mardi 27 juin 2023

T.J. Klune - Sous la porte qui chuchote

Sous la porte qui chuchote, T.J. Klune, 2021, 468 pages

Wallace Price est un avocat implacable. S'il n'inspire aucune sympathie à son entourage, tout va pourtant bien pour lui. Jusqu'à ce qu'il meure subitement d'une crise cardiaque. Au lieu de le conduire dans l'au-delà, une faucheuse du nom de Mei l'emmène... dans un salon de thé, La Traversée de Charon, où le tenancier, Hugo, est là pour permettre aux morts de passer sereinement au-delà de la porte.

Sous la porte qui chuchote est un livre sympathique qui se lit facilement, qui comporte quelques bons passages et propose une agréable représentation queer, traitant toutes les relations de manière égale et normale. Cette dernière qualité est malheureusement aussi un petit défaut à titre tout à fait personnel : s'il traite de la mort, du deuil et par extension de la manière dont vivre sa vie, Sous la porte qui chuchote est fondamentalement une romance. Et ça n'a jamais été mon fort.

L'autre bémol qui m'appartient, c'est qu'il tient difficilement la comparaison avec les livres de Becky Chambers. T.J. Klune partage pourtant avec elle l'écriture de romans feel-good, avec peu d'action, basés sur les personnages et avec une forte propension à boire du thé. Sauf qu'ici, tout m'a semblé plus lisse, plus lambda, moins profond, moins touchant.

S'il n'est pas forcément juste de ma part de tenir rigueur à T.J. Klune de ces deux bémols, c'est un peu moins le cas des deux suivants. D'abord la rédemption du personnage de Wallace est bien trop rapide, passant de personnage supposément antipathique et détestable (et intéressant) à sympathique (et banal) héros de l'histoire en à peine quelques pages. Mais le plus gros problème est surement le dénouement du récit, sans surprise mais qui vient à mon sens à l'encontre totale du coeur même de l'intrigue.

Si je m'étends plus sur les défauts que sur les qualités, car ce sont ces premiers qui sont plus saillants, Sous la porte qui chuchote reste malgré tout un livre sympathique, à défaut d'être un très bon roman.

Couverture : Red Nose Studio / Traduction : Benoit Domis
D'autres avis : Sabine, ...

dimanche 18 juin 2023

Alexandra Koszelyk - La Dixième Muse

La Dixième Muse, Alexandra Koszelyk, 2021, 280 pages

Alors qu'il erre dans le cimetière du Père Lachaise, Florent se retrouve devant la tombe de Guillaume Apollinaire. Une rencontre anodine qui va pourtant l'obnubiler, le mettre sur les traces du poète et bouleverser sa vie.

Aussi court et vide soit-il, ce résumé contient pourtant l'ensemble de l'intrigue de La Dixième Muse. Il y a donc d'un côté Florent, qui change et sombre quasiment dans la folie (ou la magie, mais y a-t-il une différence entre les deux ?), ou tout du moins dans une obsession pour Apollinaire qui le fait s'éloigner de sa compagne. Et de l'autre il y a Guillaume Apollinaire, dont la vie nous est contée par bribes et par épisodes, par des parents et ami.e.s l'ayant côtoyé au cours de sa vie. Les deux s'alternant d'un chapitre à l'autre, les pas de Florent le menant, comme de par hasard, sur les passages biographiques d'Apollinaire.

La Dixième Muse est un ouvrage étonnant qui n'avait rien pour me plaire. Le personnage de Florent est un peu énervant, assez apathique et pas franchement emballant, pas de quoi me donner une incroyable envie de le suivre et de me passionner pour sa petite vie de littérature blanche. Quant à Apollinaire, je ne le connaissais pratiquement pas et je n'ai aucun atome particulièrement crochu avec la poésie. Autant dire que ma lecture fut parfois à la limite de l'ennui et d'un certain désintérêt pour son côté vain. Et pourtant.

Pourtant il y a quelque chose dans ce livre. Quelque chose qui rend certains passages tout à fait exaltants. La Dixième Muse est un hymne à la poésie et à la nature et il est porté par l'amour que leur porte l'autrice. Il y a, et c'est bienvenu vu le thème du roman, une poésie dans les mots d'Alexandra Koszelyk. Particulièrement dans les parties consacrées à Apollinaire, qui m'ont fait me passionner pour sa vie. Le style est un peu différent dans la moitié dédiée à Florent, avec des phrases là aussi courtes mais qui produisent cette fois un sentiment d'urgence et un halètement à la lecture.

Tout n'est pas parfait, loin de là. Rien que la construction du récit est aussi maline qu'artificielle. Jusqu'à une dernière partie qui donne le sentiment d'abandonner la structure avant son terme tout en faisant sens. Tout est ainsi, rien n'est véritablement constant sans pour autant amoindrir l'unité de l'ensemble. Tout est ambivalent dans ce roman, tous les éléments sont susceptibles de laisser enthousiaste et sceptique, parfois en même temps.

Mais au final, malgré tous les potentiels bémols, le sentiment qui domine reste la satisfaction. Parce que le roman se conclut sur une bonne note. Mais surtout parce qu'il se passe quelque chose entre ses pages, il y a ce petit truc qui le fait sortir du lot et le laisse trotter dans la tête. C'est un livre qui donne envie d'en parler, envie d'écrire, de pérorer, de conter, de jouer avec les mots, de poétiser. C'est un livre qui apporte de la vie.

