samedi 30 août 2014

Megan Lindholm - Le Peuple des rennes

Le Peuple des rennes, Megan Lindholm, Tome 1/2, 1988, 421 pages.

Âge du bronze, quelque part. Tillu, guérisseuse, vit seul avec son fils, Kerleu, apprenti chaman et souffrant d'une certaine déficience mentale, suscitant la moquerie et le rejet de l'enfant par toutes les tribus où la famille s'installe. Ils s'isolent donc en forêt, sans savoir qu'ils se trouvent à proximité du peuple des rennes.

À la croisée du roman (pré)historique et de la fantasy (pour la touche de chamanisme essentiellement), Le Peuple des rennes ne sent pas le vieux. Et pour cause, tout semble normal et presque actuel. Les dialogues ne souffrent d'aucun problème de compréhension, le vocabulaire semblant même parfois trop élaboré, les personnages semblent vivre normalement, comme n'importe quel fermier du XIXème siècle. Les évocations de la préhistoire sont bien présentes, le contexte est très visuel, mais le dépaysement n'est pas immense.

Mais ce qui pourrait être une faiblesse est aussi la plus grande force du récit : l'intemporalité de son sujet. Car si l'intrigue principale, qu'on suit avec intérêt, est la survie de Tillu et Kerleu, l'attention est portée sur la relation entre cette mère et son fils "différent". Et bien plus généralement sur la gestion du handicap mental, que cela soit pour la mère, entre amour et désespoir, que vis-à-vis du reste de la communauté. Peu importe la préhistoire, ces situations sont toujours pleinement d'actualité.

Le Peuple des rennes est un roman qui sonne juste. Tillu et Kerleu ne sont pas toujours forcément des plus sympathiques (ce rôle est assumé par Heckram, la gentillesse incarnée) mais ne peuvent pas laisser indifférent. La préhistoire n'est qu'un prétexte pour conter les cheminements de personnages intemporels, sans que l'intrigue n'en pâtisse. Une très bonne lecture qui donne toutes les raisons d'aller lire le second volet de cette duologie : Le Frère du loup.


Troisième participation au Rupestre Fiction

Vingtième participation au challenge SFFF au féminin

mercredi 27 août 2014

Robert A. Heinlein - Étoiles, garde à vous !

Étoiles, garde à vous !, Robert A. Heinlein, 1959, 315 pages.

À l'époque des guerres interstellaires, la Terre doit se défendre contre ses nombreux ennemis et notamment les "Punaises". Le jour de ses 18 ans, Juan Rico s'engage dans l'Infanterie Mobile, une section utilisant des scaphandres propulsés et très mobiles. On suit son entrainement et sa progression dans les rangs de l'armée.

Étoiles, garde à vous !, c'est Full Metal Jacket dans le futur. La comparaison m'est apparue très rapidement et ne s'est jamais démentie. Tout d'abord pour le héros, un gars normal, juste peut-être un peu plus intelligent que la moyenne, qui s'engage dans l'armée. Le découpage du récit est lui aussi proche. La première partie voit Juan subir, avec ses camarades, un entraînement rude et musclé. La deuxième suit une bataille. L'accent n'est pas porté sur la guerre en elle-même, on ne la suivra que de loin, mais bien sur le personnage de Juan et des gens qui l'entourent.

L'analogie peut se poursuivre avec le trouble qu'apporte les idées développées. Le roman est militariste, voire pire, mais est difficilement haïssable par la maîtrise que Robert Heinlein semble avoir du sujet et par le talent qu'il a de conter une histoire intéressante tout en insérant de grandes tirades sur la politique, la citoyenneté, l'éducation,... Si le fond est discutable, la forme doit être saluée et respectée.

