire.


The Private Eye - Brian K. Vaughan et Marcos Martin

Un bon polar/thriller dans un futur où Internet n'existe plus, portant une réflexion sur la vie privée. Une histoire noire aux dessins énergiques et aux couleurs lumineuses.
Très bien


Evol T.5/? - Atsushi Kaneko

Ça évolue juste ce qu'il faut pour ne pas être répétitif.


Célestin et le coeur de Vendrezanne, Les Contes de la Pieuvre T.3/? - Gess

Une nouvelle très bonne histoire qui continue de faire grandir un univers riche et fascinant, autant dans son aspect fantastique qu'historico-géographique, peuplé de personnages charismatiques.


Shin Zero T.1/3 - Mathieu Bablet et Guillaume Singelin

Un duo d'auteurs qui fait rêver et un ouvrage à la hauteur des attentes, sur le fond et sur la forme. C'est un hommage aux sentai qui fait bien plus que ça, c'est une bonne aventure mais surtout de très bonnes tranches de vie de personnages qui se cherchent.


Blue Giant T.1-5/10 - Shinichi Ishizuka

Un manga sur un jeune homme voulant devenir le meilleur saxophoniste de jazz au monde. Ça sonne comme un manga d'apprentissage classique mais ça ne tombe pas du tout dans cette routine ou dans le didactique. C'est absolument excellent et très intelligemment écrit. Le jazz y est décrit comme une musique d'émotions et c'est exactement ça que rend le manga : des émotions. C'est puissant, ça prend au coeur, à mettre les larmes aux yeux de joie.