mercredi 30 avril 2014

Gail Carriger - Sans âme

Sans âme, Gail Carriger, Tome 1/5 du Protectorat de l'ombrelle, 2009, 313 pages.

Lors du démoniaque challenge My Summer of (SFFF) Love de Vert, j'ai pu lire au moins 42 chroniques enthousiastes du Protectorat de l'ombrelle. De quoi m'intriguer légèrement. Serais-je moi aussi capable de l'apprécier ? Dois-je affronter mes réticences face à cette lecture un peu girly ? Je n'ai peur de (presque) rien, à bas les clichés, j'ose lire de la bit-lit !

Londres, XIXème siècle. Le surnaturel cohabite avec les humains : loups-garous, vampires, fantômes sont de la partie. Et ils respectent l'étiquette. Époque victorienne oblige, les conventions sociales et les priorités sont quelque peu... différentes. Veuillez lever votre auriculaire quand vous buvez votre thé.

Le cadre est réussi, on s'y croirait. Tout comme le décalage entre les "créatures", qu'on associe plus facilement avec l'isolement et le sanguinaire qu'aux beaux habits et aux normes sociales, et l'univers. Cela offre une atmosphère unique (une fois que l'on a réussi à suspendre son incrédulité, ce qui est personnellement toujours plus difficile avec la bourgeoisie du XIXème siècle qu'avec bon nombre d'univers de science-fiction...).

Dans ce cadre, une histoire vite emballée. Alexia Tarabotti, une sans-âme, et Lord Maccon, un loup-garou, enquêtent sur la disparition de loups-garous et vampires isolés. Enfin, "enquêtent". Peu de péripéties au final, le problème se déclare et la résolution arrive peu de temps après, sans grand rebondissement.

Mais le plus important ne semble pas être cette histoire mais bien la romance entre Alexia Tarabotti et Lord Maccon. Je ne vous ferai pas de dessin. La bonne nouvelle, c'est qu'ils ne se tournent pas trop longtemps autour bêtement, on arrive rapidement là où on sait que cela doit arriver. À part ça, il faut apprécier le genre.

   Sans âme est un bon premier tome pour découvrir un univers particulier. Une lecture facile où toutes les avancées passent par les dialogues. Les paragraphes eux se cantonneront à des descriptions, principalement sur les bisous-bisous des deux personnages principaux ou sur les habits. Sans nier son côté charming, Sans âme reste, malgré une héroïne forte par certains aspects, destiné à un public averti.

Troisième participation au challenge SFFF au féminin

samedi 26 avril 2014

Régis Goddyn - Le Sang des 7 Rois, Livre trois

Le Sang des 7 Rois, Livre trois, Régis Goddyn, Tome 3/7 du Sang des 7 Rois, 2014, 404 pages.

Grâce aux couvertures de Yann Tisseron, c'est de loin que l'on repère un nouveau tome du Sang des 7 Rois (d'autant plus quand la couverture se noircit plus que d'habitude, chargée au départ mais finalement agréable). Après le Livre Premier et le Livre Deuxième, voici donc le... Livre Trois. Oui, je pensais moi aussi qu'après "premier" et "deuxième" venait "troisième", mais il semblerait que ce ne soit pas le cas. Troublant.

Une nouvelle fois, c'est un rapide résumé qui ouvre le livre. Une bonne chose puisque, pour une autre nouvelle fois, je n'ai pas énormément de souvenirs précis de la situation telle que je l'ai abandonnée. Petit à petit je retrouve mes marques. Et du plaisir. Il faudra tout de même 150 pages pour refaire le tour des différents personnages. Et en découvrir de nouveaux.

Cet amoncellement de situations différentes commence à poser quelques problèmes. Le principal, c'est que l'histoire n'avance pas énormément au terme de ce troisième tome, tant chaque personnage a peu de place pour s'exprimer. Le changement successif de point de vue est habituellement une chose que j'apprécie, pour le rythme que cela donne au récit. Mais ici, cela ne fonctionne pas aussi bien. Pour preuve, les parties que j'ai le plus appréciées sont celles qui s'attardent un peu plus longuement sur une situation, lui laissant le temps de se développer.

