Friday Black, Nana Kwame Adjei-Brenyah, 2018, 258 pages
Friday Black est un recueil de 12 nouvelles teintées de science-fiction. Une utilisation de l'imaginaire qui permet d'exacerber certains aspects de notre monde dans un futur proche. Et pas les aspects les plus enviables, évidemment. Nana Kwame Adjei-Brenyah y expose sans fard, entre autres, le consumérisme, la violence et le racisme.
Comme dans tous les recueils, tous les textes ne s'apprécient pas de manière égale. Mais, à l'exception peut-être de Lark Street qui m'a laissé dubitatif, toutes les nouvelles sont au minimum vraiment bonnes à lire - je dirais bien "plaisantes" mais ce n'est pas un terme particulièrement approprié vu les contextes. Le plus souvent elles sont même très bonnes.
Si toutes offrent un point de vue individuel qui permet de tirer des conclusions d'ordre plus général, je distingue tout de même deux catégories dans ces 12 nouvelles. Il y a d'un côté des nouvelles plus "personnelles", des histoires de vie quotidienne aux fins ouvertes et aux finalités un peu nébuleuses. De l'autre il y a des textes plus frontaux, sans équivoque sur leurs messages. C'est dans ce deuxième groupe que se trouve mes nouvelles préférées, les plus puissantes, celles qui donnent des coups et me resteront en tête : Zimmer Land et son parc d'attractions pour blancs voulant se défendre contre l'envahisseur non-blanc ; Les 5 de Finkelstein et son racisme d'état, tristement réaliste, un chef-d'oeuvre qui vaut à elle-seule la lecture du recueil.
Mes attentes initiales me faisaient espérer plus de textes de ce genre, très marquant. Ce n'est pas nécessairement le cas, il y a de l'alternance et des choses relativement plus légères. Mais cela n'enlève finalement rien à la qualité générale du recueil qui vaut largement le détour. Notamment pour un dernier point que Gromovar a parfaitement explicité et que je me permets de citer pour conclure puisque je ne pourrais rien dire de mieux et qu'il résume très bien l'essence de ce recueil :
« Dans les nouvelles de Adjei-Brenyah, la parole officielle, juridique, historique, peut tuer ou meurtrir encore et encore, mais la parole humaine, celle qu'on donne intuitu personæ, celle qui nécessite qu'on se mette en état d’attention à l'autre qui parle et à qui l'on parle, est source de reconnaissance, de soin, d’apaisement. C'est parce qu'ils ne se parlent pas que les humains souffrent, c'est parce qu'ils ne s'écoutent pas qu'ils se divisent en clans irréconciliables ou parviennent à chosifier l'autre jusqu'à ce qu'il ne soit plus qu'un obstacle ou un moyen. »Couverture : Favor Nnebedum - EyeEm - Getty Images / Traduction : Stéphane Roques
D'autres avis : Gromovar, FeydRautha, Lhisbei, Yuyine, TmbM, ...