Le chiffre 4 serait-il maudit ? Car si les trois quadrilogies suivantes ont des qualités, aucune n'atteint un vrai sommet de perfection. Pire : on se retrouve même déçu de leurs potentiels non-utilisés.
Spoiler Alert : Lupano s'en sort mieux que les autres, évidemment.
Le Soufflevent, Andoryss et Xavier Collette, 2014-2017, 45/46/46/46 planches.
Le Soufflevent, c'est avant tout un bon point de départ : dans un monde typé fantasy, une jeune fille (et son chat ailé !) cherche à échapper à des militaires qui souhaite lui prendre la création de son père, le soufflevent, étrange "chose" qui contrôlerait le pouvoir des vents. Le tout promet de l'aventure et du voyage, surtout si on en croit la carte présente au début de chaque volume et les différents titres des tomes. Mais...
Mais ça ne décolle jamais. L'aventure et le voyage sont limités à leur minimum, et le plus souvent entre les tomes, dans des parties que l'on ne voit pas. J'ai vraiment eu l'impression de lire toutes les moments inintéressants de l'histoire, les parties figées. Et en parlant de "figer", si le dessin est plutôt joli, je l'ai trouvé trop statique à mon goût.
Dommage, ça aurait pu être bien.
L'Expert, Frank Giroud et Brada, 2003-2007, 46/46/46/54 planches.
L'Expert nous propose une enquête historico-religieuse, entre la Lithuanie du XVème siècle et notre époque. Dis comme ça, ça peut faire peur, mais c'est intéressant et l'aspect complot religieux n'est que peu présent. Il faut certes mieux aimer le genre, mais ça se lit bien.
Sauf que ça part un peu en cacahuètes dans le dernier tome. Bon, s'il n'y avait que ça, on aurait pu le mettre sur le compte de la collection et s'en accommoder. Ce qui passe moins, c'est les innombrables récapitulatifs et ré-explications : j'apprécie qu'on veuille bien poser les choses pour que tout le monde ait compris, mais trop c'est trop. Dois-je considérer qu'on me prend pour un parfait idiot ?
Ça aurait pu faire une bonne trilogie, ça n'est qu'une quadrilogie un peu décevante. Et si jamais vous le lisez un jour, prévenez moi si dans votre quatrième tome la Lada verte annoncée dans une bulle est bien verte. Parce que chez moi, elle était rouge...
L'Assassin qu'elle mérite, Wilfrid Lupano et Yannick Corboz, 2010-2016, 54/56/54/46 planches.
« C'est ça qu'il faudrait faire : créer de toutes pièces un ennemi de la société à partir d'un être innocent ! (...) voilà qui serait une œuvre d'art subversive et véritablement décadente. Donner à cette odieuse société l'assassin qu'elle mérite ! »
C'est le point de départ de ce drame, car il n'y a pas d'autres mots pour qualifier cette histoire, où un riche rentier se joue d'un jeune homme pauvre et honnête. Et c'en est quasi-hypnotisant.
Le seul écueil de L'Assassin qu'elle mérite, qui est plus un double diptyque qu'une vraie quadrilogie, c'est de ne pas répondre exactement à sa promesse de départ : si les deux premiers tomes, qui se déroulent à Vienne, ont une réflexion sociétale, les deux derniers, qui se déroulent à Paris, se concentrent bien plus sur le microcosme des nos personnages principaux. Et c'en est un poil décevant, tant on aurait voulu en voir plus, avec une histoire encore plus impressionnante. La mise en garde se situait peut-être dans le titre de l'oeuvre...
Si la déception peut pointer le bout de son nez, L'Assassin qu'elle mérite reste une belle oeuvre, avec un scénario précis à la Lupano et un beau dessin de Corboz. Attention cela dit, ce n'est pas joyeux. Quant à la morale... Quelle morale ?