Autre conséquence, j'ai du mal à m'attacher aux personnages (j'en arrive à préférer les "méchants"...). Ils me semblent dans l'ensemble froid et parfois interchangeables. C'est un problème qui est même plus général. L'histoire a un côté un peu superficiel, comme si notre regard était toujours au-dessus mais ne venait jamais à l'intérieur même de l'intrigue, sous la surface. Pour le moment, je trouve que Le Sang des 7 Rois aurait mérité un développement à la Trône de fer : des chapitres plus longs, plus profonds, qui prennent le temps de découvrir les personnages et de leur faire vivre des péripéties.

Je peux sembler négatif, mais tout n'est pas sombre (et même si je suis particulièrement influençable, je ne dis pas ça parce que l'auteur cite la blogosphère dans ses remerciements, ce qui n'en reste pas moins très sympathique). C'est un roman agréable, qui se lit très rapidement. J'ai l'impression que l'écriture de Régis Goddyn a gagné en fluidité et en souplesse. On voyage désormais sur un rythme de croisière, sans grand rebondissement mais sans rien qui ne soit désagréable non plus. Du potentiel, c'est encore ce que je vois pour le moment. Mais pour la suite, j'en attends un peu plus. Que ça bouge un peu plus. Que le teasing du Livre Deuxième se dévoile quelque peu. Que cela décolle véritablement. J'y crois encore.

mercredi 23 avril 2014

Ursula Le Guin - Le Dit d'Aka & Le Nom du monde est forêt

Le Dit d'Aka / Le Nom du monde est forêt, Ursula Le Guin, 2000/1972, 310 pages.

Escale n°2 dans mon voyage dans l'Ekumen d'Ursula le Guin. Ou plutôt escales n°2 et n°3 puisque ce roman, Le Dit d'Aka, est suivi d'un autre court roman plus ancien, Le Nom du monde est forêt. Double dose de plaisir.

En commençant Le Dit d'Aka, j'étais content d'avoir déjà fait mon entrée dans le cycle avec La Main gauche de la nuit. Un peu compliqué et un peu brouillon comme début, où les situations politiques de la Terre, d'Aka et de l'Ekumen se mélangent. Et puis, après une vingtaine de pages, on se plonge tout entier sur Aka et la magie opère.

On suit Sutty, une Envoyé terrienne, sur Aka, une planète qui se veut ultra-moderne et tournée vers l'au-delà, quitte à supprimer et oublier son passé. On trouve, entre autres, deux axes de réflexion principaux. Sur un plan politique, le totalitarisme, qu'il soit religieux ou scientifique, et ses conséquences. À la fois via la situation d'Aka mais aussi via les souvenirs de Sutty concernant la Terre (et donc notre futur). Mais le thème principal, c'est la littérature. Ses rôles, ses pouvoirs. La transmission, le souvenir, le partage. Impossible de ne pas penser à Fahrenheit 451 tant leurs objectifs semblent identiques (tout comme le plaisir à les lire).

Le Dit d'Aka est une grande oeuvre et une lecture indispensable, comme l'est Fahrenheit 451. Elle représente pour moi l'essence de la science-fiction : aller voir ailleurs pour mieux nous questionner ici. Un questionnement multiple dont une large part est ici consacré à un sujet qui vous est forcément cher si vous lisez ceci : les livres et les histoires.
« Erreur. Elle n’aurait pas dû le remercier. Les remerciements appartenaient au registre du « discours servile ». Les formules honorifiques, les salutations, les demandes de permission et les expressions de fausse gratitude, tous ces fossiles de l’hypocrisie primitive étaient des obstacles à la franchise entre producteurs-consommateurs. C’est ce qu’elle avait appris, en ces termes, presque dès son arrivée. »
Le Nom du monde est forêt a la difficile tâche de suivre ce moment d'excellence. Malgré avoir reçu le Prix Hugo, il est pour moi légèrement en dessous. De la manière que le "très bon" est juste en dessous de "l'excellent".

À la différence du "schéma classique" d'Ursula Le Guin, on ne suit pas ici la rencontre d'une nouvelle planète avec l'Ekumen. À la place, on découvre le Monde 41, une planète où toutes les terres sont couvertes de forêts. Exactement l'inverse de l'actuelle Terre, qui l'a colonisé pour le déboiser. Mais quid des pacifiques autochtones ?