Ainsi, comme Full Metal Jacket, Étoiles, garde à vous ! est un roman vis-à-vis duquel il est difficile de se placer intellectuellement, entre éloge pro-militariste et absurdité du système. Dans tous les cas, il reste que c'est un roman prenant et très facile à lire, qu'on ne peut qu'admirer dans sa vision d'ensemble. Comme Full Metal Jacket.


Huitième participation pour le Summer Star Wars : Episode II

dimanche 24 août 2014

Ursula Le Guin - L'Anniversaire du monde

L'Anniversaire du monde, Ursula Le Guin, 2002, 398 pages.

Avec L'Anniversaire du monde, Ursula Le Guin nous invite une nouvelle fois à découvrir l'Ekumen, son univers de science-fiction fétiche. 7 des 8 nouvelles présentes dans ce recueil s'y déroulent, sur des planètes diverses et variées.

Et la variété, l'imagination, la créativité, c'est bien l'impression qui domine à la lecture. Grâce au format, ce n'est pas un ou deux planètes que l'on visite mais 6, inédites ou déjà rencontrées, avec chacune leur spécificité. L'imagination d'Ursula Le Guin, concrète et plausible tout en étant extraordinaire, est bluffante.

Comme toujours, l'auteur traite de son sujet favori, l'humanité, dans des histoires simples et touchantes. Pas de nouvelles à chute, pas de grands rebondissements ni d'actions à gogo, juste une fenêtre sur des instants de vie. On notera tout de même une certaine violence inhabituelle (si ce n'est dans Le Nom du monde est forêt) dans L'Anniversaire du monde et surtout dans Musique ancienne et les femmes esclaves.

L'esclavage, l'acculturation, les traditions, la religion,... sont parmi de nombreux thèmes développés ici et là. Il y en a tout de même un constant sur les 4 premières nouvelles : la sexualité et les rapports homme/femme. Avec - je me répète mais c'est pour la bonne cause - une créativité géniale.

Et puis il y a Paradis perdu, la nouvelle ne faisant pas partie de l'Ekumen, pièce majeure du recueil avec sa grosse centaine de pages, qui ne fait pas tâche dans l'ensemble. Au contraire, en substituant à une énième planète un vaisseau spatial voguant pendant plusieurs générations, Ursula Le Guin traite habillement de la vie communautaire et fait opérer la même magie qu'elle déverse sur tout l'Ekumen.


Septième participation pour le Summer Star Wars : Episode II

Dix-neuvième participation au challenge SFFF au féminin

jeudi 21 août 2014

Fredric Brown - L'Univers en folie

L'Univers en folie, Fredric Brown, 1949, 291 pages.

Keith Winston est journaliste dans Aventures extraordinaires, une revue de science-fiction. En week-end chez son patron, où il en profite pour tomber amoureux d'une collègue, il assiste au lancement d'une fusée sur la lune... qui s'écrase finalement sur lui et l'envoie "ailleurs". Dans un univers en folie, où tout semble identique hormis la conquête spatiale.

L'Univers en folie est une satire des revues de science-fiction de l'époque, des pulps caricaturaux remplis de héros musclés aux yeux bleus, de pin-up peu vêtues et de monstres hideux. Fredric Brown en reprend les codes, s'en moque et construit une histoire qui n'a rien à leur envier.

Amusant sans être foncièrement drôle, L'Univers en folie est surtout un récit captivant. Malgré un monde proche du notre, le sens de la découverte et de l'exploration est bien là, à la recherche des subtiles modifications. Et bien que les résolutions ne soient pas forcément toujours à la hauteur, l'aventure prend le pas sur les quelques défauts et offre une très sympathique lecture.

Sixième participation pour le Summer Star Wars : Episode II

lundi 18 août 2014

Jean-Philippe Depotte - Les Démons de Paris

Les Démons de Paris, Jean-Philippe Depotte, 2010, 515 pages

Paris, début du XIXème siècle. Joseph, religieux proche d'être ordonné prêtre, est capable de converser avec les morts. L'occasion pour lui de chercher à comprendre ce qu'il y a après la vie. Dans le même temps, il se retrouve embrigader dans les complots politiques de l'époque, entre mafia parisienne, révolution russe et arrivée du Tsar dans la capitale.

