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mardi 7 juin 2022

Christopher Priest - Le Monde inverti

Le Monde inverti, Christopher Priest, 1974, 388 pages
« J'avais atteint l'âge de mille kilomètres. »
Et à cet âge, équivalent d'une certaine majorité, Helward Mann peut enfin sortir de la crèche et intégrer une des prestigieuses guildes qui régissent la vie et l'avancée de la ville. La Ville pourrait-on même dire, pour cette cité unique en son genre qui doit sans cesse se déplacer. Helward aura d'ailleurs l'occasion de voir au plus près les mécanismes à l'oeuvre, lui qui fait partie des privilégiés qui ont le droit d'aller à l'extérieur, et de peut-être comprendre les raisons derrière ce mouvement incessant.

Le Monde inverti est l'un des tout premiers romans de Christopher Priest. Et ça se sent, tant il dépareille de la majorité des oeuvres ultérieures de l'auteur. Au-delà des caractéristiques que j'associe à son époque d'écriture - de taille moyenne, compact, avec des chapitres courts, allant à l'essentiel -, c'est surtout un roman qui propose un déroulé globalement plus concret et palpable que le 'flou' habituel de l'auteur ainsi qu'une résolution relativement claire - relativement car la visualisation demandera peut-être une aide extérieure, mais la compréhension restera accessible quoiqu'il en soit.

Dans le même temps, Le Monde inverti tend déjà indéniablement vers les préoccupations habituelles de Christopher Priest, particulièrement sur la notion de réalité. Et si je parle d'un déroulé concret, il faut souligner que le roman repose tout de même sur un unique mystère - "pourquoi la ville doit-elle se déplacer ?", qui entraîne la question "quel est ce monde ?" -, assez dingue et renversant, qui nécessite de vivre l'aventure au rythme du personnage principal pour réellement l'envisager. Une réussite pour un roman 'simple' et efficace qui pourra plaire même à celleux qui n'ont pas d'atomes particulièrement crochus avec Christopher Priest.

Couverture : Manchu / Traduction : Bruno Martin
D'autres avis : Lorhkan, Brize, ...

vendredi 10 juillet 2020

Christopher Priest - L'Été de l'infini

L'Été de l'infini, Christopher Priest, 1970-2013, 476 pages

L'Été de l'infini est avant tout un recueil de 12 nouvelles - dont l'éprouvante La Tête et la Main que je n'ai pas relu - comprenant 4 textes inédits. Tout commence parfaitement avec le bijou qu'est la nouvelle éponyme. Tout se termine presque aussi bien avec la très bonne "Errant solitaire et pâle". Deux touchantes nouvelles, sensibles et humaines, agrémentées de voyage dans le temps - kind of. Valent-elles à elles-seules la lecture du recueil ? Dure question.

Entre ces deux sommets, Christopher Priest fait du Christopher Priest, poursuivant ses thématiques habituelles (le réel, la vérité, l'art, la magie, ...) dans des textes plus ou moins agréables, d'une échelle de "bien" à "euh ?" pour une moyenne de "ok". Cela manque globalement de satisfaction finale et n'arrive jamais au niveau, même de loin, des deux nouvelles citées plus haut, confirmant que ça a bien du mal à matcher entre l'auteur et moi.

Mais L'Été de l'infini n'est pas qu'un recueil de nouvelles puisque le dernier tiers de l'ouvrage offre deux interviews de Christopher Priest par Thomas Day (une de 2005 précédemment publiée dans Bifrost, une deuxième inédite de 2015) ainsi qu'un essai de l'auteur sur l'adaptation de son livre Le Prestige par Christopher Nolan. Un ajout fort intéressant, même s'il est parfois un peu troublant de voir à quel point l'auteur - qui a vu les Beatles au Cavern Club en 1962, excusez du peu - semble avoir une haute estime de lui-même et des idées bien arrêtées. Cela a au moins le mérite de ne pas être banal. Et puis, peut-on vraiment reprocher quelque chose à quelqu'un qui met plusieurs fois en avant l'excellent Pavane de Keith Roberts ?

L'Été de l'infini est un ouvrage fondamentalement priestien qui ne bouleversera pas les opinions déjà faites. C'est certainement un indispensable pour tous les fans de Christopher Priest, et un conseil avisé pour tous ceux qui voudraient découvrir le volet "nouvelles" de l'auteur, ne serait-ce que par la présence de deux petites pépites.

Couverture : Aurélien Police / Traduction : Pierre-Paul Durastanti, Henry-Luc Planchat, Marianne Leconte, Michelle Charrier, France-Marie Watkins, M. Mathieu
D'autres avis : Lune, Le chien critique, Acr0, ...
Anecdote : Livre "gagné" - ou volé, selon le point de vue - il y a quelques années chez Lune, merci à elle et au Bélial'.

vendredi 11 septembre 2015

Christopher Priest - La Tête et la Main

La Tête et la Main, Christopher Priest, 1971, 25 pages (pdf).

La nouvelle gratuite du mois de septembre offerte par Le Bélial' est La Tête et la Main, une nouvelle de Christopher Priest, à télécharger ici, à l'occasion de la sortie d'un recueil de nouvelles de l'auteur, L'Été de l'infini.

Handicapé, Todd est aidé dans sa vie de tous les jours par Edward et aimé par Elisabeth. Artiste convalescent depuis plusieurs années, il va revenir sur scène pour une nouvelle représentation.