Couverture : Elena Vieillard
D'autres avis : Zoé, Sabine, ...

lundi 12 juin 2023

Stephen Graham Jones - Un bon indien est un indien mort

Un bon indien est un indien mort, Stephen Graham Jones, 2020, 346 pages

Quatre amis d'enfance, indiens - comme ils se nomment eux-mêmes -, ont pris part à un braconnage, tuant tout un troupeau de caribous. Dix ans plus tard, alors que seulement deux d'entre eux vivent encore dans la Réserve, tous vont subir les conséquences de cette chasse illégale et la vengeance des cervidés.

Malgré sa structure en quatre parties, Un bon indien est un indien mort se divise en fait en deux moitiés. La première se concentre sur le personnage de Lewis et sa descente aux enfers. Une partie intéressante puisque, si on omet le pitch du roman et le destin de Ricky en préambule, le doute est constamment permis entre paranoïa et véritable présence d'une entité maléfique. À défaut d'être vraiment plaisant, c'est assez fascinant à suivre et c'est vraiment bien mené, montrant bien avec quelle facilité on peut sombrer dans la folie.

La seconde moitié se concentre sur Gabe et Cassidy. Et avec elle l'aspect psychologique va fondre, pour que le roman devienne une sorte de slasher. J'étais déjà convaincu que ce n'est pas quelque chose qui m'intéresse, j'en ai eu la confirmation, j'ai trouvé ça assez vain. Et ce n'est pas le propos sur les indiens, assez maigre et pas franchement marquant, en arrière-plan, qui aura réussi à éveiller mon intérêt. La bonne nouvelle toutefois, pour moi qui n'en suis pas client, c'est que l'aspect horrifique de ce roman fantastico-horrifique est léger et plus que supportable, c'est toujours ça.

Couverture : Kaiwan Shaban / Traduction : Jean Esch
D'autres avis : Lorhkan, Gromovar, Célinedanaë, Le nocher des livres, Marc, ...

lundi 5 juin 2023

Bulles de feu #50 - Mai 2023

Un petit récapitulatif de mes lectures BDs/mangas/comics du mois, pour en garder une trace.
Le classement est absolument imparfait, insatisfaisant et un peu aléatoire mais peut donner un ordre d'idée. Les avis sont (ultra)brefs, n'hésitez pas à demander un complément d'informations en commentaire si nécessaire.

Mouais



Black-Box T.6/6 - Tsutomu Takahashi

Lu parce qu'il ne restait qu'un tome mais mon intérêt s'était déjà envolé, même pour l'espèce de rédemption qui conclut la série.
Bien / Ok / Correct



Le Roi-Cerf T.1-2/2 - Tarō Sekiguchi

Une adaptation des romans de Nahoko Uehashi. C'est correct, ça se lit, mais c'est trop précipité pour être attachant ou vraiment clair.



T'zée - Une tragédie africaine - Appollo et Brüno

Une bonne BD avec les dessins si particuliers (et appréciables, me concernant) de Brüno et une histoire qui gagne en qualité en se renseignant sur Mobutu mais qui reste un peu trop à la surface, plus présentation qu'approfondissement.



Spy X Family T.3/? - Tatsuya Endo

Une sympathique série et le teasing du potentiel futur meilleur personnage.



Le Maître des livres T.7-8/15 - Umiharu Shinohara

Toujours bien, entre joyeuses improbabilités et moments touchants.



Shi T.1-5/? - Zidrou et Homs

Le dessin n'est pas mon favori mais il va très bien avec l'aspect crasseux du récit. L'histoire est assez solide mais ça manque un peu de punch et ça traine en longueur, mon intérêt a faibli au fur et à mesure des tomes.


Les Pizzlys - Jérémie Moreau

Il faudrait que je relise La Saga de Grimr pour pouvoir vraiment le dire, mais ce n'est pas loin d'être la meilleure oeuvre de Jérémie Moreau. Un dessin - et des couleurs - encore plus atypique que d'habitude par moment, mais qui fait corps avec l'histoire, et un récit qui parle autant de citadins français que des autochtones d'Alaska, avec une certaine pudeur et en évitant la moralisation.


Jamais - Le jour J T.2/one-shot - Bruno Duhamel

La bonne surprise. C'est frais et sympa, avec un rapide fond historique et toujours une petite critique sociale. Je n'en attendais rien, au contraire, étant donné que le "premier tome" se suffisait pleinement à lui-même et que je ne voyais pas du tout ce qu'il y avait à dire de plus, mais Duhamel prouve une nouvelle fois qu'il est un très bon bédéaste.
Très bien



Le Spectateur - Théo Grosjean

Atypique sur la forme, en vue subjective d'un personnage muet. Sombre sans être déprimant sur le fond, avec une sensation de "vraie vie", de "vie lambda", rarement égalée. Puissant dans les deux aspects, d'une puissance qui se ressent plus qu'elle ne se met en mots.


Les 5 Terres T.7-9/? - Lewelyn et Jérôme Lereculey

Début du deuxième cycle, centré cette fois sur les primates, et c'est toujours aussi excellent. C'est somptueux graphiquement, personnages comme décors, et le récit est riche et dense tout en parvenant à être limpide et bien équilibré entre ses différents fils, ce qui est une vraie prouesse.
Excellent



Space Brothers T.39-41/? - Chûya Koyama

Il n'y a pas un tome, pas un chapitre, pas une page qui soit un ton en dessous dans ce manga, tout est excellent. Et le petit clin d'oeil, le bouclage de la boucle, du tome 41 est admirable.