Encore plus que dans Le Dit d'Aka, les terriens sont au premier plan et offrent une comparaison d'autant plus facile avec notre présent. Outre quelques considérations d'ordre métaphysique, on réfléchira principalement sur les thèmes de l'écologie et du colonialisme. Si les réflexions peuvent sembler évidentes de notre point de vue contemporain et de fait moins percutantes que d'habitude (ce qui n'enlève rien à leur justesse), il faut se rappeler que ce texte a été écrit en 1972. On peut alors crier au génie.

Deuxième participation au challenge SFFF au féminin

dimanche 20 avril 2014

Antoine Rouaud - La Voie de la colère

La Voie de la colère, Antoine Rouard, Tome 1/3 de Le Livre et L'Épée, 2013, 469 pages.

Un gros bandeau rouge. Une grande campagne promotionnelle. Des superlatifs à la pelle. C'est ainsi qu'est vendu La Voie de la colère, le premier roman d'Antoine Rouaud. Un tas de bonnes raisons pour ne pas le lire. Et pourtant, dans une période de grande mansuétude, j'ai fini par me lancer.

J'avais beau m'être préparé à être déçu, à ne pas découvrir un livre aussi exceptionnel que ce qu'on avait voulu me vendre, les faits sont là : je m'attendais à mieux. Mon avis est peut-être légèrement biaisé par le battage qui a eu lieu autour, qui m'a fait faire une lecture avec un oeil très critique, à la limite du chipotage. La rançon de la gloire. Un peu de justice tout de même : ce n'est pas mal, c'est un bon livre. Mais pas au-dessus de ça.

Avant tout, il faut que je parle de ce qui m'a peut-être le plus choqué dans ce livre : les introductions des chapitres. Ils commencent par une citation, ce qui se voit de temps à autre. Ce qui ne se voit pas par contre (en tout cas par moi), c'est que cette citation provient du livre en lui-même. Que cela soit dans le chapitre à venir, ou bien avant, ou bien après. Sans logique apparente. C'est... étonnant. Bref.

Le début m'a fait penser à la Chronique du tueur de roi de Patrick Rothfuss. Pour deux points communs. Le premier, c'est la figure du héros qui est mise à mal, la grandeur qui ne se retrouve que dans les rumeurs mais bien moins dans la réalité. Le second, c'est la manière d'introduire le récit du passé, de lui donner une raison d'être raconté. Car le roman oscille sans cesse entre présent et passé.

Cet incessant changement d'époque donne du rythme. Mais, alors qu'au début le changement était toujours introduit, par une discussion et une raison d'être, rapidement les flashbacks deviennent mécaniques, sortis de nulle part. Un peu comme si la bonne idée de départ s'avérait trop laborieuse à mettre en place jusqu'au bout. Ça m'a irrité plusieurs fois. Un autre problème sur la forme, c'est la répétition de l'intrigue du passé sous deux points de vue. La deuxième fois fut plutôt ennuyante, n'apportant pas grand chose, pas aidé par un personnage bien moins intéressant. Je pense avoir vu ce que l'auteur a essayé de faire et je trouve même l'idée bonne. Sauf que cela n'a pas fonctionné pour moi. Un problème de charisme, un manque d'attache et d'affection pour les personnages, et de superficialité - je vais y revenir.

L'histoire est plutôt intéressante. Un vieil empire devenu une république après la révolution. Une historienne qui recherche les vestiges de cet empire, notamment l'épée de l'empereur. Et un livre qui contiendrait le destin des hommes. Pas de grands retournements de situation mais une histoire qui prend peu à peu de l'ampleur et parvient à évoluer. Ça monte vraiment en puissance au fil des pages et la fin est la meilleure partie. L'histoire et l'univers sont vraiment le point fort du livre (tout comme le titre qui est bien choisi et a du sens).

Mais... Ça manque d'approfondissement. Ça manque de risque. Ça reste trop en surface des choses. Il y a pas mal d'axes de réflexion intéressants, que cela soit sur le système politique, sur la question du libre-arbitre, sur le contrôle de l'écriture,... Et cette dualité entre le livre et l'épée ! Et pourtant rien n'est développé, on reste sur sa faim alors que le potentiel est là.