La Tête et la Main est un récit étrange, dans un style qui évoque tout à fait Christopher Priest même s’il est bien plus simple que ses romans. Plus qu’étrange, il est dérangeant. Traitant de la surenchère de l’industrie du spectacle et du voyeurisme de ses spectateurs, il plonge le lecteur dans cette position de voyeur. Au risque de le mettre fortement mal à l’aise devant la violence du spectacle.

Même si le but est louable et que le texte est efficace, il n’en reste pas moins un sentiment désagréable à la fois pendant la lecture et une fois celle-ci achevée. Une nouvelle qui oscillera donc entre le bon et le mitigé selon le ressenti du lecteur.

mercredi 25 septembre 2013

Christopher Priest - Le Prestige

Le Prestige, Christopher Priest, 1995, 409 pages.

Je garde un souvenir mitigé de ma découverte de Christopher Priest avec La Séparation. Mais comme une lecture n'est pas suffisante pour se faire un avis définitif, il me fallait réessayer. Alors quand j'ai entendu parler en bien du film Le Prestige, forcément, en toute logique, cela m'a donné envie de lire le livre.

Ah, la magie. Un thème sympathique, même si les grandes illusions, la magie la plus développée ici, n'est pas vraiment ma tasse de thé. Le défi de faire de la magie le centre d'un roman, c'est de réussir à en parler sans trop en dévoiler (pour moi, la magie doit rester mystérieuse), mais tout en étant tout de même pas complètement flou. Et si vous voulez comprendre concrètement ma dernière phrase, lisez Le Prestige, puisque Christopher Priest réussit ça parfaitement.

Pour le reste, je ne sais pas si je peux le dire après seulement deux lectures, mais Priest fait du Priest. J'ai été assez impressionné par le nombre de points communs et parallèles que j'ai pu faire entre Le Prestige et La Séparation. Que cela soit la thème de la gémellité, la manière d'encadrer le récit sous la forme de livres dans le livre ou bien le doute constant sur le vrai et le faux, j'ai vraiment l'impression que l'auteur a des sujets qui l'obsèdent. Et puis, il y a ce style très consistant, l'impression d'avoir devant soit un bloc.

J'ai préféré Le Prestige à La Séparation. L'histoire m'a semblé plus complète et moins flou (ce qui peut s'expliquer par le thème du doute qui est moins majeur dans ce roman). À froid et objectivement, j'apprécie la gestion du récit et la capacité de l'auteur à tout emmêler et à faire réfléchir. Mais dans le feu de l'action et en terme de plaisir pur, je ne m'y retrouve pas. Passer tout un roman à se demander "Pourquoi ?" (que ce soit pour de petits détails, ou pour trouver un but global au récit), ça peut passer. Mais le refermer en se demandant toujours "Pourquoi ?", c'est gênant. J'ai toujours l'impression qu'il manque une partie, ou du liant. Christopher Priest n'a pas l'air fait pour moi.

mardi 9 juillet 2013

Christopher Priest - La Séparation

La Séparation, Christopher Priest, 2002, 455 pages.

J'avais lu la chronique d'AcrO il y a quelques temps, ainsi que quelques autres par-ci par-là. Alors, malgré la référence au Maître du Haut Château qui me faisait un peu peur, je me suis lancé. Et la comparaison avec l'oeuvre de Philip K. Dick est justifié. Malheureusement pour moi, qui en garde quelques réticences.

Tout d'abord, il me faut parler de la structure du récit. Tout commence en 1999, avec Stuart Gratton, historien et auteur, qui s'intéresse à un dénommé Sawyer qui aurait eu un impact pendant la seconde guerre mondiale. Le roman comporte deux petites parties avec Stuart Gratton, qui permettent d'introduire et de justifier la présence des autres éléments du récit, qui sont des mémoires et des extraits d'autres livres. C'est très intelligent, car ça donne un véritable liant à l'ensemble. Je ne pense pas que cela fonctionnerait aussi bien sans cela.

L'histoire en elle-même se déroule entre 1936 et 1945. Sur fond de seconde guerre mondiale donc. Plus que sur fond d'ailleurs. L'ensemble du livre apparaît véritablement comme un roman historique, très bien documenté. C'est vraiment troublant, surtout quand de petites distorsions viennent s'insérer dans l'Histoire (avec son lot de remises en question : "hum, j'ai trop dormi en cours d'Histoire ?"). On se retrouve dans une uchronie.

Uchronie ? Ou uchronies ? Je ne saurais pas répondre. C'est un flou permanent qui se déroule devant nous, avec de nombreux éléments contradictoires, apportés par les différentes sources que nous pouvons être amenés à lire. D'un côté, j'ai bien aimé ce doute qu'apporte l'auteur, qui porte à réfléchir sur ce qu'est la réalité ou comment les choses peuvent facilement basculer.

Mais d'un autre côté, j'ai un problème : il me manque quelque chose sur quoi me reposer une fois le livre terminé. Je ne demande pas une solution complète et détaillée du problème, mais au moins une petite idée. Un problème de rationalisation de ma part j'en conviens. Le flou permanent est un peu trop permanent. De plus, alors que d'autres l'ont célébrée, je n'ai absolument pas aimé la fin. Ou tout du moins ce que j'en ai compris, puisque je veux bien supposer ne pas avoir tout saisi.

Au final, c'est un avis mitigé. La structure et les idées développées sont superbes (et je ne suis pas entré plus en détail sur le concept de séparation, qui est exprimé de multiples manières), mais j'ai un goût d'inachevé en bouche. Un soupçon de "au final, tout ça pour quoi ?". Je veux bien croire que cela vienne de moi, alors n'hésitez pas à le tenter !