mardi 29 septembre 2020

Bulles de feu #27 - Auteurs classiques

Voyage au centre de la Terre, Jules Verne & Norihiko Kurazono, série terminée en 4 tomes, 2015-2017, 214/214/192/232 planches

Voyage au centre de la Terre est une adaptation de la célèbre oeuvre de Jules Verne en une série de 4 mangas qui, de ce que j'ai pu comparer, retrace fidèlement la descente d'Axel et Otto Lidenbrock dans les entrailles de notre planète suite à la découverte d'un vieux parchemin islandais indiquant un point d'entrée dans un volcan éteint, le Sneffels. Et c'est fort agréable à suivre, prenant, surprenant et doté d'un bon rythme. D'autant plus que le cadre se prête particulièrement bien à être mis en image, avec son lot de surprises et de grandeurs visuelles, et facilite peut-être davantage la suspension d'incrédulité.

Sous réserve de ne pas être allergique à quelques extravagances typiquement mangaesques, particulièrement dans quelques réactions, Voyage au centre de la Terre est un très bon moyen de découvrir facilement et rapidement ce classique, ou de le redécouvrir d'une nouvelle manière.

Neuvième escale, dans un lieu souterrain ou sous-marin, pour le #DéfiCortex

Les Zola, Méliane Marcaggi et Alice Chemama, 2019, 110 planches

Comme son titre l'indique, Les Zola conte la vie d'Émile Zola, mais pas que. En plus du célèbre auteur, la BD s'attarde à présenter les deux amours de sa vie, Alexandrine, sa femme, et Jeanne, sa maîtresse, en se concentrant à parts égales sur les trois personnages. Car si les oeuvres d'Émile Zola gardent encore aujourd'hui une grande modernité, sa vie l'était tout autant.

Les Zola est un très intéressant ouvrage pour quiconque s'intéresse ou veut s'intéresser à(ux) Zola. Malgré une période de 40 ans - de la rencontre entre Émile et Alexandrine jusqu'après la mort de l'auteur - à retranscrire en une centaine de planches, le récit ne donne jamais l'impression de simplement survoler leurs vies et parvient, grâce à un rythme fort bien maitrisé, à être passionnant et satisfaisant de bout en bout. Avec en prime un dessin très joli, quelque peu pastel et aux accents impressionnistes, collant parfaitement à l'époque et à l'entourage de l'auteur. Une triple biographie très réussie.

Quelques planches ici.

mercredi 23 septembre 2020

Emmanuel Brault - Walter Kurtz était à pied

Walter Kurtz était à pied, Emmanuel Brault, 2020, 243 pages

« La route dessinait notre futur, qui tiendrait tout entier en une règle : avancer, toujours. »
Dany et Sarah vivent avec leur père, parcourant le monde dans leur Peugeot 203. Ce sont des Roues, une humanité liée corps et âme à l'automobile, ne vivant plus que pour rouler, pleinement épanouie. Mais tous les hommes ne sont pas des Roues. Il existe aussi des Pieds, vivant en communauté sédentaires, une engeance haïe par les Roues pour les accidents de la route qu'elle peut provoquer.

Walter Kurtz était à pied était un ouvrage étonnant, déroutant, qui vaut tant dans la métaphore évidente qu'il propose que par son aspect premier degré, satisfaisant en soi - et ce même si on n'est pas porté sur les voitures. Emmanuel Brault n'assène pas, ne prêche pas, il déroule et conte un monde si différent et si proche à la fois.

L'intrigue est mince - mais suffisante - l'ouvrage étant plus l'exposé d'une dégénérescence qu'un véritable récit classique. Cela importe peu car tout fonctionne, dans une montée en puissance de plus en plus crue et violente qui captive du début à la fin. Walter Kurtz était à pied est assurément une route à emprunter.
« Nous avions choisi cette vie à courir le k-plat. Nous sentions combien cela était dérisoire, mais il nous semblait encore plus dérisoire de demeurer dans la même maison une vie durant. Il y avait tant de routes ! »
Couverture : Kévin Deneufchatel
D'autres avis : Gromovar, Yogo, ...

jeudi 17 septembre 2020

Zygmunt Miloszewski - Te souviendras-tu de demain ?