La Voie de la colère est le premier tome de la trilogie Le Livre et l'épée. Ce tome pourrait presque se suffire à lui-même : il resterait quelques questions en suspens mais on a vu des romans s'arrêter sur des fins plus ouvertes. Je n'ai aucune idée d'où nous emmènera la suite. Mais il y a du potentiel, c'est indéniable. Il ne reste plus qu'à le concrétiser.

jeudi 17 avril 2014

Nancy Kress - Les Hommes dénaturés

Les Hommes dénaturés, nancy Kress, 1998, 263 pages.

J'ai découvert ce livre en lisant la chronique de Vert. Je ne sais pas vraiment pourquoi mais j'ai eu envie de le lire. De 4 pierres 2 coups, cela me permet aussi de faire mon entrée dans le challenge SFFF au féminin de Tigger Lilly.

Dans un futur proche (à la fois temporellement et en terme d'apparences), la stérilité a pris le pas sur la fertilité. En cause, la pollution de l'air. Les jeunes sont devenus une ressource rare dans cette société vieillissante. Alors, pour combler les besoins de maternité de certains couples, des substituts se créent, pas toujours de manière légale...

L'histoire se découpe en alternance selon trois points de vue et se suit comme un polar. Shana a vu ce qu'elle n'aurait pas du voir et se retrouve, avec Nick et Cameron (c'est un garçon - au cas où vous liriez le livre et vous poseriez comme moi la question pendant assez longtemps), à entrer dans les méandres du système.

Sous couvert d'une histoire de science-fiction futuriste, c'est évidemment le présent que questionne Nancy Kress. Plusieurs sujets au programme : l'impact de la pollution/des produits toxiques, la stérilité, la mort, la recherche scientifique, le rôle et le but des élites,... Pas vraiment joyeux dans l'ensemble mais rien de déprimant pour autant, même une pointe d'espoir. En cela, l'aspect "polar" aide bien à dédramatiser un peu (ou en tout cas à dramatiser sur autre chose).

Les Hommes dénaturés est un bon livre, une lecture qui est relativement facile tout en abordant des sujets "sérieux". Il n'est pas exempt de quelques défauts : une technologie vieillotte (même si personnellement ça ne m'a pas gêné), une vision du monde américano-américaine et un climax qui retombe brusquement à plat. Mais c'est négligeable en comparaison du rythme envolé du récit et de l'intelligence du questionnement.

Première participation au challenge SFFF au féminin

lundi 14 avril 2014

Terry Pratchett - Le Huitième sortilège

Le Huitième sortilège, Terry Pratchett, Tome 2/35 des Annales du Disque-Monde, 1986, 270 pages.
« On n’a jamais vraiment voyagé tant qu’on n’est pas rentré chez soi. »
Le Huitième sortilège est la suite directe de La Huitième couleur. On y retrouve Rincevent et Deuxfleurs quelques minutes après leur décollage spatial. J'avais eu presque hâte que le premier tome se termine. J'ai hâte de lire le troisième.

J'ai rarement (jamais ?) vu une progression aussi impressionnante entre deux tomes. Alors que La Huitième couleur s'embarquait dans une suite d'aventures sans queue ni tête qui ne m'accrochait pas plus que ça, trouvant même le temps un peu long, Le Huitième sortilège m'a happé du début à la fin.

Je ne saurais précisément expliquer ce qui a fait la différence. Peut-être l'histoire plus définie et ayant un véritable fil conducteur. Le rythme est lui aussi mieux géré avec une capacité à être rapide ou lent aux bons moments (ne me demandez pas d'expliciter cela). Moins de - nouveaux - personnages aussi et une meilleure concentration de l'action. Mais surtout de l'humour à foison. Alors que dans le premier tome je n'avais trouvé que quelques fulgurances, ici les vannes sont grandes ouvertes et ce sans que la qualité du récit n'en pâtisse.

Le Huitième sortilège est donc un très bon roman. Il me réconcilie avec Rincevent que j'ai désormais envie de retrouver. Si la suite se maintient à ce niveau, je pense rapidement devenir accro. Une mention spéciale pour La Mort (qui a une nouvelle fois les meilleurs passages) et le Bagage (que j'imagine toujours en Coffrapatte de chez Rayman).
« La Mort ne répondit pas. Il regardait Spold à la façon d’un chien qui lorgne un os, sauf que dans le cas présent c’étaient plutôt les os qui lorgnaient le chien. »

samedi 12 avril 2014

Lucius Shepard - Petite musique de nuit

Petite musique de nuit, Lucius Shepard, 1997, 248 pages.