Il y a de bonnes idées dans Les Démons de Paris. Mais il y a surtout deux fils narratifs, un surnaturel et un politique, qui ont chacun leur intérêt mais qui n'arrivent jamais à cohabiter pleinement. À chaque fois que l'on arrive à s'imprégner d'une histoire, on se retrouve ramené dans l'autre. En résulte l'impression qu'il y a du potentiel mais que les deux parties ne fonctionnent pas ensemble, qu'elles mériteraient de plus amples développements qui ne sont pas possibles à cause de la forme du récit.

La sensation de ne pas rentrer dans l'univers n'est pas aidée par la durée de l'histoire, qui se comprime en 24 heures. Alors que ce Paris dirigée par une femme à la poigne de fer laisse présager une belle redécouverte de notre capitale, il n'en est en fait rien. Pas le temps de s'installer, allez faire un tour ailleurs.

Je suis complètement passé à côté de ce livre. Aucune sympathie pour les personnages et donc rapidement aucun intérêt pour l'histoire. D'autant plus que l'on en sait toujours plus que les personnages et que notre seule idée est d'enfin arriver à un peu de nouveauté au lieu de vivoter à la recherche d'informations déjà connues. Encore une fois, j'y vois tout de même quelques qualités dans les idées proposées. Mais la mise en application laisse à désirer.

vendredi 15 août 2014

Écran de fumée #4 - Éloge d'une certaine lenteur

Innocemment, on aurait tendance à dire que la lenteur dans une série, c'est chiant. Synonyme d'ennui ou de contemplation assoupissante dans l'inconscient collectif, une série supposément lente n'est pas forcément notre premier choix dans notre liste de lecture.
Pourtant, la lenteur est loin d'être toujours un défaut. Bien utilisée, cela peut même être une qualité primordiale. Accordez lui un bon scénario, un cadre remarquable, un excellent dialoguiste et de non-moins excellents acteurs et vous aurez peut-être la chance de voir se réaliser un petit chef-d'oeuvre. Car, bien dosée, la lenteur permettra de magnifier ces éléments, d'en utiliser le plein potentiel et de faire monter la pression.

Bon, tout ça c'est bien joli, théoriquement c'est très facile, mais dans les faits, ça donne quoi ?
Petit tournée de 3 séries qui conjuguent lenteur et réussite.


AMC, 2008-2013, 5 saisons, 62 épisodes de 45 minutes

Breaking Bad n'est pas la première série lente à avoir existé. Pourtant, elle marque pour moi un tournant dans l'histoire des séries télé en remettant cette qualité sur le devant de la scène. Pour toutes les séries récentes et pour toute la vague à venir, Breaking Bad aura assurément été une précurseuse.

Breaking Bad raconte la vie et l'évolution de Walter White. Professeur de chimie, il apprend qu'il a un cancer du poumon. Pour assurer l'avenir de sa famille, il se lance, avec un ancien élève, dans la fabrication et la vente de méthamphétamines.

Tout est bon dans le "Breaking Bad" !
Les personnages sont forts, bien construits et en évolution constante. Celui de Walter White, sans fausse note, restera une référence pendant bien longtemps. Surtout, ils sont portés par une flopée d'excellents acteurs (Bryan Cranston et Aaron Paul en tête, mais ils sont loin d'être les seuls).
L'histoire est prenante, crédible la plupart du temps, capable d'un grain de folie quand il le faut. L'utilisation des flashforwards, en début de saison ou d'épisode, est judicieuse et crée quelques moments mémorables (Walter White en slip, ça rappelle quelques souvenirs ?).
Et puis il y a donc cette lenteur, cette manière de prendre son temps, de laisser les scènes mariner, de laisser de la place aux acteurs pour s'exprimer. La tension monte, les répliques sonnent, et les climax n'en sont qu'encore plus étourdissants.

