lundi 25 septembre 2023

Emily St. John Mandel - L'Hôtel de verre

L'Hôtel de verre, Emily St. John Mandel, 2020, 398 pages
« Et si vous avaliez du verre brisé ? »
C'est le graffiti qui apparait un soir sur une vitre de l'hôtel Caiette, un hôtel de luxe isolé sur une île de la région de Vancouver. Un graffiti qui perturbe les rares touristes de l'établissement tout comme les employés, Vincent la barmaid en tête mais aussi Paul, l'homme à tout faire, son demi-frère. Un graffiti qui semble destiné au propriétaire de l'établissement, le riche homme d'affaires Jonathan Alkaitis.

L'Hôtel de verre est un livre extrêmement difficile à résumer. Le pitch ci-dessus n'est pas vraiment le début du roman mais est surtout l'élément le plus saillant du récit, ce qui se rapproche le plus d'un élément perturbateur permettant de lancer l'intrigue. Sauf que l'intrigue n'évolue en fait pas particulièrement à partir de ce point, parce qu'elle n'existe pas réellement. L'Hôtel de verre est plus une addition de tranches de vies. De vies brisées.

L'Hôtel de verre n'est pas un mauvais roman. Il est dynamique, sautant de personnage en personnage, et se lit très facilement. Ce n'est pas inintéressant, je n'ai pas passé un mauvais moment, mais je ne l'ai pas non plus trouvé particulièrement intéressant. J'aurais pourtant voulu l'aimer, mais je l'ai surtout trouvé désespéramment vide. Il ne crée ni surprise ni empathie, il ne s'y passe rien. Après mes réserves concernant Station Eleven - roman avec lequel il partage le même manque d'étincelle et d'excitation - Emily St. John Mandel ne semble définitivement pas une autrice pour moi.

Couverture : © Getty images / Traduction : Gérard de Chergé
D'autres avis : Yuyine, Lune, Le Maki, Le nocher des livres, Zina, ...

mardi 19 septembre 2023

Martin Page - Je suis un dragon

Je suis un dragon, Martin Page, 2015, 278 pages

Margot est une jeune fille normale en apparence. Solitaire certes, mais rien qui ne la fasse réellement sortir du lot. Sauf que Margot a un secret qu'elle est bien déterminée à cacher : elle est indestructible, son corps ne peut pas être blessée. Mais aucun secret, surtout de cette importance, ne peut rester indéfiniment dissimulé
« - Oui, tu es un monstre. Comme pas mal de gens. Mais toi, tu es un gentil monstre.
Et Janet Xanadu pensa à elle-même, à son absence de vie sociale et sentimentale, à son attirance pour la folie et le désordre, à sa conviction que les être les plus bizarres et hors normes représentaient davantage l'universel que ceux qui entraient dans la norme.
»
Je suis un dragon reprend le thème classique de l'apparition et du développement d'un super-héros et en propose une version aussi crédible que possible, entre honnêteté et manipulation, entre popularité et haine. S'il ne s'agit pas d'un roman de super-héros à la DC/Marvel, plein de menaces universelles et de combats épiques, ce n'est pas pour autant juste un décor pour un roman de littérature blanche. Il est évidemment question, sous la figure super-héroïque, d'humanité et de normalité - comme la majorité des ouvrages de science-fiction - mais la question du super-héros, sa gestion et son impact, est aussi une part importante du roman.

On ne peut même pas dire qu'il y a un aspect métaphorique tant il est clair que l'anormalité de Margot permet de parler de l'anormalité de tout un chacun, et de la difficulté de trouver sa place dans le monde. Un caractère explicite, une clarté, que j'ai trouvé très agréable et qui n'empiète pas sur un récit prenant basé pourtant essentiellement sur l'évolution du personnage de Margot. Un personnage fondamentalement bon et gentil pour un roman globalement à son image. Il pourrait presque paraitre un peu gentillet par moment, notamment au début, mais il cache en fait de véritables accès de violence et un effet d'ensemble loin d'être mièvre, tout en conservant une certaine aura de douceur et en dégageant quelque chose de réconfortant. Un très bon roman.
« Margot raconta une vie d'abandon, de trahison et de coups. Factuellement elle mentait, mais émotionnellement elle disait la vérité. L'imagination est parfois ce qui rend le mieux compte de la réalité. »
Couverture : Sandrine Bonini et Merwan
D'autres avis : ...

mercredi 13 septembre 2023

P. Djèli Clark - Le Mystère du tramway hanté

Le Mystère du tramway hanté, P. Djèli Clark, 2019, 101 pages

Égypte uchronique, où les djinns sont une présence quasi-normale, début du XXème siècle. Hamed et Onsi sont deux agents du ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles. Ils sont appelés pour traiter le cas d'une rame de tramway hantée par une mystérieuse présence - oui, le titre est vraiment très explicite.

Le Mystère du tramway hanté est une novella se déroulant dans le même univers que L'Étrange affaire du djinn du Caire et Maître des djinns. Elle se déroule chronologiquement entre ces deux textes, même si elle peut autant se lire en découverte de l'univers qu'après la lecture des deux autres récits - la preuve. P. Djèli Clark y développe une nouvelle fois son monde légèrement uchronique où des entités surnaturelles ont ouvertement pris place sur Terre, changeant quelque peu les rapports de force et les évolutions de la société.

Le Mystère du tramway hanté est une bonne novella. C'est une enquête simple, sans rien d'époustouflant, mais qui permet de revenir avec joie dans un univers appréciable et de côtoyer de sympathiques personnages. Et un bon moment, ça ne se refuse pas.