Le mois dernier, Lucius Shepard est mort. De son vivant, je dois honteusement avouer n'avoir lu que Le Dragon Griaule, un livre qui m'a marqué puisque je jure désormais régulièrement par le nom de Griaule. Alors le peu que je pouvais faire pour lui rendre hommage était de lire un autre de ses ouvrages.

Petite musique de nuit est un recueil de 5 nouvelles (ou 4 nouvelles et 1 novella peut-être) écrites par Lucius Shepard dans les années 90. C'est la VF du recueil Barnacle Bill the Spacer and Other Stories qui comprend 7 nouvelles. Les 2 nouvelles manquantes sont parues dans d'autres recueils en VF (Zone de feu Émeraude et Futurs à bascule).

Une fois n'est pas coutume, je vais commencer par la nouvelle qui termine le recueil : Une histoire de l'humanité. Longue d'une centaine de pages, c'est la seule à être fortement ancrée science-fiction. À la limite du post-apo peut-être. Peut-être, parce que je ne suis pas exactement sûr d'avoir compris l'histoire. Il y a pourtant de bons éléments, un mystère sur la compréhension et la réalité du monde et une ambiance lorgnant vers le western. Mais je n'ai jamais réussi à vraiment visualiser la situation. La dernière partie ne m'aura pas aidé, sans véritable résolution. Une déception.

Avant cela, il y a 4 courtes nouvelles. Deux m'ont moyennement plu. Dans Petite musique de nuit, un critique musical voit sa perception du monde bouleversée après avoir entendu le concert d'un quatuor de musiciens ressuscités. Du potentiel, une montée en puissance mais une fin qui retombe à plat. Cela m'a un peu fait penser à Le Sens secret d'Isaac Asimov mais en moins bien. Concernant Tous les parfums d'Arabie... je ne me souviens déjà plus de la fin. Une histoire d'amour (un point commun à toutes ces nouvelles) sur fond de marché noir. Ça ne décolle pas.

Mais tout n'est pas négatif. La Bête des terres intérieures et L'Amérique du sport ont le point commun de parler de sport. La première est l'histoire d'un boxeur presque aveugle. La deuxième celle de deux tueurs qui parlent baseball et basket pour passer le temps et détourner leurs pensées. Deux histoires touchantes, pour des parcours à la fois exceptionnels et ordinaires, portées par des personnages forts et vrais.

Au final, c'est un recueil en dents de scie. On reconnait la patte Lucius Shepard dans ces histoires où l'intérêt se concentre du côté des personnages. Des personnages tracassés, tiraillés par la vie et leurs vie de couple. Pas un livre indispensable mais le potentiel de faire une bonne découverte au détour d'une nouvelle.

jeudi 10 avril 2014

Feux Divers #4 - Mythic Women

Avec un peu de retard dans les deux cas, petit bilan d'un challenge passé et présentation d'un challenge à venir (pour ma part en tout cas).

Winter Mythic Fiction

Le Winter Mythic Fiction, organisé par Lhisbei, a pris fin le 21 mars.
Il consistait en la lecture de "Mythic Fiction", soit des textes qui utilisent ou réécrivent des mythes, contes et légendes authentiques de notre monde. N'ayant au départ presque aucune idée de ce que j'allais bien pouvoir lire, je suis parvenu à un honorable total de 5 participations, pour des avis très variés :

- Même pas mort de Jean-Philippe Jaworski
- La Magnificience des oiseaux de Barry Hughart
- Princess Bride de William Goldman
- Roi du matin, Reine du jour de Ian McDonald
- L'Enchanteur de René Barjavel

Les chroniques de tous les participants sont à retrouver ici. Merci à Lhisbei pour ce challenge !
Surtout que, caillou sur le cairn, j'ai pu y remporter l'anthologie Les Héritiers d'Homère des Éditions Argemnios.