 
Te souviendras-tu de demain ?, Zygmunt Miloszewski, 2017, 546 pages

« - Une meilleure version de l'Histoire ?
Ludwik grimaça. L'histoire de l'humanité démontrait que les changements et les alternatives étaient rarement meilleurs, dans les cas les plus favorables, ils étaient aussi sanglants et dénués de sens que les originaux.
»
En 2013, Ludwik et Grazina fêtent leur cinquantième anniversaire de mariage. Le lendemain matin, ils se réveillent 50 ans plus tôt, en 1963, dans leurs corps de l'époque et une situation presque identique à ce qu'ils ont connu. Presque. Car dans cette version de l'Histoire, la Pologne n'est pas membre du bloc de l'Est mais est une proche alliée de la France, entre autres.

Te souviendras-tu de demain ?
est à la fois une uchronie historique et une uchronie personnelle. Cette dernière peut sembler la plus centrale à la lecture mais la première est toujours là en filigrane, essentielle à la vie des deux protagonistes, dans un mariage très réussi. Les deux aspects sont forts intéressants et sont surtout un terreau fertile pour les bonnes réflexions de l'auteur.

Passé un démarrage assez déstabilisant, très axé sexualité - de manière intéressante et rare, néanmoins -, le livre trouve ensuite son rythme de croisière dans une atmosphère qui n'est pas sans rappeler Stephen King (particulièrement 22/11/63) : il ne se passe pas grand chose, on s'attarde beaucoup à décrire le cadre et la société, et c'est pourtant captivant.

Te souviendras-tu de demain ? ne réinvente pas la roue et traite toutes les - nombreuses - thématiques habituelles de l'uchronie. Mais il le fait très bien. Avec en prime un petit goût exotique pour le lecteur puisque tout est centré sur la Pologne - et un amusement supplémentaire pour le lecteur français puisque la France est elle aussi omniprésente. Un très bon livre qui sonne juste de bout en bout.

Photo de couverture : Elliott Erwitt / Traduction : Kamil Barbarski
D'autres avis : Lune

samedi 12 septembre 2020

Laurent Genefort - Colonies

Colonies, Laurent Genefort, 2019, 315 pages
« On dit que l'on trouve une plus grande variété végétale aux abords des astroports.
- Parce que les équipages en transit transportent à leur insu des graines et des spores d'autres mondes ?
- Parce que les gens croient justement ça ; ils regardent mieux la nature autour des pistes et découvrent des espèces qu'ils n'avaient même pas remarquées devant leur propre maison.
- C'est vrai ?
- Que l'on trouve davantage de types de plantes ? Une légende, hélas. Les légendes sont ce qui pousse le mieux au pied des astroports. »

Colonies est un recueil de 10 nouvelles présentant chacune une... colonie. Le recueil est divisée en deux parties : la première présente 5 colonies planétaires tandis que la seconde évoque 5 colonies spatiales. C'est dans cette dernière que se trouvent T'ien-Keou et La Fin de l'hiver, offertes précédemment par Le Bélial'.

Colonies est un bon recueil. Sans être extraordinaire ou comporter des pépites incontournables, il a déjà l'énorme qualité de ne faire aucune fausse note, l'ensemble des textes étant agréables - même si Le Bris et Le Jardin aux mélodies (dont l'excellent incipit ouvre ce billet) sont un peu frustrantes et auraient méritées d'être plus développées.

L'autre qualité du recueil, c'est sa diversité. Laurent Genefort multiplie en effet les angles d'approche et fait de chaque texte une entité bien discernable - jusqu'au très bel hommage/exercice de style Je me souviens d'Opulence - ce qui évite toute redondance à la lecture. Cela n'empêche évidemment pas l'auteur de conserver son style et d'axer ses récits tout autant, voire plus, sur les sociétés et lieux de vie où chaque nouvelle prend place que sur les personnages qui y évoluent - à l'exception notable de la novella L'homme qui n'existait plus qui clôt l'ouvrage et prend des accents bien plus thriller qu'à l’habitude. Un bon recueil.

