Le Monde inverti, Christopher Priest, 1974, 388 pages
« J'avais atteint l'âge de mille kilomètres. »Et à cet âge, équivalent d'une certaine majorité, Helward Mann peut enfin sortir de la crèche et intégrer une des prestigieuses guildes qui régissent la vie et l'avancée de la ville. La Ville pourrait-on même dire, pour cette cité unique en son genre qui doit sans cesse se déplacer. Helward aura d'ailleurs l'occasion de voir au plus près les mécanismes à l'oeuvre, lui qui fait partie des privilégiés qui ont le droit d'aller à l'extérieur, et de peut-être comprendre les raisons derrière ce mouvement incessant.
Le Monde inverti est l'un des tout premiers romans de Christopher Priest. Et ça se sent, tant il dépareille de la majorité des oeuvres ultérieures de l'auteur. Au-delà des caractéristiques que j'associe à son époque d'écriture - de taille moyenne, compact, avec des chapitres courts, allant à l'essentiel -, c'est surtout un roman qui propose un déroulé globalement plus concret et palpable que le 'flou' habituel de l'auteur ainsi qu'une résolution relativement claire - relativement car la visualisation demandera peut-être une aide extérieure, mais la compréhension restera accessible quoiqu'il en soit.
Dans le même temps, Le Monde inverti tend déjà indéniablement vers les préoccupations habituelles de Christopher Priest, particulièrement sur la notion de réalité. Et si je parle d'un déroulé concret, il faut souligner que le roman repose tout de même sur un unique mystère - "pourquoi la ville doit-elle se déplacer ?", qui entraîne la question "quel est ce monde ?" -, assez dingue et renversant, qui nécessite de vivre l'aventure au rythme du personnage principal pour réellement l'envisager. Une réussite pour un roman 'simple' et efficace qui pourra plaire même à celleux qui n'ont pas d'atomes particulièrement crochus avec Christopher Priest.
Couverture : Manchu / Traduction : Bruno Martin
D'autres avis : Lorhkan, Brize, ...