SFFF au féminin

Le challenge SFFF au féminin est organisé par Tigger Lilly du 8 mars 2014 au 8 mars 2015.
Le nom est explicite : il s'agit de lire des livres de SFFF écrits par des femmes. Ce sera l'occasion de découvrir de nouvelles plumes ou d'en approfondir d'autres (ainsi que de se rendre compte que certains auteurs sont en fait des auteures...). J'ai quelques idées mais pas de plan démoniaque méticuleux, on verra bien ce qui tombe entre mes mains (et dans mon champ de vision). Je me suis tout de même lancé un "challenge dans le challenge" : lire Jonathan Strange & Mr Norrell de Susanna Clarke. Et motiver Tigger Lilly à le lire aussi. Voire d'autres.

Première participation dans quelques jours !

mardi 8 avril 2014

Scott Lynch - La République des voleurs

La République des voleurs, Scott Lynch, Tome 3/7 des Salauds Gentilshommes, 2013, 669 pages.

Cela fait relativement peu de temps que j'ai découvert Les Salauds Gentilshommes. Ce qui aura eu une conséquence heureuse : je n'aurais pas, comme tant d'autres, attendu des années pour lire la suite. Enfin, ce n'est pas comme si le tome 2 se terminait sur un demi-cliffhanger terrible.

Allons à l'essentiel. La République des voleurs - un très bon titre, qui trouvera un double écho dans ses pages - est du très bon Scott Lynch. Satisfaisant et absolument pas décevant. Au jeu des classements, je le placerais tout de même en dessous des deux autres. Mais cela reste très bon.

On retrouve Locke et Jean peu de temps après les avoir laissés. Fidèles à eux-mêmes, avec cette gouaille (Définition : Attitude impertinente, moqueuse, insolente ; Synonyme : Locke Lamora) et ce bagou quasi-suicidaire. Le style de Scott Lynch est toujours identique et efficace. La forme du récit renoue avec ses origines : une imbrication du présent et d'interludes du passé. Deux histoires en une. Avec la prouesse d'avoir réussi à retenir mon intérêt et le suspense même dans l'histoire ancienne (alors que l'on sait très bien comment cela va finir).

Mais l'élément essentiel de ce roman, c'est Sabetha. La Sabetha, attendue depuis le tout premier tome. Du coup, La République des voleurs, c'est presque un roman Harlequin. Et on aime ça. Étonnamment, cela parvient à ne pas tomber dans le gnangnan alors que certains éléments en sont caractéristiques. Alors, pourquoi ça marche ? Il y a une raison selon moi : c'est le troisième tome. Une histoire pareille dans le premier tome n'aurait pas fonctionné. Mais là, on connait les personnages, on les apprécie, on est fan et accro. Alors on apprécie. C'est le syndrome "Sherlock saison 3" : tout seul, ce n'est pas si bon que ça ; avec les deux premières saisons/tomes, cela fonctionne parfaitement.

Tout de même, ce volume est un peu en dessous de ses prestigieux prédécesseurs, pour des raisons que je n'explique pas forcément. Un point qui ne m'a pas réellement dérangé mais qui trouvera un impact chez d'autres, c'est le manque d'arnaques et de ruses de grande ampleur. Il y a toujours un bon lot de petits effets, mais globalement l'action prend le pas sur la réflexion (en comparaison des deux autres tomes). Personnellement, le vrai point faible se trouve dans l'histoire elle-même. Dans deux scènes précisément. J'ai haï les révélations sur le passé de Locke. J'ai plutôt détesté l'épilogue. Oh, à chaque fois c'est bien maîtrisé et il y a quelque chose à quoi se raccrocher pas très loin. Mais globalement j'ai peur de la tournure que prennent les événements. Cela se résume en une phrase : la magie prend trop de place.

J'ose espérer que le tome 4 infirmera mes propos. Et fera par la même occasion remonter le tome 3 dans mon estime. Ce qu'il a déjà fait entre ma fin de lecture et les quelques jours qui se sont écoulés depuis. Ce qu'il fera peut-être encore dans les prochaines semaines, quand la lecture sera vraiment froide et que les trop grandes attentes que j'en avais s'estomperont pour laisser place à un réalisme enjoué : La République des voleurs, c'est excellent.

samedi 5 avril 2014

Léo Henry - Rien ne bouge

Rien ne bouge, Léo Henry, 2014, 28 pages.

À l'occasion de la sortie prochaine du Bifrost 74 consacré à Léo Henry, Le Bélial' a mis en ligne gratuitement pendant tout le mois d'avril une nouvelle inédite de l'auteur : Rien ne bouge. L'occasion pour moi de découvrir l'auteur.