Pour beaucoup, Breaking Bad est l'une des meilleures séries de tous les temps. Les autres ne l'ont pas encore vue. De quel côté êtes-vous ?


HBO, 2014-en cours, 1 saison, 8 épisodes de 60 minutes

True Detective, c'est la série qu'on se rappellera - peut-être - dans le futur comme un tournant.

D'abord pour avoir (re)popularisé le format de l'anthologie (des saisons indépendantes qui raconte chacune une histoire complète). Ce n'est pas la première à l'avoir fait ces derniers mois, mais c'est bien celle qui a suscité le plus d'engouement et de visibilité. Sous réserve, bien sûr, que la saison 2 soit à la hauteur.

Conséquence en partie de ce premier point, la série se permet un casting hollywoodien, avec des acteurs qu'on ne s'attendait pas à voir là. L'efficacité est au rendez-vous : Woody Harrelson et Matthew McConaughey sont épatants.

C'est aussi la preuve qu'on peut encore faire quelque chose de bien avec une histoire policière, sans tomber dans le procedurial routinier habituel. C'est toutefois facilité par un format compact, en peu d'épisodes, qui vient confirmer une tendance plus générale à la série courte.

Ainsi, True Detective conte l'histoire de deux inspecteurs, Rust Cohle et Martin Hart, dans la résolution d'un meurtre en 1995. Ambiance Louisiane marécageuse, sombre et morbide. Et l'ambiance, c'est l'un des plus grandes forces de la série. Le noir est de mise et c'est pourtant splendide à observer, la photographie est admirable.

8 heures pour résoudre un meurtre, on ne peut pas contredire l'idée d'une certaine lenteur. L'intrigue prend son temps, fait même quelques détours, ne se limite pas à raconter une enquête mais bien à construire et déconstruire ses deux personnages principaux. Alors ces 8 heures passent à une vitesse folle. Il ne faut rien enlever à Woody Harrelson, très bon et absolument essentiel au rayonnement de son collègue. Mais Matthew McConaughey est simplement exceptionnel et mérite à lui seul le visionnage de la série. Hypnotisant à chaque apparition, ses monologues sont à chaque fois des pépites.

La saison 1 est bien construite, lente et captivante. L'exploit peut-il être répété dans la saison 2 ?


FX, 2014-en cours, 1 saison, 10 épisodes de 45 minutes

Alors que la saison 2013/2014 semblait avoir fourni sa perle avec True Detective, il s'est avéré qu'une deuxième se cachait dans son ombre : Fargo. Si le nom vous dit quelque chose, c'est normal. C'est en effet aussi le titre d'un film des frères Coen, ici producteurs, et la série est basé sur ce dernier. Mais pas d'inquiétude, la série se regarde indépendamment.

Difficile d'en faire un pitch très précis sans dévoiler un grand rebondissement. Simplement : un tueur à gage, Lorne Malvo, arrive dans la ville de Bemidji, transformant la vie de toute une frange de la population.

Au jeu des comparaisons, Fargo et True Detective ont pour commencer beaucoup de similitudes. Le format déjà, une anthologie, et un nombre d'épisodes restreint. Elles tirent aussi leurs forces des mêmes ingrédients : des personnages remarquables (la galerie est bien plus large dans Fargo), des excellents acteurs (dont Martin "je-ne-sais-pas-être-mauvais" Freeman, Billy Bob Thornton en tueur hypnotisant, Allison Tolman et Colin Hanks), des dialogues forts et une photographie léchée.

Mais au final, les deux séries n'ont rien à voir. Pour parler de l'atmosphère générale, si True Detective est noire, Fargo est blanche : grandes étendues de neige et paysages sublimes en perspective. Quant à l'histoire, elle ici complètement tragi-comique et pleine d'humour noir.