Couverture : Manchu
D'autres avis : Tigger Lilly, Lune, Célindanaé, Lullaby, ...


Troisième escapade galactique pour le Summer Star Wars IX

lundi 7 septembre 2020

Émile Zola - L'Oeuvre

L'Oeuvre, Émile Zola, Tome 14/20 des Rougon-Macquart, 1886, 489 pages

Claude Lantier est peintre. Avec un petit groupe d'amis artistes, il se bat pour percer à Paris. Mais son style différent des standards académiques et son perfectionnisme compliquent la tâche. Sa rencontre avec Christine, jeune femme croisée par hasard et dont le corps l'obsède, peut-elle changer la donne ?

Je ne divulgâcherai rien en indiquant que L'Oeuvre est un récit tragique, Émile Zola oblige. Bien que la première moitié soit globalement positive, la seconde est une descente aux enfers inéluctable où Claude se noie dans ses obsessions, entrainant son entourage avec lui. Si le dernier tiers est parfois un peu longuet, car nul espoir n'est permis, et malgré de nombreuses considérations artistiques certainement très intéressantes mais un peu pointues - L'Oeuvre conte les débuts du mouvement impressionniste, Émile Zola s'inspirant de son propre groupe d'amis et se mettant même très explicitement en scène sous les traits du personnage de Sandoz - le tout se lit étonnamment bien.

Zola a une écriture très visuelle et une certaine simplicité dans sa manière de raconter les choses, de ne pas trop en faire, qui ne rend pas le tout aussi déprimant qu'il pourrait être et garde un côté plaisant. En plus de quelques considérations très modernes, que cela soit pour l'époque ou pour l'écho qu'elles peuvent encore avoir aujourd'hui. Une bonne surprise.

Couverture : Édouard Manet
Lecture commune avec la Zolerie, Tigger Lilly et Alys, merci à elles pour l'invitation et la motivation !

mercredi 2 septembre 2020

Eric Brown - Les Ferrailleurs du cosmos

Les Ferrailleurs du cosmos, Eric Brown, 2013, 265 pages

Ed et Karrie naviguent dans l’espace à bord du Loin de chez soi, à la recherche d'épaves à remorquer et revendre. Leur rencontre avec Ella, une IA - ayant l'apparence d'une somptueuse jeune femme - poursuivie par des drones-araignées, va quelque peu changer leurs habitudes et leurs prochaines aventures.

Les Ferrailleurs du cosmos est un fix-up de 11 nouvelles dont l'assemblage forme un réel roman de 11 chapitres dont la satisfaction générale est certainement supérieure à la qualité individuelle de chaque texte. Labellisé pulp, c'est un récit simple où se multiplient les rencontres extraterrestres et les planètes à explorer. Intelligemment, Éric Brown joue avec les clichés du genre et leur apporte de la modernité en ayant conscience de leur limite et nocivité, en plus d'insérer quelques réflexions sur la vie et la conscience.

Malheureusement je suis resté globalement à l'écart de ce voyage. C'est lisible sans peine, mais ça n'a jamais réussi à m'emballer et à m'intéresser aux enjeux de la majorité des épisodes. La simplicité est l'une des bases du pulp, mais cela a été pour le coup, pendant trop longtemps, trop simple et répétitif pour moi, même s'il faut noter que la qualité va en grandissant et que les derniers chapitres sont plus intéressants.

Couverture : Philippe Caza / Traduction : Erwann Perchoc & Alise Ponsero
D'autres avis : Lorhkan, FeydRautha, TmbM, Anudar, Herbefol, Célindanaé, Marc, ...

Deuxième escapade galactique pour le Summer Star Wars IX