Enfin, "découvrir". N'ayant rien lu d'autre, je ne saurais dire si c'est représentatif de l'auteur. Je ne l'espère pas. Je n'y crois pas, compte tenu des bonnes critiques que j'ai pu lire d'autres ouvrages. Ou alors je ne comprends plus rien.

Justement, en parlant de ne rien comprendre. Il y a différents points de vue, qui se croisent et se recroisent. Et le froid, un grand froid, un hiver omniprésent. Un nain aussi. Et pour autant aucun rapport avec Le Trône de fer. Je suis incapable d'en dire plus. Je n'ai aucun visuel à l'esprit. Aucune idée de l'histoire.
Il y a tout de même un élément qui se démarque. Une postface intitulée "Moi non plus je n'aime pas ne pas comprendre" (pouvez-vous imaginer le grand sourire que j'ai lu en lisant cela ?). Je me dois de citer le premier paragraphe qui explique beaucoup de choses :
« Cette nouvelle a été écrite en novembre 2012. Il faisait froid et très sombre, je travaillais pour du blé, sans temps pour moi et le monde me paraissait glaçant et mortifère. Je n’ai écrit ce texte que pour moi (je ne le fais jamais, quand je le fais je ne le montre pas), comme on assemble une poupée vaudou. Un objet grotesque, peu plaisant, mais chargé d’espoir en des jours meilleurs, et de foi dans son pouvoir de changer le réel. »
Il reste un mystère : pourquoi l'avoir sorti des cartons ? Et une interrogation pour moi-même : dois-je vous inviter à lire cette nouvelle et découvrir si je suis le seul à en être passé plus qu'à côté ou vous faire économiser quelques minutes de votre précieux temps de lecture ? Je crois que je penche pour la deuxième solution.

mercredi 2 avril 2014

Colum McCann - Transatlantic

Transatlantic, Colum McCann, 2013, 371 pages.

Petit détour du côté de la littérature "générale". Transatlantic est le dernier roman en date de Colum McCann. Et je dois bien dire que, une fois n'est pas coutume, je suis tout à fait d'accord avec les commentaires sur les rabats et la quatrième de couverture : c'est un roman très attendu après l'exceptionnel Et que le vaste monde poursuive sa course folle. Et tous ses autres bons romans.

Transatlantic est typiquement du Colum McCann. Sur la forme tout d'abord. Dans la lignée de son précédent roman, il multiplie, raisonnablement, les histoires et les personnages pour les faire se croiser, ici ou là, de près ou de loin. Deux types de personnages s'imbriquent : les "réels", ayant véritablement existé, mis en scène d'une manière qui se veut la plus proche possible d'un certain réalisme (les aviateurs Alcock et Brown, l'anti-esclavagiste Frederick Douglass et le politicien George Mitchell) et les "inventés", en l'occurrence les différentes générations de la famille Duggan.

Thématiquement, c'est aussi du pur Colum McCann. L'Irlande est au coeur du récit. Avec les Etats-Unis. Transatlantique qu'on vous dit, ce n'est pas qu'un titre. Les nombreuses parties concernant l'Irlande m'ont fait penser à son recueil de nouvelles Ailleurs, en ce pays, dans cette manière de montrer la pauvreté avec une sobriété qui n'enlève rien à la tristesse. La sobriété, c'est un des mots qui définit le mieux le style de Colum McCann. Il n'en fait jamais trop, il colle au plus près de la réalité. Des phrases courtes, percutantes. À la fois détaillé et précis dans son propos, mais toujours simple et concis.

Il y a de la mélancolie et de la tristesse qui se dégage de ce roman. Des passages durs, des peines, des détresses. Mais pas de pessimisme. Pas forcément de grand optimisme non plus. Des petits bonheurs. Un simple constat. Et des avancées, de temps à autre, peut-être. Colum McCann offre un reflet de la vérité, dans ce mélange entre exceptions et banalités. Chacun y trouvera la sienne.

Transatlantic, c'est une nouvelle fois le récit de la vie. La vraie vie, pour ce que cela peut bien vouloir signifier. Celle qui mélange l'Histoire et l'histoire. Celle où les personnages de la grande histoire en vivent de petites. Où les personnages de la petite histoire croisent la route de la grande.