Et la lenteur donc. Même si la série ne manque pas d'actions d'éclat, elle repose tout de même grandement sur les dialogues et confrontations entre personnages. La réalisation leur laisse une grande place pour s'exprimer et n'hésite pas à faire durer ces moments. On a donc le droit à de nombreuses scènes de dialogues, de véritables duels verbaux aux répliques acérées. Et des silences tout aussi éloquents.

« Because some roads you shouldn't go down. Because maps used to say "there be dragons here". Now they don’t. But that doesn’t mean the dragons aren’t there. »

mardi 12 août 2014

Terry Pratchett - Roublard

Roublard, Terry Pratchett, 2012, 404 pages.

Roublard, il l'est. Et il le faut bien pour survivre à Londres, au XIXème siècle, dans la crasse et la misère. Roublard est un jeune ravageur : il fouille les égouts pour gagner sa vie. Un jour, il sauve une jeune demoiselle assaillie par deux hommes. Et sa vie bascule.

Difficile de ne pas faire la comparaison avec un livre de Charles Dickens. L'atmosphère est la même : le début de l'époque victorienne, un Londres sombre et sale, le regard tourné vers une pauvreté ignorée des élites, un jeune héros qui cherche à survivre et à grimper les échelons. Ce n'est donc pas surprenant de retrouver ce même Charles Dickens en tant que personnage de Roublard.

Et ce n'est pas la seule figure connue que le lecteur rencontrera, Terry Pratchett assaisonnant ici et là son récit de quelques faits historiques, s'autorisant quelques légères libertés sur les dates pour combiner le tout. Et c'est à peu près la seule chose qui classer ce roman en SFFF.

Intelligent, malin, débrouillard, Roublard a tout pour plaire. Surtout que le petit gars est en réussite et c'est une joie de le voir faire son chemin en dehors de la misère. C'est là que la comparaison avec Dickens s'arrête. Les péripéties sont globalement positives, Terry Pratchett est gentil avec son héros. Gentil, c'est le mot qui résume bien Roublard. Et c'est une bonne chose, cela fonctionne parfaitement.

samedi 9 août 2014

Daryl Gregory - Deuxième personne du singulier

Daryl Gregory, Deuxième personne du singulier, 2005, 33 pages (pdf).

À l'occasion de la sortie le 28 août de L'Éducation de Stony Mayhall de Daryl Gregory, la nouvelle gratuite du mois d'août offerte par Le Bélial' est Deuxième personne du singulier du même Daryl Gregory, à télécharger ici.

Le Z est une nouvelle drogue qui n'a en apparence aucune conséquence. Z comme Zen. En réalité, elle annihile momentanément la conscience du soi. Z comme Zombie. Thérèse en a fait une overdose : sa personnalité a disparu.

Deuxième personne du singulier est une nouvelle qui traite de la conscience, de l'identité, du soi. Du "je". De ce qu'il veut dire, de ce qu'il est vraiment. Et cela, Daryl Gregory réussit à le faire sans que cela paraisse compliqué ou indigeste, grâce notamment à la superbe métaphore du Parlement, du Messager et de la Reine. Les spécialistes trouveront peut-être le sujet traité superficiellement mais cela donne en tout cas envie de s'y pencher un peu plus.

Mais outre l'aspect philosophico-scientifique, Daryl Grégory n'oublie pas de fournir une véritable histoire. L'histoire sert le propos, le propos sert l'histoire. Le tout est une très bonne lecture, à la fois intelligente et touchante.

mercredi 6 août 2014

George R.R. Martin - Le Trône de fer, Intégrale 4

Le Trône de fer, Intégrale 4, George R.R. Martin, 2005, 891 pages.

Après une fin de troisième tome mouvementée (d'accord, plus que mouvementée), le quatrième tome s'annonçait forcément un peu plus calme. Ne serait-ce que pour garder quelques personnes en vie, dans l'optique de parvenir à terminer l'histoire avec autre chose que seulement des enfants.