Couverture : Stephan Martinière / Traduction : Mathilde Montier
D'autres avis : Sabine, L'ours inculte, Jean-Yves, Célinedanaë, Le nocher des livres, Apophis, Elessar, lutin82, Marc, Boudicca, ...

jeudi 7 septembre 2023

Bulles de feu #53 - Août 2023

Un petit récapitulatif de mes lectures BDs/mangas/comics du mois, pour en garder une trace.
Le classement est absolument imparfait, insatisfaisant et un peu aléatoire mais peut donner un ordre d'idée. Les avis sont (ultra)brefs, n'hésitez pas à demander un complément d'informations en commentaire si nécessaire.

Bien / Ok / Correct


Terukan Boys - Yû Nakahara

Une bonne petite histoire qui tient la route, sur notamment le passage à la vie d'adulte, mais qui aurait mérité de compter 2-3 tomes pour être pleinement développée.


March comes in like a lion T.3-4/16 - Umino Chica

Deux nouveaux tomes qui laissent un sentiment aussi mitigé et étrange que les deux premiers : c'est parfois ennuyant et exubérant pour pas grand chose (même si j'imagine que ça peut servir à contrebalancer l'amoncellement de drames que recèle ce manga), parfois prenant comme un bon manga de sport.


Soloist in a cage T.1/3 - Shiro Moriya

Un manga sombre et violent, quasiment un battle royale, porté surtout par son dessin qui arrive à être parfois lumineux dans toute cette noirceur.


Nettoyage à sec - Joris Mertens

Une BD qui commençait très bien, des personnages qui sonnaient vrais, une vraie patte dans le dessin (surtout dans les pleines pages), une attente qui montait comme un thriller... et puis ça se termine brutalement, de manière assez désespérante à tout point de vue.


Speed Ball - Florian Pigé et Étienne Gerin

Un récit loufoque et assez violent/trash qui n'est pas ce que je préfère mais ça reste correct, porté surtout par l'ambiance graphique Funky Cops/Tyler Cross sous acide.
Très bien


La Dernière Reine - Jean-Marc Rochette

Une très bonne BD "à la Rochette", peut-être un chouïa moins marquante que "Ailefroide Altitude 3954" et "Le Loup" mais néanmoins captivante de bout en bout. Un hymne à la nature et à la bêtise humaine qui ravira les misanthropes.


L'Attaque des titans T.20-22/34 - Hajime Isayama

La fin de la première grande partie du manga avec d'énormes révélations qui ne déçoivent pas.


Les Chimères de Vénus T.1-2/3 - Alain Ayroles et Étienne Jung

Une très bonne surprise que cette histoire dans l'univers du "Château des étoiles" d'Alex Alice. Proche et différent de "l'original" tout à la fois, mais parfaitement dans l'esprit. Une solide aventure très plaisante.

vendredi 1 septembre 2023

Guy Gavriel Kay - Les Chevaux célestes

Les Chevaux célestes, Guy Gavriel Kay, Tome indépendant 1/2 des Chevaux célestes, 2010, 650 pages

Fils d'un grand général Kitai décédé, Shen Tai a décidé de porter le deuil en enterrant les cadavres des soldats morts autour du lac de Kuala Nor, lieu d'une gigantesque bataille. Pour gratifier sa bravoure et l'honneur de son acte, l'impératrice des Tagur, la nation ennemie, décide de lui offrir 250 chevaux sardiens, la plus grande richesse possible pour un Kitai. Un cadeau généreux mais empoisonné car il met Shen Tai au centre de toutes les attentions.

Les Chevaux célestes est un roman de Guy Gavriel Kay. C'est un résumé presque suffisant pour quiconque a déjà lu un livre de l'auteur tant sa plume et son travail sont uniques et particuliers. C'est seulement ma deuxième incursion dans sa bibliographie (après l'excellent Les Lions d'Al-Rassan) et j'y ai pourtant déjà retrouvé toutes ses qualités.

Ainsi Les Chevaux célestes est un livre prenant, une brique qui se dévore sans peine, qui est minutieusement détaillé mais qui garde pourtant toujours un rythme entraînant. Un livre dont la trame est logique et implacable, où chaque pièce s'imbrique parfaitement, mais qui ne l'empêche jamais de conserver la saveur de la surprise. Et au-dessus de tout cela, au-dessus de ce récit dans les hautes sphères fait de manigances et de secrets où les discussions sont l'arme la plus dangereuse, se tient la qualité première de l'auteur : ses personnages, charismatiques, raisonnés et complets.

Les Chevaux célestes n'est pas exempt de quelques défauts, comme la surprésence de romance et de sexe ou le fait qu'un des fils narratifs - celui de Li-Mei - soit un peu plus faible, ou en tout cas un peu moins bien intégré. Mais ce sont des points de détails au regard de l'ensemble qui donne envie de se plonger dans les pages Wikipédia consacrées à la dynastie Tang et à la révolte d'An Lushan. Car c'est là tout le génie de Guy Gavriel Kay : en plus de proposer un roman tout à fait plaisant et dépaysant en soi, celui-ci est en plus inspiré de périodes et faits historiques - la Chine du VIIIème siècle en l'occurrence. Et c'est passionnant. Guy Gavriel Kay est incontestablement l'empereur de la fantasy historique.

Couverture : Larry Rostant / Traduction : Mikael Cabon
D'autres avis : L'ours inculte, Lorhkan, Xapur, Apophis, Boudicca, Acr0, lutin82, , ...