Et effectivement, l'histoire est relativement calme. Moins de morts, en tout cas chez les personnages que nous suivons. Peu de grands chamboulements. Pourtant, ça n'empêche pas ce tome d'être toujours aussi intéressant. George R.R. Martin a cette faculté de rendre captivant même le fait le plus mineur. Surement parce que l'on sait que tous les détails sont importants, que tout peut basculer à la moindre phrase. Et parce qu'on y est attaché à cette brochette de personnages, même ceux qu'on n'apprécie guère.

Ainsi, les pions se remettent en place sur l'échiquier. On sent se profiler quelques coups importants dans le futur mais nous n'en avons ici que les prémisses. Mais il faudra attendre le tome 6 pour véritablement voir l'enfer se déchaîner de nouveau sur Westeros. Car ce quatrième tome n'est quasiment qu'un demi-tome, contant seulement les événements se déroulant au sud du continent (Port-Réal, Dorne, Eyrié,...) ainsi que sur les îles de Fer et Braavos. Pour le reste du monde, direction le tome 5.

Fondamentalement, on retrouve dans ce livre les mêmes ingrédients qui ont fait la qualité des trois premiers, je ne perdrai donc pas de temps dessus. Il y a tout de même une chose qui semble évoluer : la place des femmes. Bien aidé par le taux de mortalité croissant de la gent masculine, il s'avère que Le Trône de fer est de plus en plus une série avec des personnages féminins d'importance. La série en compte depuis le début un certain nombre en tant qu'héroïnes, dans des rôles et caractères bien différents, mais je trouve que leur place est de plus en plus importante. Une caractéristique qu'on ne s'attendrait pas forcément à rencontrer dans un tel univers et une nouvelle preuve de la grandeur de cette série.

dimanche 3 août 2014

David S. Khara - Le Projet Bleiberg


Le Projet Bleiberg, David S. Khara, Tome 1 des Projets, 2010, 261 pages.

Trader de qualité, Jay Novacek vit une existence dépravée, entre luxe et luxure, pour s'échapper de sa dépression. Jusqu'au jour où l'armée vient lui annoncer la mort de son père, qu'il n'a pas vu depuis son enfance. Et que sa mère lui remette une mystérieuse clé portant un symbole nazi. Sans oublier un agent du Mossad lancé sur ses traces.

CIA, Mossad, MI6, Nazi. Un cocktail qui a tout pour faire peur. Gare au complot mondial et à l'intrigue invraisemblable. Ou pas. Car David S. Khara ne tombe pas dans le piège d'en faire trop. Bien sûr, on n'évite pas quelques petits écueils, mais les gros ne pointent pas leur nez.

La réussite principale, c'est d'avoir limiter l'action à une certaine crédibilité grâce à un certain minimalisme : l'action se borne à quelques personnages, dure quelques jours, en peu de lieux. Pas de surenchère d'explosions et de cascade de rebondissements plus incroyables les uns que les autres (il y en a tout de même, mais en nombre acceptable). Plutôt de la simplicité qui donne bien plus de crédit au sujet sous-jacent : les recherches secrètes nazies.

Après ma lecture, j'en suis arrivé à comparer ce livre avec Point Zéro d'Antoine Tracqui. Si ce dernier est un gros blockbuster qui aime en faire beaucoup, Le Projet Bleiberg est en quelque sorte sa version soft (enfin, c'est en fait l'inverse, vu les dates de publication).

Le Projet Bleiberg est un donc bon thriller, qui préfère garder de la simplicité plutôt que de tomber dans l'excès et l'accumulation d'actions de péripéties. N'en reste pas moins un foisonnement d'espions et d'organisations internationales, un cocktail vitaminé qui offre un bon moment de lecture pour peu que l'on arrive à une certaine suspension d'incrédulité.